Le Bloc accusé de propager des rumeurs sur le nouveau ministre Alghabra
Le parti a laissé entendre que le politicien avait des penchants islamistes
Le nouveau ministre fédéral des Transports, Omar Alghabra, somme le Bloc québécois de se rétracter après avoir laissé entendre qu’il avait des penchants islamistes. Ce n’est pas la première fois que le député torontois fait l’objet d’une allégation du genre, mais il estime que le Bloc s’adonne à un « jeu dangereux ».
Dans un communiqué de presse commentant le remaniement ministériel survenu plus tôt cette semaine, le Bloc québécois a écrit mercredi que « le chef bloquiste refuse d’accuser qui que ce soit », mais enchaîne néanmoins en affirmant que « des questions se posent sur la proximité du nouveau ministre des Transports, Omar Alghabra, avec le mouvement islamique politique, dont il a été un dirigeant pendant plusieurs années ».
En entrevue téléphonique, le porteparole du parti, Julien Coulombe Bonnafous, affirme qu’il ne fait que poser une question. « On se demande : y a-t-il un malaise à avoir ou il n’y a pas lieu d’en avoir ? » Même s’il dit qu’il n’y a probablement pas lieu de s’inquiéter, il ne voit pas de problème à lancer ce pavé dans la mare.
Omar Alghabra a dirigé en 2004 et 2005 la Fédération canado-arabe (FCA). En 2009, le gouvernement de Stephen Harper a résilié ses deux contrats pluriannuels avec la FCA, d’une valeur de 2,6 millions de dollars, en vertu desquels l’organisme prodiguait des cours d’anglais aux nouveaux arrivants. Cette décision avait créé tout un émoi. Plusieurs accusaient les conservateurs, et plus spécifiquement le ministre Jason Kenney, d’avoir voulu plaire au lobby pro-Israël, qui en avait contre les positions pro-palestiniennes de la FCA.
La coupure a été entérinée en Cour fédérale, puis en Cour fédérale d’appel six ans plus tard, mais seulement parce que le tribunal a tranché qu’Ottawa avait suivi le protocole avant de prendre sa décision. Il n’a pas dit que le gouvernement avait raison d’accuser la FCA de complaisance envers le terrorisme islamique : il a plutôt dit que le gouvernement était en droit d’arriver à cette conclusion. Au moment où la coupure était survenue, le président de la FCA, Khaled Mouammar, était d’ailleurs… chrétien.
Une autre accusation qui circule à propos de M. Alghabra est qu’il était d’accord avec le gouvernement ontarien en 2004 pour permettre l’instauration de tribunaux islamiques pour trancher les litiges familiaux. Son attachée de presse affirme qu’il s’agit là d’accusations sans fondement propagées par Rebel News. « Il n’a jamais été en faveur de la charia ni des tribunaux islamiques », assure Amy Butcher.
Déception
Dans un communiqué, le ministre Alghabra s’est déclaré « déçu des propos du Bloc québécois qui tentent de créer des divisions pour de simples gains politique ». Il dit s’attendre « à mieux » du parti et lui demande « de reconsidérer cette insinuation dangereuse et nuisible ». « Nous savons à quoi peut mener une telle désinformation. »
M. Alghabra, qui est âgé de 51 ans, affirme s’être « habitué à faire face à des soupçons et à des attaques sans fondement. Il n’est pas rare que des Canadiens soient confrontés à de tels soupçons en raison de leurs origines et de leur identité. »
Né de parents syriens qui avaient déménagé en Arabie saoudite pour des raisons professionnelles, M. Alghabra est arrivé au Canada à l’âge de 19 ans. En 2018, la sénatrice conservatrice Denise Batters s’était demandé sur Twitter si le lieu de naissance de M. Alghabra expliquait pourquoi il ne s’était pas montré plus critique de l’Arabie saoudite, qui était alors en froid diplomatique avec le Canada. Mme Batters s’était fait rabrouer, même par des conservateurs. Elle s’était excusée, puis avait effacé son gazouillis.
M. Alghabra a été élu à la Chambre des communes en 2006 et en 2008, puis a été battu lors des deux élections subséquentes et a fait un retour au Parlement en 2015. Il était le secrétaire parlementaire de Justin Trudeau depuis 2019 au moment de sa nomination au cabinet.
M. Alghabra, qui est âgé de 51 ans, affirme s’être « habitué à faire face à des soupçons et à des attaques sans fondement »