Le Devoir

Les cerfs en surnombre à Montréal aussi

La Ville n’a pas pris de décision sur ce qui doit être fait pour protéger les écosystème­s menacés par les cervidés

- ALEXANDRE SHIELDS JEANNE CORRIVEAU

Les problèmes de surpopulat­ion de cerfs de Virginie ne concernent pas que Longueuil. Montréal est aussi aux prises avec des situations similaires dans différents secteurs de l’île, mais pour le moment, la Ville n’a pas pris de décision sur ce qui doit être fait pour tenter de limiter les dégâts que les cervidés font subir à différents écosystème­s.

Dans le parc-nature de Pointe-auxPrairie­s, dans l’est de l’île de Montréal, les cerfs de Virginie font des ravages. « Le broutage du cerf a un impact important sur la structure de la végétation et sur la régénérati­on des forêts. Il y a des espèces végétales des sous-bois qui disparaiss­ent », reconnaît le biologiste Frédéric Bussière, conseiller en aménagemen­t au Service des grands parcs de la Ville de Montréal. Il cite le cas du trille blanc, une espèce jugée vulnérable qui est disparue du parcnature, alors que des plantes envahissan­tes, comme le nerprun, prolifèren­t.

Une population en croissance

Selon les données transmises par la Ville, le cerf de Virginie a été observé pour la première fois en 1997 au parcnature, mais sa population a rapidement augmenté et, lors du dernier inventaire aérien réalisé au cours de l’hiver 2017, 32 cerfs ont été recensés, soit une densité de près de 20 cerfs par kilomètre carré. « On sait que ce sont des densités trop importante­s », reconnaît Frédéric Bussière.

Les prochains inventaire­s de cerfs au parc-nature de Pointe-aux-Prairies sont prévus à l’hiver 2021, mais, selon les sources consultées par Le Devoir, il est déjà acquis qu’une interventi­on devra être menée pour protéger la végétation dans ce parc montréalai­s et ailleurs sur l’île. Les cerfs menacent non seulement la régénérati­on de la végétation, mais aussi les habitats d’autres espèces animales, comme les oiseaux.

La Ville pourrait-elle procéder à un abattage de cerfs comme l’avait envisagé Longueuil ? « Il est trop tôt pour le dire. Il faut analyser la situation pour bien démontrer qu’il y a un problème, soutient Frédéric Bussière. Mieux vaut agir plus tôt que plus tard, mais cette décision ne me revient pas. »

Le cas de Longueuil, qui a provoqué une levée de boucliers de la part des animaliste­s, a démontré que la question est délicate. Réduire la population peut aussi inciter d’autres cerfs à migrer sur le territoire, un élément dont il faut tenir compte, signale M. Bussière.

Dans l’ouest de l’île, les chevreuils sont nombreux aussi. Directeur général du Zoo Ecomuseum situé à SainteAnne-de-Bellevue, David Rodrigue a été en mesure de le constater dans les milieux forestiers où les cerfs ont brouté la végétation sur une hauteur d’environ sept pieds. « C’est certain que ça va demander une réflexion plus profonde et mieux argumentée que celle qui s’est produite la semaine dernière [concernant les cerfs de Longueuil]. La surpopulat­ion est en train de ruiner les écosystème­s en entier », dit-il.

Et les coyotes ?

Frédéric Bussière n’est pas en mesure de dire si les coyotes présents sur l’île de Montréal peuvent avoir un effet régulateur sur la population de chevreuils. « En théorie, le coyote est un prédateur du cerf. Mais ce n’est pas nécessaire­ment un prédateur efficace. Son efficacité va dépendre entre autres des conditions de neige. »

En 2018, de nombreux signalemen­ts avaient été faits sur la présence de coyotes dans les arrondisse­ments d’Ahuntsic-Cartiervil­le et de Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension et des cas de morsure avaient été recensés. Le nombre de signalemen­ts a toutefois chuté de façon importante depuis, indique Frédéric Bussière. « On pense que les signalemen­ts étaient dus à un ou deux animaux qui avaient développé des comporteme­nts anormaux. Mais ils ont disparu des radars. »

Comme la Ville n’a pas fait d’inventaire des coyotes, elle ne peut dire s’ils ont quitté ce secteur ou s’ils sont simplement discrets. « Les densités de coyotes à Montréal ne sont peut-être pas si importante­s », dit-il.

Le broutage du cerf a un impact important sur la structure de la végétation et sur la régénérati­on des forêts. Il y a des espèces végétales des s ous-bois qui disparaiss­ent.

FRÉDÉRIC BUSSIÈRE

 ?? PAUL CHIASSON LA PRESSE CANADIENNE ?? Les cerfs menacent non seulement la régénérati­on de la végétation, mais aussi les habitats d’autres espèces animales, comme les oiseaux. Sur la photo, un cerf de Virginie dans le parc Michel-Chartrand, à Longueuil.
PAUL CHIASSON LA PRESSE CANADIENNE Les cerfs menacent non seulement la régénérati­on de la végétation, mais aussi les habitats d’autres espèces animales, comme les oiseaux. Sur la photo, un cerf de Virginie dans le parc Michel-Chartrand, à Longueuil.

Newspapers in French

Newspapers from Canada