En transformation (s)
D’emblée, ce qui plaît avec le documentaire de Nicolas Lévesque, c’est sa spécificité. Car Les libres, s’il s’attarde à la réinsertion de plusieurs anciens détenus, le fait en s’en tenant à une partie bien précise du processus. Il s’agit de ce moment fragile de transition entre la prison et le marché du travail, ici une période de six mois de formation en entreprise. En un ingénieux effet miroir, c’est une usine de transformation du bois qui accueille ces participants qui vivent eux-mêmes diverses transformations. Le réalisateur propose une bonne modulation quant au niveau de proximité avec ces derniers. En cela qu’au début, une certaine distance prévaut, laquelle s’amenuise graduellement alors que les gens se livrent davantage, sans plus être conscients de la caméra (on pense aux émouvants passages lors des sessions de thérapie). Sur le plan visuel, Nicolas Lévesque, qui est également un photographe émérite, sait quand y aller d’un cadrage expressif ou, à l’inverse, s’abandonner au moment. La structure du film est pareillement réussie : efficace dans son évolution saisonnière de l’hiver à l’été, mais capable d’apartés quasi poétiques (exemple : cette participante qui lit à voix haute le questionnaire d’une étude universitaire un brin abstraite par-dessus des images de collègues affairés à des tâches on ne peut plus concrètes). Le résultat est éclairant, et surtout empreint d’un bel humanisme.
Les libres
★★★ 1/2
Documentaire de Nicolas Lévesque. Québec, 2020, 94 minutes. En VSD à cinemaduparc.com, cinemamoderne.com, clap.ca.