Récupérer, consigner, recycler : la boucle est-elle bouclée ?
La collègue Manon Cornellier citait récemment en ces pages les propos de Daniel Normandin, expert en économie circulaire au CERIEC : « Le recyclage, c’est quand vous avez épuisé les autres méthodes : l’écoconception, l’intensification de l’usage, la réutilisation, la revalorisation de la matière, la prolongation de la vie utile grâce à la récupération ou au reconditionnement. »
En d’autres mots, et pour ce qui nous intéresse ici, le vigneron met le vin en bouteille, nous le buvons et lui retournons la bouteille, qu’il remplit de nouveau et que nous buvons encore et… La boucle idéale, quoi ! Mais est-elle vraiment bouclée, cette boucle, en ce début de 2021 ? Non.
Nous échouons encore à récupérer, à consigner et à recycler, comme en témoigne la situation actuelle, même si des progrès sont manifestes, mais il reste toujours dans les cartons des ambitions à voir le jour. Un coup d’oeil.
Politique environnementale
La SAQ se dote en 1988 d’une première politique environnementale soutenant l’implantation de la collecte sélective. Près de 35 ans plus tard, et comme le souligne la société d’État sur son site, « nous convenons que malgré tous les efforts consentis et un taux de récupération de plus de 85 %, les résultats ne sont pas au rendez-vous ».
Sur le plan physique, c’est l’espace en succursale qui manque pour récupérer les bouteilles. Sur le plan pratique, le verre devrait être préalablement rincé et dépouillé de sa collerette de plastique ou de plomb — et cela, en excluant les formats métallisés, dégoulinants de cire caoutchoutée ou pourvus d’étiquettes fondues à même le verre — pour que cela soit efficace. On n’est pas sortis de l’auberge. Si on suppose que le contenant vide n’est pas contaminé, toute récupération serait optimale si elle était étroitement couplée d’une consignation exprimée en espèces sonnantes et trébuchantes. Quoi qu’il en soit, et comme le souligne la SAQ, « un taux de récupération et de recyclage devra être atteint d’ici 2025 et ce taux sera fixé à 90 % en 2030 ».
Consigne par flacon
La LCBO ontarienne prélève depuis quelques années déjà une consigne de 20 ¢ par flacon incluse dans le prix du produit. Avec un nombre suffisamment important de points de chute pour inciter le chaland à garnir plus encore sa tirelire, d’une part, tout en facilitant le tri du verre (par couleur notamment), d’autre part. Une mesure incitative à mon avis valable pour l’environnement en raison de dépotoirs déjà débordés, mais aussi d’une matière première de qualité pour — pourquoi pas — développer le potentiel d’une fonderie « Verre Québec » susceptible de desservir notre marché local à travers le site transactionnel Le Panier bleu dont parlait cette semaine le ministre Pierre Fitzgibbon. L’industrie du vin, des cidres et des spiritueux d’ici y trouverait déjà son compte.
Du côté de la SAQ, il est prévu que « la consigne élargie à tous les contenants de boisson pour les formats de 100 ml à 2 litres sera instaurée à l’automne 2022 ». Un plan d’exploitation et financier est déjà en préparation avec Recyc-Québec en vue d’un nouveau système de consigne.
Casse-tête logistique
En matière de bouteilles de vin ou d’autre alcool, la SAQ ne peut évidemment pas réacheminer annuellement quelque 200 millions de flacons vidés de leur contenu au Québec à plus de 3000 fournisseurs ayant pignon sur cave dans 81 pays à travers le monde pour fin de recyclage. Le casse-tête logistique donne tout autant la migraine que l’empreinte carbone pour y parvenir est démesurée.
Pour l’instant, et ce depuis 2005, la SAQ a créé la Chaire de la valorisation du verre dans les matériaux à l’Université de Sherbrooke, afin de développer l’usage du verre en remplacement du ciment dans le béton », qui est toujours à l’oeuvre aujourd’hui. Bon point pour la recherche et le développement, mais est-ce suffisant ?
Il est prévu que la consigne élargie à tous les contenants de boisson pour les formats de 100 ml à 2 litres sera instaurée » à l’automne 2022 SAQ