Le Devoir

L’Arizona entre hécatombe et inaction

La contaminat­ion à la COVID-19 explose dans cet État post-républicai­n qui ne compte désormais que sur la vaccinatio­n pour s’en sortir

- CORONAVIRU­S FABIEN DEGLISE À PHOENIX

Les affaires vont très bien pour Al Asta, propriétai­re du salon funéraire Whitney & Murphy à Phoenix, en Arizona. Mais il se serait bien passé de ce succès. Dans les circonstan­ces.

« La pression est très forte sur notre salon depuis octobre dernier, comme sur tous les salons funéraires aux États-Unis d’ailleurs », laisse tomber fatalement l’homme, rencontré entre deux cérémonies dimanche matin, dans son établissem­ent de l’est de la ville. « Depuis le début de janvier, nous avons eu deux fois plus de funéraille­s que durant la même période l’année dernière. Et la tendance est loin d’être à la baisse. Le coronaviru­s est un virus mortel. Mais il semble que l’on n’en ait pas pris pleinement conscience encore, ici. »

Dimanche, l’Arizona est passé au premier rang des États américains pour la résurgence des cas d’infection, la plus élevée au pays durant les sept derniers jours, selon les plus récentes données des Centers for Disease Control and Prevention (CDC). Le taux de contaminat­ion y était de 117 cas détectés pour 100 000 habitants, contre 66,8 cas à l’échelle du pays.

La conséquenc­e létale de la maladie porte aussi à des sommets, avec un total de 12 238 décès enregistré­s ici depuis le début de la pandémie, soit 169 morts pour 100 000 habitants. En comparaiso­n, ce taux est à 108 au Québec, où un total de 253 000 cas d’infection ont été détectés depuis le début de la crise sanitaire. C’est trois fois moins qu’en Arizona, un État de 7 millions d’habitants.

« La mortalité est anormaleme­nt élevée ici, constate Al Asta. De 35 % à 40 % des funéraille­s en plus que nous organisons sont celles de personnes qui ont été atteintes par le virus. » Dimanche, un homme de 63 ans en faisait partie. La veille, ils étaient six. Il y a deux semaines, le Banner University Médical Center de Phoenix a dû installer deux morgues

sa libération. Ces manifestat­ions non autorisées ont donné lieu à des arrestatio­ns, parfois brutales, et des affronteme­nts entre les protestata­ires et la police.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a de son côté minimisé la portée des manifestat­ions. « Peu de gens sont sortis, beaucoup de gens votent pour [le président russe, Vladimir] Poutine », réélu avec plus de 76 % des voix en 2018, a-t-il souligné, en dénonçant une tentative d’« ébranler la situation » dans le pays.

Il a ainsi critiqué la représenta­tion diplomatiq­ue américaine qui avait appelé sur son site les Américains à ne pas se rendre à ces rassemblem­ents samedi, tout en précisant les lieux où ils se déroulaien­t. Un geste, déjà interprété par la diplomatie russe comme une tentative de promouvoir une « marche contre le Kremlin », que M. Peskov a qualifié dimanche d’« ingérence absolue dans nos affaires intérieure­s ».

Selon une porte-parole de l’ambassade américaine à Moscou, de tels avertissem­ents sont diffusés aux citoyens américains dans tous les pays à travers le monde. « C’est une pratique de routine », a-t-elle affirmé à l’AFP. Les États-Unis avaient condamné « fermement l’emploi de méthodes brutales contre les manifestan­ts et les journalist­es » lors des manifestat­ions de samedi.

Violences condamnées

L’Union européenne a également condamné la répression des manifestat­ions en Russie, alors qu’Amnesty

Internatio­nal a accusé la police d’avoir « battu sans discerneme­nt et arrêté arbitraire­ment » des manifestan­ts. Le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a déclaré dimanche que la vague d’arrestatio­ns la veille en Russie constituai­t une « dérive autoritair­e » et une atteinte « insupporta­ble » à l’État de droit.

Pour sa part, le Comité d’enquête russe, chargé des principale­s investigat­ions criminelle­s dans le pays, a annoncé samedi soir l’ouverture d’une enquête sur des violences contre les forces de l’ordre lors des manifestat­ions pro-Navalny. Le parquet de SaintPéter­sbourg a indiqué, lui, enquêter non seulement sur des violences envers la police, mais aussi sur celles « de la part des forces chargées de faire respecter la loi ».

Le parquet a publié son communiqué samedi soir après la diffusion par les médias locaux d’une vidéo montrant une femme tomber au sol après avoir été frappée à coups de pied par des policiers antiémeute­s. Identifiée comme Margarita Ioudina, elle a été hospitalis­ée samedi soir, blessée à la tête et « dans un état grave », selon un représenta­nt de l’hôpital Djanelidze

à Saint-Pétersbour­g. Dimanche soir, Mme Ioudina « a quitté l’hôpital », a précisé à l’AFP la porte-parole du comité municipal pour la Santé, Olga Riabinina.

Nouvelles protestati­ons en vue

Placé en détention provisoire et visé par plusieurs procédures judiciaire­s, Alexeï Navalny a été appréhendé le 17 janvier, dès son retour d’Allemagne, après cinq mois de convalesce­nce à la suite d’un empoisonne­ment présumé dont il accuse le Kremlin.

Son appel à manifester a été accompagné d’une enquête vidéo, visionnée plus de 70 millions de fois depuis mardi sur YouTube, dans laquelle il accuse Vladimir Poutine de s’être fait bâtir pour un milliard d’euros (1,55 milliard de dollars canadiens) une fastueuse demeure privée au bord de la mer Noire. Les autorités rejettent l’ensemble des accusation­s d’empoisonne­ment et de corruption.

Dimanche, Leonid Volkov, un membre de l’équipe de M. Navalny, a déclaré à l’AFP être « très impression­né et inspiré » par les résultats des manifestat­ions. Selon lui, de nouvelles protestati­ons devraient avoir lieu en Russie « le week-end prochain ».

Le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a déclaré dimanche que la vague d’arrestatio­ns la veille en Russie constituai­t une « dérive autoritair­e » et une atteinte « insupporta­ble » à l’État de droit

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ROSS D. FRANKLIN ASSOCIATED PRESS Sur le grand stationnem­ent du State Farm Stadium de Phoenix, la campagne de vaccinatio­n à l’auto battait son plein dimanche.
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NATALIA KOLESNIKOV­A AGENCE FRANCE-PRESSE Les manifestat­ions en soutien à Alexeï Navalny ont réuni samedi des dizaines de milliers de personnes.

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