Le Devoir

La sentence d’Ugo Fredette déçoit les proches de Véronique Barbe

Le meurtier passera au moins 25 ans en prison

- JESSICA NADEAU

« Prison à vie… Prison à vie… » Daniel Barbe répète ces mots au bout du fil. Le frère de Véronique Barbe, décédée après avoir reçu 17 coups de couteau dans sa maison à Saint-Eustache, ne sait pas trop quoi penser de la sentence de l’assassin Ugo Fredette rendue par la cour vendredi.

Pour lui, ce n’est pas tellement la condamnati­on à vie qui est significat­ive, mais les 25 ans au bout desquels Ugo Fredette pourra demander une libération conditionn­elle.

Or, pour M. Barbe, ces 25 ans représente­nt la peine pour le meurtre de sa soeur. Mais qu’en est-il pour Yvon Lacasse, l’autre victime, qu’Ugo Fredette a rencontré dans une station-service et assassiné pendant qu’il prenait la fuite ?

« Il va faire 25 ans ferme [avant de pouvoir demander une libération conditionn­elle], mais malgré toutes les explicatio­ns [qu’on nous a données], on est vraiment déçus. Nous, on a eu nos 25 ans pour ma soeur, mais on aurait aimé avoir plus, pour [que soit reconnu] l’acte qu’il a fait sur la famille Lacasse. C’est dur pour ça. »

C’est que la Couronne demandait au tribunal d’imposer à Ugo Fredette un minimum de 50 ans derrière les barreaux, affirmant qu’il s’agissait de deux meurtres séparés. Sinon, cela signifie qu’il n’y a aucune conséquenc­e à commettre un second meurtre — pas même une heure d’incarcérat­ion de plus, avait affirmé cet été le procureur de la Couronne, Me Steve Baribeau.

La juge Myriam Lachance, de la Cour supérieure, a plutôt décidé d’imposer une période de 25 ans. Pour arriver à cette conclusion, elle s’est basée sur le jugement de la Cour d’appel rendu en novembre dernier dans le dossier d’Alexandre Bissonnett­e, auteur de la tuerie à la mosquée de Québec. Ce jugement indiquait qu’il ne peut y avoir de cumul de périodes de 25 ans.

Aujourd’hui, Daniel Barbe affirme se sentir « vide ». Il n’a même pas la satisfacti­on de se dire que c’est enfin terminé, car Ugo Fredette a déjà porté en appel le verdict de culpabilit­é et réclame un nouveau procès. « Il n’y a rien de fini, soupire Daniel Barbe. Si l’appel est accepté, il faudra tout refaire le procès. On va retourner au tribunal et revivre ça… »

Ça. Toute une gamme d’émotions, qui remontent encore à la surface aujourd’hui. « Ça a été dur émotionnel­lement, et ça l’est encore. C’est normal, je suis le plus vieux, ma soeur était le bébé de la famille. Ça n’a juste pas de bon sens. »

Ça. Ce sont aussi des choses qu’il a apprises sur sa soeur et sur sa relation tumultueus­e avec celui qui aura été son conjoint pendant plusieurs années. « J’ai appris beaucoup d’affaires dont je n’étais pas au courant, raconte Daniel Barbe. Tous les messages textes qu’il lui envoyait, pis sa folie qui avait commencé. Moi, je n’avais pas eu cette informatio­n-là, ce sont des choses que j’ai apprises en cours de route. J’ai trouvé ça dur. »

Mais il en savait tout de même assez pour avoir déjà parlé à celui qui est désormais derrière les barreaux et pour avoir demandé à sa soeur de réfléchir à sa relation. « On savait qu’il était fou un peu, mais pas tant que ça. J’étais inquiet, mais à moitié. Je ne pensais jamais qu’il irait jusque-là. C’est effrayant, ça n’a pas de bon sens. »

Sa soeur est morte, son assassin se trouve derrière les barreaux. Et l’homme est encore profondéme­nt troublé, tant par ce qui s’est passé que par l’actualité, qui semble se répéter. La violence conjugale ? « Je ne sais pas quoi dire, ça ne devrait même pas exister. Il y a tellement de drames avec des enfants et des femmes ces temps-ci, c’est effrayant… Je ne sais pas, je ne sais pas ce qui se passe avec la société. Ça ne s’explique pas. Je ne comprends pas. Vraiment. »

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