Classique
Perturbée sur le plan de l’édition et de la distribution, l’année 2020 a aussi été marquée par une amplification du décrochage des ventes de disques physiques par rapport au numérique. Cela n’a pas empêché les éditeurs de nous concocter quelques beaux coffrets.
Course contre la montre. Voilà le sentiment dominant à l’approche des Fêtes, alors que tardent à arriver au Canada un certain nombre de coffrets qui pourraient jouer un rôle éminent dans un palmarès 2020, telles l’anthologie publiée par Supraphon en l’honneur du pianiste Ivan Moravec ou diverses parutions Warner, dont
George Szell. Les enregistrements Warner, coffret complément à la légendaire boîte Sony, désormais épuisée.
Cet exemple met le doigt sur une autre mutation amplifiée cette année : le discophile recherchant un titre précis peut avoir intérêt à diversifier ses sources d’approvisionnement, y compris dans d’autres pays, pour profiter de calendriers plus favorables et contourner des retards dans la disponibilité de nombreuses étiquettes.
La bonne étoile ?
Sony Classical nous fournit habituellement le beau gros coffret de l’année. Certains (Georges Szell, Fritz Reiner, Charles Munch) sont devenus des objets de collection désormais indisponibles et hors de prix. On peut encore glaner le Bruno Walter de l’année dernière, qui, pour beaucoup, aura davantage d’attrait musical que le millésime 2020, consacré au violoniste Isaac Stern (1920-2001) à l’occasion du centenaire de sa naissance.
Personnage très influent de la vie musicale américaine de la seconde moitié du XXe siècle, dont le fait d’armes restera d’avoir sauvé Carnegie Hall de la démolition en 1960, Stern n’était pas connu comme le violoniste à l’intonation la plus assurée du métier. Les enregistrements permettent de déguiser cela au mieux. Il reste un son fin, très en situation dans Mozart, qui semble s’assécher un peu avec le temps. Le meilleur se niche dans la simple franchise de la plupart des gravures monophoniques et dans la musique de chambre.
Assurément, la mécanique éditoriale est rigoureuse et bien huilée ; le coffret est très beau, avec un livret impeccable. Attention toutefois : il s’agit des Complete Columbia Analogue Recordings , pirouette habile qui évite des enregistrements numériques tardifs qui n’ajoutent rien à l’aura instrumentale du violoniste, mais dont l’absence nous prive de jalons indispensables de son legs, tel L’arbre
des songes de Dutilleux (1985), dont Stern, le dédicataire, fut l’unique interprète pendant 10 ans. Le legs numérique n’était pas si énorme et ne changeait pas fondamentalement le portrait de l’artiste dans ce coffret qui