Les travailleurs de plus en plus inégaux devant la pandémie
Tous les travailleurs ne sont pas égaux devant la COVID-19. La deuxième vague de la pandémie rend ces écarts entre industries, régions et niveaux de formation encore plus grands, rapporte l’Institut du Québec.
« Le nombre de secteurs toujours gravement affectés par la crise va en diminuant, mais ceux qui le restent le sont de plus en plus durement », a résumé dans un entretien téléphonique au Devoir Mia Homsy, directrice générale de l’Institut du Québec (IdQ), après le dévoilement, mercredi, d’un rapport parlant d’une reprise « à deux vitesses » sur le marché du travail au Québec.
Alors qu’en septembre 7 des 16 grands secteurs industriels québécois accusaient encore un important manque à gagner en matière d’emplois par rapport à leur niveau d’avant la crise, ce nombre n’était plus que de 3 sur 16 le mois suivant. Mais loin de continuer à améliorer leur sort, le secteur de l’hébergement et de la restauration, celui de l’information, culture et loisirs et celui des « autres services », comme l’entretien et la réparation, ont vu leur nombre total d’emplois se remettre à piquer du nez en même temps que prenait de l’ampleur la deuxième vague de la pandémie de COVID-19.
À lui seul, le secteur de l’hébergement et de la restauration a perdu 42 000 emplois, ou 19 % de ses effectifs totaux, en octobre seulement. Désormais à 69 % du niveau qu’il affichait en février, il compte aujourd’hui
pour près des deux tiers des emplois perdus depuis le début de la crise qui n’ont toujours pas été regagnés. Le secteur de l’information, la culture et les loisirs (84 %) et celui « des autres services » (91 %) font un peu mieux, mais restent loin des secteurs de la fabrication (95 %), du commerce de gros et de détail (101 %) ou encore de l’enseignement (110 %), pour une moyenne générale au Québec de 97 %.
Montréal en tête
Des écarts s’observent également entre la grande région métropolitaine de Montréal et le reste du Québec, note l’IdQ. À Montréal, le nombre d’emplois perdus a presque été complètement effacé (99 %), le nombre total d’emplois étant revenu à 2,21 millions en octobre contre 2,24 millions en février. Ailleurs au Québec, on reste encore à court d’emplois (95 %), avec 2,04 millions d’emplois aujourd’hui contre 2,15 millions avant la pandémie.
Mia Homsy admet avoir du mal à expliquer cet écart pour le moment. Peut-être est-ce dû à une plus forte concentration à Montréal des secteurs les plus dynamiques (santé, éducation, finances), avance-t-elle. Peut-être cela découle-t-il des plus grandes contraintes du marché du travail dans le reste du Québec à cause de la rareté de main-d’oeuvre.
Les travailleurs moins scolarisés et les immigrants continuent également d’accuser du retard par rapport aux autres.
Pour une aide ciblée
Il devient de plus en plus urgent, dans ce contexte, que les gouvernements tiennent compte de ces répercussions inégales de la crise dans l’élaboration de leurs politiques d’aide, estime Mia Homsy. Jusqu’à présent, les programmes (fédéraux) d’aide les plus généreux sont restés relativement généraux, alors que les programmes d’aide plus spécifiques (Québec) se sont révélés relativement « timides ».
« Les secteurs les plus touchés étaient encore loin de s’être remis lorsque la deuxième vague les a frappés, et je ne parle pas de l’usure du temps. Si l’on n’arrive pas rapidement avec des programmes publics d’aide plus ciblés, les dommages risquent d’être très importants. »