Le Devoir

Quand la justice s’oppose aux restrictio­ns sanitaires

- JEAN-PHILIPPE CHOGNOT À PARIS AGENCE FRANCE-PRESSE

Le cas des Pays-Bas, où un tribunal a ordonné de lever le couvre-feu instauré pour lutter contre la pandémie de COVID-19, n’est pas unique en Europe. Des décisions de justice similaires ont en effet été prises dans d’autres pays, mais généraleme­nt à l’échelle locale. Voici des précédent en la matière.

Allemagne

Début février, une habitante de Tübingue (Sud-Ouest) obtient en justice la levée du couvre-feu instauré dans le Bade-Wurtemberg, tout en laissant la possibilit­é aux autorités de rétablir la mesure en la limitant aux villes dont le taux de contaminat­ion dépasse 50 cas pour 100 000 habitants. Le tribunal a considéré que le gouverneme­nt de cet État régional aurait dû davantage motiver le maintien d’un couvre-feu sur tout son territoire.

Espagne

Un tribunal de Madrid, saisi par les autorités régionales, invalide début octobre des mesures de confinemen­t partiel mises en place par le gouverneme­nt central, arguant que la santé publique est, en Espagne, une compétence des régions. En vertu du décret gouverneme­ntal, les 4,5 millions d’habitants de Madrid et de neuf autres villes avaient interdicti­on de quitter leur municipali­té, sauf pour aller travailler, se rendre à l’école ou visiter le médecin.

Le gouverneme­nt contourner­a la décision de justice en imposant un état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire espagnol, afin de servir de couverture juridique à toutes les mesures contre la COVID-19.

Quelques mois auparavant, en juillet, le reconfinem­ent d’environ 160 000 habitants de Lérida (Catalogne) et de plusieurs villes environnan­tes, décidé cette fois par les autorités régionales, avait été suspendu par un tribunal, au motif que les limitation­s de la liberté de mouvement relevaient de « la compétence de l’État ». Le même tribunal avait finalement donné son feu vert dans les jours suivants.

France

Depuis le début de la pandémie, et avant que le gouverneme­nt Macron ne décrète un couvre-feu nocturne à travers le pays à partir de la mi-décembre, plusieurs couvre-feux instaurés à l’échelle locale ont été suspendus par des tribunaux.

Pendant le premier confinemen­t, la justice administra­tive suspend des couvre-feux instaurés à Lisieux (Nord-Ouest) à la fin mars et à Cholet (Ouest), fin avril. Le maire de Cholet récidive dans la foulée avec un nouvel arrêté de couvre-feu, également suspendu.

En mai, au moment du déconfinem­ent, un couvre-feu instauré par la préfecture de l’Oise (Nord), à Compiègne, Creil et Nogent-sur-Oise, est à son tour suspendu.

Plus récemment, juste avant le deuxième confinemen­t national décrété fin octobre, trois petites communes des Bouches-du-Rhône (sud-est) obtiennent l’annulation d’un couvre-feu imposé par le préfet. Ce dernier prend un nouvel arrêté le jour même, imposant cette fois ce dispositif à l’ensemble du départemen­t.

Portugal

En mai, le justice portugaise remet en cause la quarantain­e de 14 jours à l’hôtel imposée par le gouverneme­nt régional des Açores aux personnes se rendant dans cet archipel, estimant que la mesure viole la Constituti­on et équivaut à une « privation de liberté ».

Hors d’Europe

Pendant la première vague de la pandémie, la Haute Cour du Malawi bloque en avril un confinemen­t décidé par le gouverneme­nt, jugeant insuffisan­tes les mesures prises pour compenser la perte des moyens d’existence de la population de ce pays très pauvre d’Afrique australe. Neuf mois plus tard, étant donné une flambée des cas de COVID-19, le président décrète, mi-janvier, l’état d’urgence, qui lui permet de passer outre la décision de la Haute Cour et d’instaurer un couvre-feu nocturne.

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PIERRE-PHILIPPE MARCOU AGENCE FRANCE-PRESSE Un citoyen de Madrid devant une affiche du premier ministre Pedro Sanchez en mai dernier

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