Importante éclosion dans la communauté autochtone itinérante à Montréal
Ils avaient été épargnés jusqu’ici. Mais voilà que les personnes autochtones en situation d’itinérance à Montréal sont confrontées à une importante éclosion de COVID, une situation « critique » qui a forcé la Santé publique à fermer trois haltes-chaleur et les organismes à s’organiser pour permettre aux malades de faire une quarantaine en sécurité.
« Nous sommes très, très inquiets, affirme Heather Johnston, directrice générale pour Projets autochtones du Québec (PAQ), un organisme qui offre de l’hébergement pour les personnes autochtones en situation d’itinérance. Beaucoup ont une santé déjà fragile, alors c’est très inquiétant de voir la COVID qui commence à faire des ravages dans la communauté. »
C’est dans une halte-chaleur de Montréal que les premiers cas de
C’est dans une haltechaleur de Montréal que les premiers cas de COVID ont été signalés à la midécembre
COVID ont été signalés à la mi-décembre. « Ce sont des endroits où il est plus difficile de s’assurer que tout le monde respecte la distanciation, surtout à 2 h du matin, dans un contexte où ce sont des gens qui ont des problématiques complexes », affirme Émilie Fortier, qui travaille pour le compte de la mission Old Brewery à l’hôpital Royal Victoria, où se retrouvent les itinérants autochtones infectés. Trois haltes-chaleur ont depuis été fermées, confirme la Santé publique de Montréal.
« Ça s’est propagé comme une traînée de poudre », constate Mme Fortier. « Ce sont des gens qui se promènent d’une ressource à l’autre, qui vont partager des cigarettes, qui se tiennent en communauté, sans compter la difficulté de retrouver les gens », illustre-t-elle.
Lors d’un dépistage massif effectué fin décembre dans les centres d’hébergement de PAQ, 17 personnes sur 27 ont été déclarées positives. « C’est beaucoup ! » constate la directrice, Heather Johnston.
Selon les données compilées par différents organismes, 80 % des personnes itinérantes autochtones testées ces dernières semaines seraient positives. Ce chiffre n’est pas confirmé par la Santé publique de Montréal, qui parle plutôt de « 150 personnes — usagers ou travailleurs — dans des ressources d’hébergement pour personnes itinérantes qui ont testé positif ».
Au maximum de sa capacité
Rapidement, la zone rouge de l’ancien hôpital Royal Victoria, qui permet aux personnes en situation d’itinérance de se placer en quarantaine, s’est retrouvée débordée, au point où les personnes qui recevaient un test positif ne savaient plus où aller, raconte Heather Johnston du PAQ. « On a passé des jours à tourner en rond pour trouver une place parce que le Royal Victoria était plein. »
Jason Champagne, directeur à la Direction du CIUSSS du Centre-Sud-del’île-de-Montréal, « nuance » toutefois ces propos : « À partir du moment où une personne doit s’isoler, si on n’avait plus de places, on l’aurait orientée vers un centre hospitalier. On n’a jamais refusé personne », dit-il.
Mais dans les faits, le Royal Victoria s’est « rapidement ramassé à pleine capacité », constate Émilie Fortier, qui était aux premières loges dans la zone rouge. La communauté s’est mobilisée, ce qui a permis d’ouvrir 25 places supplémentaires, pour un total de 50 chambres en date d’aujourd’hui. Il y a également des places pour ceux qui sont en attente de résultats et ceux qui ont été en contact étroit avec quelqu’un de positif.
Sevrage et méfiance
Sur le terrain, on a rapidement constaté qu’il fallait offrir un environnement mieux adapté à la clientèle autochtone itinérante, qui connaît d’importants problèmes de consommation.
« Il fallait que les gens puissent se confiner sans mettre en danger leur santé physique, note Émilie Fortier. Quelqu’un qui est habitué à un certain niveau de consommation, s’il arrête du jour au lendemain, il y a un risque de sevrage qui peut mener au décès. Et on veut qu’ils soient confortables pour qu’ils restent tout le temps de leur quarantaine. »
Autre problème rencontré en cours de chemin : la méfiance des Autochtones envers les hôpitaux. « Quand on leur dit qu’ils doivent s’isoler dans un hôpital géré par des Blancs, certains refusent parce qu’ils sont traumatisés, constate Heather Johnston de PAQ. C’est pourquoi, même si on fait face à un manque de personnel terrible, on envoie des intervenants travailler au Royal Victoria pour qu’ils puissent voir des visages rassurants. »