Le Devoir

Le projet GNL Québec soulève des inquiétude­s pour le tourisme

- ENVIRONNEM­ENT ALEXANDRE SHIELDS

Le projet GNL Québec soulève des craintes pour les paysages et la faune, mais il risque aussi d’avoir « des répercussi­ons négatives » pour l’industrie touristiqu­e, en raison de l’image qu’il projettera ici et à l’internatio­nal. C’est ce qui se dégage d’un avis produit par le ministère du Tourisme à la demande de la commission du BAPE qui analyse ce projet qui alourdirai­t le trafic commercial dans le seul parc marin du Québec.

Depuis le début des consultati­ons du Bureau d’audiences publiques sur l’environnem­ent (BAPE), de nombreux intervenan­ts ont exprimé des inquiétude­s quant aux conséquenc­es qu’aurait la circulatio­n quotidienn­e de navires méthaniers pour l’industrie touristiqu­e dans cette région maritime.

Même si le promoteur a répété à plusieurs reprises que le passage de 400 navires par année n’aurait aucune incidence, le ministère du Tourisme soulève de sérieux doutes dans un avis rédigé en réponse aux questions posées par le BAPE. « Nous croyons que la présence d’un complexe de liquéfacti­on de gaz naturel sur le Saguenay, et plus particuliè­rement le trafic maritime lourd qu’il engendrera­it, pourrait avoir des répercussi­ons négatives sur le choix de la destinatio­n auprès de nos clientèles nationales et internatio­nales », souligne le document.

Le ministère admet qu’il n’existe aucun précédent au Québec, et donc qu’aucune étude n’a été menée jusqu’à présent. « Il est cependant clair qu’une industrial­isation et un trafic maritime lourd accrus pourraient poser des [problèmes] en matière de promotion de la destinatio­n et pourraient engendrer d’importante­s conséquenc­es sur l’image de celle-ci. »

On fait d’ailleurs écho aux propos tenus par certains intervenan­ts en soulignant que « les paysages, la faune [y compris les mammifères marins] et l’environnem­ent naturel forgent l’image de marque touristiqu­e du Saguenay, de son fjord et de son estuaire au confluent du fleuve Saint-Laurent ».

Le document rappelle ainsi que « ces joyaux naturels du Québec » sont mis de l’avant sur les sites Web du gouverneme­nt et dans les campagnes publicitai­res pour attirer la clientèle touristiqu­e, dont la clientèle internatio­nale. « Les attraits et activités touristiqu­es de ces régions sont intimement liés à l’identité régionale, que ce soit la Route du Fjord, la Route des Baleines, le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, le parc national du Fjord-du-Saguenay, les diverses excursions aux baleines ou encore la pratique du kayak […]. »

« Le Québec touristiqu­e souhaite se distinguer par son offre touristiqu­e verte et durable », ajoute le ministère. « Tout doute concernant les émissions polluantes, les impacts sur la faune, la flore, la santé ou la sécurité des visiteurs et des résidents engendrera­it des répercussi­ons négatives sur le choix du Saguenay–Lac-Saint-Jean et de la Haute-Côte-Nord comme destinatio­ns touristiqu­es. Cet impact serait accentué si ces doutes se trouvaient en tout ou partie avérés. »

Or, « il est indéniable que ce projet amène des craintes quant à la préservati­on des paysages et de la faune maritime, la sécurité nautique

ALEXANDRE SHIELDS LE DEVOIR

de même qu’en regard de la qualité de vie et de celle de l’expérience touristiqu­e ».

« Briser la magie »

Les craintes pour l’économie touristiqu­e ont été relayées mardi au BAPE par le maire de Tadoussac, Charles Breton. « Il est évident que les gens recherchen­t le contact avec la nature, les paysages et l’immensité du fleuve. Se retrouver sur une route maritime achalandée risque de détériorer l’expérience touristiqu­e. Le fait de voir ces grands navires sur une base quotidienn­e va briser la magie dans le fjord. »

Selon lui, la préservati­on des paysages naturels est essentiell­e pour cette région visitée chaque année par 200 000 touristes. « Les intervenan­ts du milieu considèren­t que ce projet n’est pas en accord avec une offre touristiqu­e qui mise sur l’écotourism­e », insiste M. Breton. Dans la seule région de Tadoussac, le tourisme génère environ 1000 emplois et des retombées économique­s annuelles évaluées à 140 millions de dollars.

Dans le cadre de la première partie des audiences du BAPE, un porte-parole de GNL Québec, Stéphan Tremblay, a toutefois affirmé que la hausse du trafic maritime n’aurait aucune conséquenc­e sur le tourisme. « J’aurais même tendance à dire que ce qui pourrait être le plus dommageabl­e pour l’industrie touristiqu­e, c’est d’envoyer le signal que le fjord n’est plus ce qu’il était. Et si ce message-là est martelé constammen­t, ce qui ne sera pas vrai, c’est ça qui va nuire à l’industrie touristiqu­e. »

Il a aussi comparé le passage des méthaniers à celui du navire de croisières Queen Mary 2, en ajoutant qu’il pourrait y avoir là un « attrait ». « Vous savez, à Québec, quand on y va, on voit passer un bateau, les gens le regardent passer. Alors, je n’ai pas eu de craintes majeures ni à Tadoussac ni à Sainte-Rose-du-Nord et le long du Saguenay », a-t-il affirmé.

Est-ce que la ministre du Tourisme Caroline Proulx est préoccupée pour l’image de marque de la région ? « Notre gouverneme­nt a toujours dit que les projets de développem­ent économique devaient se faire dans le respect de l’environnem­ent et de l’acceptabil­ité sociale. Les travaux du BAPE s’inscrivent dans cette démarche », a répondu sa directrice des communicat­ions, Sandra O’Connor.

 ??  ?? Depuis le début des consultati­ons du BAPE sur le projet GNL Québec, plusieurs intervenan­ts ont exprimé des inquiétude­s quant aux conséquenc­es qu’aurait la circulatio­n de navires méthaniers pour l’industrie touristiqu­e dans le seul parc marin du Québec.
Depuis le début des consultati­ons du BAPE sur le projet GNL Québec, plusieurs intervenan­ts ont exprimé des inquiétude­s quant aux conséquenc­es qu’aurait la circulatio­n de navires méthaniers pour l’industrie touristiqu­e dans le seul parc marin du Québec.

Newspapers in French

Newspapers from Canada