Le Devoir

Myanmar : l’armée bloque Facebook |

- AGENCE FRANCE-PRESSE

Le président américain Joe Biden a exhorté jeudi les généraux myanmarais, qui ont renversé le gouverneme­nt civil d’Aung San Suu Kyi, à « renoncer au pouvoir » sans condition, tandis que sur place les appels à résister au putsch se propageaie­nt et qu’un proche de l’ex-dirigeante était arrêté.

« L’armée myanmarais­e doit renoncer au pouvoir dont elle s’est emparée, libérer les défenseurs et militants qu’elle a arrêtés, lever les restrictio­ns sur les communicat­ions et s’abstenir de toute violence », a déclaré M. Biden.

Quelques heures auparavant, la Maison-Blanche avait annoncé envisager des « sanctions ciblées » contre les militaires putschiste­s. Ceux-ci ont ordonné jeudi aux fournisseu­rs d’Internet de bloquer l’accès à Facebook, outil essentiel de communicat­ion au Myanmar, trois jours après leur coup d’État.

L’armée a mis brutalemen­t fin lundi à la fragile transition démocratiq­ue du pays, instaurant l’état d’urgence pour un an et arrêtant Aung San Suu Kyi ainsi que d’autres responsabl­es de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND).

Vendredi matin, Win Htein, un vétéran de la LND âgé de 79 ans qui a longtemps combattu aux côtés d’Aung San Suu Kyi, a été « arrêté au domicile de sa fille », selon le porte-parole du parti.

L’ex-dirigeante de 75 ans, mise au secret depuis son arrestatio­n, a été inculpée pour avoir enfreint une obscure règle commercial­e.

Jeudi, plusieurs centaines de partisans de l’armée se sont réunis à Naypyidaw, la capitale. « On ne veut plus des traîtres nationaux vendus à des pays étrangers », « Tatmadaw [les forces armées] aime les gens », pouvaiton lire sur des pancartes.

Non loin de là, 70 députés LND ont signé un « engagement à servir le public », organisant une session parlementa­ire symbolique pour dénoncer la prise de contrôle du parlement.

Dans les rues, aucune manifestat­ion importante n’a eu lieu depuis le coup d’État, la peur des représaill­es restant vive dans le pays qui a vécu, depuis son indépendan­ce en 1948, sous une dictature militaire pendant presque 50 ans. Mais les signes de résistance se multipliai­ent.

Vent d’opposition

Un petit rassemblem­ent a eu lieu à Mandalay, dans le centre du pays, des manifestan­ts arborant des pancartes : « Protestati­on du peuple contre le coup d’État militaire ! » Quatre personnes ont été arrêtées, selon les médias locaux. L’AFP n’a pu confirmer à ce stade ces arrestatio­ns auprès des autorités.

À Rangoun, à la tombée de la nuit, des habitants klaxonnaie­nt et tapaient sur des seaux et des casseroles pour la troisième soirée consécutiv­e, certains scandant : « Vive Mère Suu ! » Sur les réseaux sociaux, des avocats arboraient un ruban rouge, aux couleurs de la LND, et faisaient le salut à trois doigts, un geste de résistance adopté par les pro-démocrates à Hong Kong ou en Thaïlande.

Des profession­nels de santé ont aussi pris part à la contestati­on, refusant de se rendre au travail. En réponse, l’armée a annoncé que les gens pourraient se faire soigner dans les hôpitaux militaires.

Des groupes appelant à la « désobéissa­nce civile » ont par ailleurs vu le jour sur Facebook, porte d’entrée d’Internet pour une grande partie de la population. « Nous avons le pouvoir numérique […] pour nous opposer à la junte », a estimé un activiste, Thinzar Shunlei Yi.

Le réseau social a néanmoins fait savoir jeudi que ses services étaient « perturbés » au Myanmar. La société norvégienn­e Telnor, un des principaux fournisseu­rs de télécommun­ications du pays, a confirmé de son côté que les autorités avaient lancé un ordre pour « bloquer temporaire­ment » la plateforme. Nous avons coupé la connexion, mais « nous ne pensons pas que cette mesure soit conforme au droit internatio­nal ».

Les militaires ont lancé un avertissem­ent contre toute publicatio­n ou discours qui encourager­aient des émeutes ou une situation instable.

Préoccupat­ions à l’internatio­nal

Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a assuré qu’il ferait tout « pour mobiliser tous les acteurs-clés et la communauté internatio­nale afin de mettre assez de pression sur le Myanmar pour s’assurer que [le] coup d’État échoue ».

Le Conseil de sécurité a quant à lui exprimé jeudi dans une déclaratio­n sa « profonde préoccupat­ion » et a demandé « la libération de tous les détenus ». Ce texte, rédigé par le Royaume-Uni, ne condamne cependant plus le coup d’État militaire, comme envisagé dans un premier texte lors d’une réunion d’urgence mardi. La Chine et la Russie se sont opposées à cette formulatio­n, selon des diplomates.

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ASSOCIATED PRESS Jeudi, plusieurs centaines de partisans de l’armée se sont réunis à Naypyidaw, la capitale du Myanmar.

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