Le Devoir

Répandre la terreur

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Vous êtes-vous déjà demandé, en regardant un film d’horreur, ce que le méchant faisait lorsqu’il n’était pas à l’écran ? Carrion en offre un magnifique aperçu avec son concept de « jeu d’horreur inversé » qui vous met dans la peau (ou plutôt dans l’amas informe et répugnant) d’un monstre tentaculai­re qui traque et tue tout sur son passage.

Carrion ne perd pas de temps à mettre en place son arc narratif, qui est à proprement parler bien mince. Dès les premières secondes, on prend le contrôle d’une entité monstrueus­e aux allures de spaghetti bolognaise, qui s’échappe de force d’un réceptacle en plein coeur d’un laboratoir­e souterrain. Notre but ? Quitter les lieux, non sans nous être d’abord incrustés dans tous les recoins de l’installati­on, en tuant et en dévorant tous les humains sur notre passage.

Le jeu est à son apogée lorsqu’il ne demande de nous que d’être absolument monstrueux. Son rendu graphique simple n’enlève rien au sentiment de puissance qui nous habite lorsqu’on pénètre dans une pièce pour y ravager tout sur notre passage.

À l’exception de quelques flash-back chargés de contexte, on ne quitte jamais la perspectiv­e du monstre, y compris lorsqu’il ne fait que se déplacer d’un endroit à l’autre en quête de proies. Une grande partie des mécaniques du jeu résident d’ailleurs dans l’exploratio­n et la découverte de nouvelles sections de la carte. Dans la tradition des Metroidnav­ia, on progresse vers celles-ci en actionnant des interrupte­urs qui en déverrouil­lent les points d’accès. En chemin, on acquerra des habiletés spéciales nous permettant d’atteindre des interrupte­urs autrement inaccessib­les.

On ne se déplace pas sans être inquiété pour autant. Outre les pauvres scientifiq­ues inoffensif­s qui servent à peu près juste à nous engraisser, on croise aussi des gardes armés et des dispositif­s conçus pour nous détruire.

En bougeant d’une section à l’autre de la base, on infecte les lieux en répandant notre « biomasse » dans d’énormes lézardes qui font office de points de sauvegarde. D’ailleurs, la gestion de notre masse, divisée en trois stades, est l’un des aspects avec lesquels Carrion se démarque. Les pouvoirs du monstre varient en fonction de celle-ci. Une plus grosse biomasse procure des habiletés plus offensives, tandis qu’une créature plus petite est plus agile et peut même devenir invisible pour échapper aux ennemis. On gagne de la masse en dévorant nos victimes, on s’en déleste en laissant derrière nous une sorte de cocon dans l’eau stagnante. Charmant.

Cela dit, Carrion ne nous offre ni carte ni objectif à l’écran pour nous orienter, des outils qui auraient pourtant pu rendre la navigation plus fluide. Le jeu n’indique jamais où on doit aller, comment s’y rendre ou ce que l’on doit faire pour progresser. Une absence d’exposition qui ne s’harmonise pas toujours bien avec sa conception visuelle en 2D pixélisée. On n’a rien à reprocher à son atmosphère horrifiant­e qui a su nous accrocher dès les premières minutes. Non plus à ses contrôles faciles à comprendre. Ses décors divisés en plusieurs pièces aux teintes grises et aux multiples points d’accès deviennent vite déroutants. Et la tâche de cartograph­ier ce labyrinthe repose sur les épaules du joueur. Il est presque inévitable de tourner en rond par accident. Jonathan Allard

Carrion

1/2

Développé par Phobia Game Studio et publié par Devolver Digital. Offert pour Nintendo Switch, Xbox One et PC.

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