Le Devoir

La Caisse aurait essuyé ses pires pertes en 10 ans dans les énergies fossiles

- ÉRIC DESROSIERS

Les principaux investisse­ments boursiers détenus par la Caisse de dépôt et placement du Québec dans le secteur pétrolier et gazier ont connu leur pire année depuis 2011, selon la coalition Sortons la Caisse du carbone, qui estime les pertes à 2,4 milliards de dollars.

Chaque année, le regroupeme­nt d’organismes environnem­entaux, de syndicats et d’autres groupes de citoyens, dont la Fondation Suzuki et Greenpeace Canada, évalue le rendement des 50 principaux investisse­ments boursiers de la Caisse dans les énergies fossiles (appelés Carbone 50 CDPQ). La dernière année a été la pire en 10 ans, avec une chute de leur valeur de presque 32 %, ou 2,4 milliards de dollars.

En guise de comparaiso­n, l’indicateur reflétant la performanc­e des marchés boursiers mondiaux lorsqu’on y exclut les compagnies investies dans les énergies fossiles (MSCI ACWI ex Fossil Fuels) a connu, quant à lui, une croissance de 24 % en 2020. Si la Caisse avait investi son argent dans ces marchés plutôt que dans ses 50 entreprise­s pétrolière­s et gazières de prédilecti­on, elle en serait plus riche de 4,2 milliards.

Ces pertes comptables de la Caisse sont entre autres le fait de ses placements dans Exxon (-328 millions), une société particuliè­rement active pour freiner la lutte contre les changement­s climatique­s, et dans Suncor (-293 millions), une compagnie très présente dans les sables bitumineux. En fait, le total des pertes attribuabl­es aux sociétés faisant l’exploitati­on ou le transport de cette forme particuliè­rement polluante de pétrole a dépassé le milliard.

Bien que particuliè­rement mauvaise l’année dernière, la tenue du Carbone 50 CDPQ en 2020 constituai­t son septième rendement négatif en 10 ans pour un recul cumulatif de 5,7 % et une perte totale de 4,8 milliards. En comparaiso­n, les mêmes sommes auraient généré des gains totaux allant de 12,5 à 16,2 milliards si elles avaient eu droit aux mêmes rendements que le Dow Jones, à New York, que les marchés boursiers mondiaux purgés des carburants fossiles ou même que le portefeuil­le global d’actions de la Caisse de dépôt.

Faire mieux

« En refusant d’écouter nos appels à désinvesti­r complèteme­nt des énergies fossiles, les dirigeants de la Caisse ont contribué à aggraver la crise climatique et ont littéralem­ent troué le bas de laine des Québécoise­s et des Québécois », a déclaré dans un communiqué le porteparol­e de Greenpeace, Patrick Bonin. Selon la coalition, la Caisse aurait mieux fait, l’année dernière, d’investir dans des constructe­urs de véhicules électrique­s, comme Tesla, Nio ou GreenPower, dont la valeur en Bourse a explosé avec le décollage de leurs ventes.

En juin dernier, la coalition Sortons la Caisse du carbone admettait tout de même que l’institutio­n avait réalisé des « progrès importants », bien qu’insuffisan­ts, dans la réduction de l’empreinte carbone de ses placements. En 2019, elle avait déjà diminué l’intensité carbone de son portefeuil­le de 21 % par rapport à 2017, s’approchant rapidement de son objectif de 25 % d’ici 2025.

En refusant d’écouter nos appels à désinvesti­r complèteme­nt des énergies fossiles, les dirigeants de la Caisse ont contribué à aggraver »

l a crise climatique PATRICK BONIN

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