Le Congrès américain divisé fait bondir les Bourses
Le résultat du scrutin présidentiel se fait attendre, mais les entreprises québécoises peuvent toutefois être certaines que le protectionnisme demeurera bien présent au sud de la frontière, peu importe l’identité de celui qui sera le prochain locataire de la MaisonBlanche. La différence résidera dans la manière avec laquelle il sera mis en oeuvre, ont estimé des observateurs.
Ceux-ci ont souligné que sous un gouvernement républicain, il faudra s’attendre à ce que des disputes bilatérales continuent à éclater pour ensuite se traduire par l’imposition de tarifs sur certaines catégories de produits, comme cela a notamment été le cas avec l’aluminium, l’acier, le papier journal et l’ex-C Series de Bombardier.
Les démocrates, eux, ont proposé d’investir massivement dans les infrastructures et d’autres projets de transport dans l’espoir de stimuler l’économie tout en favorisant l’achat de produits américains par l’entremise de clauses de type « Buy America ». Cela pourrait compliquer la tâche à plusieurs compagnies désireuses de faire affaire avec le plus grand partenaire commercial du Québec et du Canada.
« M. Trump, on le sait, fonctionne à coups de menaces et de plaintes en matière de commerce, a souligné Geneviève Dufour, professeure à la Faculté de droit de l’Université de Sherbrooke. Cela sera plus diplomate [avec M. Biden], mais peut-être que les possibilités d’avoir des contrats aux ÉtatsUnis seront plus fermées. »
Au sud de la frontière, les projets de transports publics stipulent déjà que 70 % des composants doivent être fabriqués aux États-Unis et que l’assemblage final doit s’effectuer en territoire américain. Il faudra voir à quel point les démocrates, s’ils sont élus, voudront aller plus loin.
Mark Warner, un avocat spécialiste du commerce canado-américain de la firme Maaw Law, à Toronto, a estimé que des obstacles risquent de se dresser devant le Canada en cas d’une victoire de M. Biden. Dans le cadre du nouvel accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), les parties n’ont négocié aucune entente entourant le recours, par Washington, à des règles concernant l’achat de produits américains. « C’est un problème qui risque d’éclater. Si M. Biden est élu, le Canada va devoir s’asseoir rapidement avec lui et trouver une solution. Cet enjeu n’avait pas retenu l’attention à l’époque, mais nous sommes maintenant complètement exposés. »
De l’avis de Mme Dufour et M. Warner, une victoire démocrate devrait écarter le spectre de nouveaux tarifs sur l’aluminium canadien. Le litige canado-américain sur le bois d’oeuvre risque toutefois, comme cela a été le cas dans le passé, de traverser les gouvernements et de perdurer.
Il faudra peut-être continuer à affronter le protectionnisme dans le marché américain, mais la présidentedirectrice générale de Manufacturiers & Exportateurs du Québec, Véronique Proulx, a estimé qu’il y aurait davantage de prévisibilité avec un gouvernement dirigé par M. Biden. À son avis, il est plus facile de savoir à quoi s’en tenir avec les clauses de type « Buy America » plutôt qu’avec les plaintes commerciales survenues sous le gouvernement Trump, qui ont parfois provoqué des surprises.