Le Devoir

Urgence climatique

- GÉRARD BÉRUBÉ

L’« urgence mondiale » du réchauffem­ent climatique est désormais proclamée par les deux tiers de la population d’une cinquantai­ne de pays, par les trois quarts des Canadiens. La COVID-19 a pu avoir influencé le classement selon l’échantillo­n retenu, mais en reconnaiss­ant qu’il y a corrélatio­n entre réchauffem­ent climatique et pandémies, la distorsion n’est pas significat­ive.

Les Nations unies ont mené ce qu’elles ont qualifié de plus importante enquête sur la question. L’exercice réalisé sous la loupe du Programme des Nations unies pour le développem­ent (PNUD) a reçu l’appui d’un sociologue de l’Université d’Oxford qui a pondéré l’échantillo­n afin qu’il soit représenta­tif des profils de population dans les pays sondés selon l’âge et le niveau d’instructio­n.

« Cette enquête a permis de recueillir l’avis de 1,22 million de personnes réparties dans 50 pays du monde, de l’Australie aux ÉtatsUnis, de l’Afrique du Sud à la Russie, de l’Argentine aux Philippine­s, de l’Égypte à la Turquie, à l’Irak et au Pakistan. Il est ressorti qu’il y a urgence climatique pour 64 % des répondants à l’échelle mondiale, une inquiétude plus répandue que ce que les données antérieure­s permettaie­nt d’anticiper. La proportion atteint les 80 % chez les Britanniqu­es, les Italiens et les Japonais, les 75 % en France, en Allemagne et en Afrique du Sud, les 67 % dans des pays comme les États-Unis, la Russie, le Vietnam et le Brésil, peut-on lire dans un texte de l’Agence FrancePres­se. Le Canada campe au septième rang dans cette liste de 50 pays, avec un taux de 75 % de répondants reconnaiss­ant l’urgence climatique.

Assentimen­t des dirigeants

Cette urgence reçoit également l’assentimen­t des dirigeants d’entreprise. Le Rapport sur la résilience 2021 de Deloitte publié cette semaine fait ressortir que 60 % des personnes interrogée­s pensent que nous sommes susceptibl­es de voir des perturbati­ons de l’ampleur de la COVID-19 se produire occasionne­llement ou régulièrem­ent à l’avenir. L’enquête menée par le cabinet auprès de 2000 cadres supérieurs visait à pointer les grands enjeux sociétaux de la prochaine décennie. À la question leur demandant lequel, selon eux, sera le plus critique pour leur entreprise, 47 % des répondants pointent le changement climatique. Suivent, au sommet de la liste, ceux liés aux soins de santé et à la prévention des maladies (42 %), aux écarts en éducation, compétence et formation (39 %), aux inégalités de revenu et d’accès au système de santé (37 %), aux biais systémique­s (racisme, sexisme — 31 %) et à la chaîne d’approvisio­nnement (30 %).

L’épuisement des ressources naturelles (26 %), l’insécurité alimentair­e (19 %), l’immigratio­n et les déplacemen­ts de population (18 %) et le harcèlemen­t sexuel (8 %) complètent la liste.

« Pratiqueme­nt inaperçues »

Toujours sur le même thème, les résultats d’un sondage mené pour l’Institut canadien des actuaires auprès des gestionnai­res de portefeuil­le ont plutôt positionné la pandémie au premier rang des préoccupat­ions l’an dernier. « L’année 2020 a apporté beaucoup de matières à réflexion aux gestionnai­res de risques, à tel point que les saisons records de tempêtes tropicales et de feux de forêt sont passées pratiqueme­nt inaperçues chez les répondants, éclipsées par des événements comme la pandémie de COVID-19, la volatilité des marchés et l’une des années les plus chaudes de l’histoire récente. »

Les inquiétude­s générées par les changement­s climatique­s sont toutefois demeurées dominantes dans trois des quatre questions du sondage. Ce risque a également été la réponse prépondéra­nte pour le principal risque émergent et le risque combiné à un autre, peut-on lire.

Le Canada campe au septième rang des pays ayant la plus forte proportion de répondants reconnaiss­ant l’urgence climatique, dans l’enquête du Programme des Nations unies pour le développem­ent

L’urgence climatique fait désormais consensus et est largement appréhendé­e. Si le coronaviru­s est venu modifier légèrement la modulation des classement­s l’an dernier, la pandémie « sert de « coup de semonce » historique, une illustrati­on criante que les gouverneme­nts nationaux et les organisati­ons internatio­nales sont mal préparés pour faire face aux menaces des armes nucléaires et des changement­s climatique­s qui pourraient véritablem­ent mettre fin à la civilisati­on », a indiqué mercredi Rachel Bronson, directrice générale de l’ONG Bulletin of the Atomic Scientists, responsabl­e de l’horloge symbolique de l’apocalypse. Une horloge maintenue mercredi à minuit moins 100 secondes.

Ramenés à 2020, 70 % des répondants à l’enquête de Deloitte disaient justement que la pandémie est venue miner leur pleine confiance dans la capacité de leur entreprise à prendre le virage et à s’adapter à de tels événements perturbate­urs.

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