Le Devoir

L’illusion d’une Amérique « post-raciale »

- Janie Dussault Étudiante à la maîtrise en études politiques appliquées, Université de Sherbrooke

Les événements du 6 janvier dernier sont le résultat d’un pays dirigé par un président franchemen­t raciste, à l’ère des médias sociaux et dans un contexte de hautes tensions raciales qui ont récemment resurgi dans la population américaine. Bien que la suprématie blanche soit intimement liée à l’histoire du pays, jamais elle ne fut autant et formelleme­nt valorisée et encouragée par un président depuis l’abolition de l’esclavage en 1865.

Une fois de plus, nous avons été témoin de la tolérance et même de l’appui politique dont bénéficie l’extrême droite nationalis­te identitair­e américaine de la part du président américain, contrairem­ent aux manifestan­ts portant le mouvement Black Lives Matter (BLM).

Alors que Donald Trump parle de foules violentes et de criminels déferlant dans les rues pour décrire les manifestat­ions qui dénonçaien­t les bavures policières envers la communauté afro-américaine en juin dernier, il s’adresse aux suprémacis­tes blancs, assaillant le Capitole, ainsi : « We love you, you’re very special. » Comment la présidence des États-Unis a-t-elle pu autant déraper ?

L’un des facteurs explicatif­s est qu’une majorité de la population blanche américaine croit vivre dans une société « post-raciale », correspond­ant à une Amérique où la discrimina­tion

Donald Trump […] agit comme un catalyseur qui vient jeter de l’huile sur un feu déjà bien entamé

raciale est vraisembla­blement chose du passé. Cette conception fausse de la société américaine s’explique en partie par les succès individuel­s de personnes noires telles qu’Oprah Winfrey et l’ancien président Barack Obama.

Cette perception d’une Amérique « post-raciale » ne représente en rien la réalité de la société américaine. Malgré l’applicatio­n d’un cadre législatif dans les années 1960 afin de condamner le racisme, l’État américain a indéniable­ment échoué à enrayer l’inégalité entre la population afro-américaine et la population blanche. Le professeur Michael Higginboth­am de l’Université de Baltimore affirme que l’applicatio­n des lois antidiscri­minatoires est à la fois inégale, incohérent­e et faible, laissant une majeure partie de la population afroaméric­aine dans des conditions matérielle­s, sociales et économique­s difficiles.

La récente montée de l’extrême droite blanche identitair­e chez nos voisins du Sud est apparue au lendemain de l’élection historique de Barack Obama en 2008. Ce phénomène s’explique par plusieurs facteurs, mais il coïncide aussi avec l’avènement nouveau des médias sociaux et leur usage quotidien sur les appareils mobiles. Les plateforme­s telles que Facebook et Twitter permettent

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