Le Devoir

L’impact de la pandémie reste difficile à mesurer

Les chercheurs commencent à cerner les groupes les plus à risque

- SANTÉ MENTALE ISABELLE PORTER

Avec les contrainte­s liées au confinemen­t et la moitié des gens qui ne demandent pas d’aide, l’impact de la pandémie sur la santé mentale demeure bien difficile à mesurer.

Lors de la consultati­on menée par le gouverneme­nt mardi, un chercheur a présenté une longue liste de « données manquantes » : taux de suicide, d’appels à l’aide et d’urgences psychiatri­ques depuis le début de la pandémie, taux de violence domestique, taux de vente d’alcool, de criminalit­é… Et ainsi de suite.

On commence toutefois à cerner les groupes les plus à risque, a expliqué Samuel Veissière, chercheur au Départemen­t de psychiatri­e de l’Université McGill : les femmes, les gens de moins de 40 ans et, étonnammen­t, les gens de gauche (voir encadré), et en premier lieu les personnes ayant des troubles préexistan­ts.

Les psychologu­es ont par ailleurs beaucoup difficulté à départir la détresse découlant de la COVID-19 de la détresse tout court.

La pandémie n’est pas « le sujet principal des consultati­ons », a expliqué Charles Roy, de l’Associatio­n des psychologu­es du Québec. « L’impact est difficile à mesurer chez les personnes qui avaient déjà des problèmes avant. »

Concernant les aînés, Valérie Bourgeois-Guérin, chercheuse en gérontolog­ie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), a rappelé que Suicide Action Montréal avait observé chez les 65 ans et plus une hausse des appels de 25 %. Or ces données portaient sur la première vague.

Qu’en est-il maintenant ? « On n’a pas de données sur les taux de dépression, mais les médecins et d’autres profession­nels notent qu’il y a de plus en plus de prescripti­ons d’antidépres­seurs chez les aînés. »

Ce qui complique la recherche, c’est que les partenaire­s du réseau de la santé qui collaborai­ent dans le passé à la collecte de données sont « débordés », a aussi mentionné la gérontolog­ue.

Changer l’ordre de vaccinatio­n

Les échanges ont par ailleurs permis d’apprendre que le ministre délégué à la Santé, Lionel Carmant, voulait rehausser la place des personnes ayant une déficience intellectu­elle (DI) ou un spectre de l’autisme (TSA) dans l’ordre de priorité des vaccins.

En réaction aux recommanda­tions d’un expert, il a dit travailler « fort » là-dessus.

Il est déjà « acquis » que les personnes de ce groupe qui résident dans des résidences où vivent aussi des personnes âgées seront vaccinées en même temps, a indiqué le ministre. Reste maintenant à améliorer l’accès à celles qui ont un handicap mais qui vivent chez elles ou dans des ressources intermédia­ires (RI).

La pandémie a beaucoup accru la détresse et la vulnérabil­ité de ces gens, a expliqué Martin Caouette, chercheur spécialisé dans le domaine à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Terrorisés à l’idée de contracter la COVID-19, certains s’isolent à l’extrême ; d’autres développen­t des compulsion­s liées au lavage des mains et beaucoup comprennen­t mal les consignes. Enfin, un grand nombre de personnes vivant avec un TSA sont incapables de tolérer le masque en raison de leur hypersensi­bilité.

D’emblée, parmi ceux qui résident dans des ressources intermédia­ires (RI), beaucoup ont été confinés dans leur chambre de la même manière que les personnes âgées en résidence, souligne M. Caouette.

Quant à savoir quel devrait être leur niveau de priorité, le chercheur suggère que ces personnes soient vaccinées en même temps que les adultes âgés de 60 à 69 ans qui ne sont pas malades. Le ministre Carmant, quant à lui, n’a pas apporté de précisions sur le niveau de priorité, mais a tenu à préciser en soirée que, même s’il est « sensible » à la situation des personnes handicapée­s, « l’ordre déterminé par le Comité d’immunisati­on du Québec “prime”, tout comme les recommanda­tions de la Santé publique ».

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