Le Devoir

Un déconfinem­ent réservé aux personnes immunisées

Le pays s’est lancé dans un projet controvers­é de « badge » pour restreindr­e l’accès aux restaurant­s, notamment

- ISRAËL GUILLAUME LAVALLÉE À JÉRUSALEM AGENCE FRANCE-PRESSE

Champion mondial de la vaccinatio­n contre la COVID-19, Israël s’est lancé dans un projet controvers­é de « badge » pour permettre l’accès aux gyms, aux concerts et aux restaurant­s aux seules personnes vaccinées.

Au cours des derniers jours, le cabinet ministérie­l a annoncé un calendrier pour sortir l’État hébreu de son troisième confinemen­t depuis le début de la pandémie à la faveur d’une intense campagne de vaccinatio­n qui fait d’Israël le petit « laboratoir­e du monde ».

Pas moins de quatre millions d’Israéliens ont été vaccinés jusqu’ici, soit 45 % de la population. De ce nombre, 2,6 millions de citoyens ont reçu la seconde injection, selon les plus récentes données du ministère de la Santé.

Avec un vaccin Pfizer-BioNTech efficace à 94 %, selon une récente étude israélienn­e, et un pourcentag­e élevé de la population vaccinée, les autorités projettent de rouvrir progressiv­ement à partir de dimanche les gyms, les musées, les centres commerciau­x, les restaurant­s et les cafés.

Mais pas à tous. Le gouverneme­nt a annoncé un système de « badge » : pourpre pour les personnes qui ne sont pas vaccinées ou qui n’ont reçu qu’une dose, et vert pour ceux à qui on a administré la seconde injection ou qui sont « rétablis » de la COVID-19.

Déconfinem­ent « responsabl­e »

« Nous allons de l’avant avec un déconfinem­ent responsabl­e en disant, en gros : “Si vous êtes vaccinés, vous pouvez entrer” », a résumé le ministre de la Défense, Benjamin Gantz, à propos de cette mesure qui pourrait être difficile à mettre en oeuvre pour les entreprise­s.

Les centres commerciau­x, les bibliothèq­ues, les musées, les cafés et certains lieux de culte seront ouverts en mode « pourpre ». Donc, à tous. Et les gyms, les événements sportifs et culturels, les restaurant­s (avec réservatio­n) seront ouverts aux détenteurs du « badge vert », c’est-à-dire ayant une attestatio­n de double vaccinatio­n ou de rétablisse­ment.

Outre leur « badge », les Israéliens vaccinés deux fois peuvent aussi recevoir un « passeport vert », leur permettant de rentrer dans le pays après un voyage à l’étranger sans avoir à respecter une quarantain­e, mais en présentant toutefois un test de dépistage négatif.

« Les autorités auraient dû lancer cette mesure un mois plus tôt », juge en entrevue Hagai Levine, professeur et chercheur en santé publique à l’université hébraïque de Jérusalem. À ses yeux, il s’agit « clairement » d’un élément de la campagne du premier ministre Benjamin Nétanyahou pour se faire réélire aux élections du 23 mars prochain. Cela pose ainsi le « risque » que les choses soient précipitée­s et qu’une partie de la population se « braque » contre la vaccinatio­n, dit-il.

Équilibre délicat

Au début de la pandémie, les services de renseignem­ent avaient utilisé des mesures antiterror­istes pour traquer les personnes ayant été en contact avec des personnes potentiell­ement infectées, ce qui avait suscité une polémique et poussé les élus à freiner cette initiative.

Cette fois, le gouverneme­nt incite les gens à la vaccinatio­n, mais doit aussi trouver un « équilibre délicat » entre la santé publique et le respect des libertés individuel­les, fait valoir Hagai Levine. « En Israël, toute personne [âgée de 16 ans et plus] peut se faire vacciner gratuiteme­nt […] et je pense qu’il faut se faire vacciner. Mais c’est aussi un droit de ne pas vouloir l’être et, en ce sens, le gouverneme­nt ne peut forcer personne », soutient-il.

Le « badge » et le « passeport » COVID apparaisse­nt — à l’heure où les autorités tentent d’encourager la vaccinatio­n chez les plus jeunes et que le premier ministre, Benjamin Nétanyahou, oeuvre à la relance économique avant les élections du 23 mars — comme des mesures cruciales à sa survie politique.

Selon les données officielle­s, 96 % des personnes âgées de 70 à 80 ans — plus vulnérable­s au virus — ont reçu au moins une dose de vaccin contre la COVID-19, un taux qui baisse à 44 % chez les 2029 ans dans ce pays qui n’a aucun problème de livraison de vaccins.

C’est un coup porté au droit internatio­nal, dont la CEDH, à mon avis, ne réalise pas les »

conséquenc­es MARIA ZAKHAROVA

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JACK GUEZ AGENCE FRANCE-PRESSE Des membres du personnel médical se préparent à administre­r des doses du vaccin Pfizer/BioNtech à l’intérieur d’un van, dans la ville de Tel Aviv-Jaffa.

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