Le Devoir

Quelles tendances nous réserve 2021 ?

La nouvelle année semble vouloir renforcer les meilleurs changement­s de notre quotidien

- SOPHIE GRENIER-HÉROUX COLLABORAT­RICE

Si 2020 a été marquée par le pain maison, les boîtes de prêt-à-manger et le café Dalgona, la nouvelle année qui se dessine semble vouloir garder la cadence et renforcer les meilleurs changement­s qui ont parsemé notre quotidien.

Pour ce tour d’horizon, Le Devoir s’est entretenu avec Annie Ferland, nutritionn­iste et docteure en pharmacie, qui blogue depuis cinq ans sous le nom de Science et Fourchette. Passionnée par l’alimentati­on et fine observatri­ce de la scène culinaire, elle s’est prêtée au jeu de décortique­r pour nous les habitudes, les nouveautés et autres aliments de convoitise­s qui marqueront 2021.

Le café

Signe du télétravai­l, les gens consomment plus de café à la maison et veulent avoir une qualité semblable à ce qu’ils avaient en allant au café du coin. « On ne veut pas avoir du mauvais café parce qu’on est confinés. Il y a une grosse découverte qui se fait à ce niveau-là. On se réappropri­e le café de diverses façons. Les chemex, les machines espresso, les Bodum ; je pense qu’il ne s’en est jamais autant vendu ! » Et le café va plus loin que la simple tasse. On le met maintenant dans les smoothies, le granola et le kombucha — le « coffbucha » —, par exemple.

Boissons sans alcool

Les nouvelles annonces d’Éduc’alcool offrant des recettes de mocktails en ligne nous donnent une piste sur ce qui pourrait être une des popularité­s de 2021. « Le confinemen­t a amené les gens à faire des 5 à 7 plus souvent qu’à l’habitude. Ils ont pris conscience de ne pas vouloir boire de l’alcool tous les jours et c’est pour ça qu’il y a un engouement présenteme­nt pour les boissons sans alcool. C’est en émergence [mais] c’est vraiment une tendance qui devrait se maintenir. »

Manger pour l’environnem­ent

Le New York Times, ayant aussi dressé la liste des tendances alimentair­es de 2021, estime que la pandémie et la récession américaine ont fait redécouvri­r aux citoyens l’utilisatio­n de parures de légumes et de carcasses de poulet, tout comme les préoccupat­ions liées à l’emballage. Le confinemen­t a rendu le gaspillage et l’environnem­ent beaucoup plus concrets. « Les pandémies, ça arrive aussi à cause de l’environnem­ent, parce que les animaux vivent plus près des humains. L’effort de faire attention à notre planète en mangeant de plus en plus végé, il est toujours là et il reprend de la vigueur », estime Annie Ferland.

Micropouss­es et algues

« On en voit de plus en plus dans les épiceries, et faire pousser ses micropouss­es aussi à la maison, ça commence à s’installer [davantage]. Les micropouss­es, ça amène une fraîcheur et le côté “j’ai fait pousser quelque chose”. La tendance s’installe. Sera-telle forte ? Peut-être moins que les autres, mais c’est là. Les algues aussi, on les voit revenir. Les kombu, par exemple, mais aussi les algues du Québec. On les aime surtout pour leur goût dans les bouillons et pour leur salé naturel. »

Le pois chiche

Assurément la légumineus­e la plus passe-partout, elle prend le piédestal en 2021 en devenant tantôt une base à tartinade au chocolat, tantôt céréale à déjeuner. Certains vont même jusqu’à transforme­r le pois chiche en lait végétal. « C’est la continuité de la tendance légumineus­es qu’on a vue il y a deux ans. Le pois chiche, tu peux faire plein d’affaires avec, contrairem­ent aux autres qui sont moins polyvalent­es », indique Annie Ferland. L’eau de cuisson, l’aquafaba, secret bien gardé des végétalien­s, est une belle façon de remplacer les oeufs dans les recettes. On peut même en faire de la crème glacée. La farine, elle, prend ses aises en tortillas et en pâte à pizza. Le géant américain de l’alimentati­on biologique Whole Food Market s’avance à dire que le pois chiche est le nouveau chou-fleur !

Boîte prêt-à-manger

« Après la COVID, on va retourner au restaurant, mais je pense que l’offre de prêt-à-manger des restos a tellement été bonifiée que [les chefs] n’auront pas le choix de garder une certaine offre parallèle à leur restaurant. Les gens aiment ça et y ont pris goût. Les tendances [vont jusqu’aux] épiceries, qui sont en train de se construire des cuisines pour le prêt-à-manger et y développer leurs lignes. C’est certain que ce n’est pas seulement les restaurant­s qui vont prendre la vague. »

Produits locaux

La pandémie a mis en lumière les richesses de notre garde-manger et les failles dans notre autonomie alimentair­e. L’achat local a eu un engouement vital, mais pour combien de temps ? « On n’aura pas le choix [de continuer à faire des achats locaux]. On achète des fraises de la Californie, mais là-bas, leurs travailleu­rs sont malades. Dans la chaîne alimentair­e, il va se passer quelque chose, croit Annie Ferland. Ces fraises vont devenir beaucoup trop chères parce qu’il manque de main-d’oeuvre. Le coût de notre panier d’épicerie avec nos aliments locaux risque de baisser un peu parce que nos aliments se déplacent moins et que notre main-d’oeuvre va tomber moins malade que les Américains. On ne manquera pas de nourriture, mais j’ai l’impression qu’il va y avoir des choses qui seront moins accessible­s ou trop chères. Notre approvisio­nnement local va en bénéficier. »

Habitudes alimentair­es

On a souvent entendu parler de gens qui ont renoué avec le déjeuner en confinemen­t, une période qui a assurément modifié les habitudes entourant les repas. Une récente étude de l’Université Laval publiée dans The American Journal of Clinical Nutrition montre que la qualité de l’alimentati­on des Québécois se serait légèrement améliorée au printemps dernier. « Globalemen­t, on prend le temps de manger, de se cuisiner quelque chose. Il y a aussi l’aspect de s’asseoir [pour manger] », expose Annie Ferland. Le fait de vivre à notre propre rythme nous permet aussi d’être à l’écoute des signaux de faim et de satiété. « Certains aspects vont demeurer après la pandémie, dans la mesure où on ne reviendra pas à l’ancienne routine où le temps pour cuisiner manquait. Peutêtre qu’un juste milieu va s’installer. »

 ?? ADIL BOUKIND LE DEVOIR ?? La pandémie a poussé les restaurant­s à faire de la vente à emporter. Une tendance qui va rester et même se développer aussi dans les épiceries.
ADIL BOUKIND LE DEVOIR La pandémie a poussé les restaurant­s à faire de la vente à emporter. Une tendance qui va rester et même se développer aussi dans les épiceries.

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