Le Devoir

J’ai mal à notre langue

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J’ai mal au français. J’ai de plus en plus mal à ma langue, à notre langue. J’ai de plus en plus l’impression que le virus linguistiq­ue anglophone ne trouvera pas de vaccin. J’ai l’impression que nos animateurs de radio et de télé sont atteints eux-mêmes à un tel niveau qu’ils nous lancent peutêtre inconsciem­ment ou encore est-ce par snobisme, ces expression­s en anglais wishful thinking, delivery, open mind , dream job, cancel culture, storytelli­ng et j’en passe des centaines et des centaines… J’ai mal à notre langue quand nos artistes francophon­es que nous aimons, musiciens et chanteurs, nous expliquent en français qu’ils sont backstage en attendant d’être miké pour leur show live et, qu’avec la vibe, ils feront participer la crowd. J’ai mal à notre langue quand je regarde le hockey et que je vois une publicité d’un site Internet de pari BETninetyn­ine, pour ne pas le nommer, à un réseau où le propriétai­re, dans une salle de spectacle, il n’y a pas si longtemps, criait « en français! ». Je me souviens, mais lui s’en souvient-il? J’ai mal à notre langue quand j’entends de brillants jeunes très créatifs sur les réseaux sociaux nous parler de like, de followers de deleter, de story board, high tech pich,… J’ai mal à notre langue quand je remarque que des titres d’émissions de notre télévision francophon­e sont carrément en anglais. Je sais que je ne suis qu’un francophon­e bien ordinaire qui aime parler en français, qui ose le dire et qui s’inquiète de l’avenir de sa langue. J’ai mal à notre langue et je demande si je suis le seul à le penser et à le dire ? Suis-je le dernier? Pourquoi personne ne le dit, ne le crie, ne le dénonce?

Est-ce que j’ai raison de penser que nous devenons de plus en colonisés et que nous acceptons de l’être en baissant la tête et en disant « Thanks » ? Pierre Lincourt, Chicoutimi, membre de l’Associatio­n pour le soutien et l’usage de la langue française (A.S.U.L.F.)

Le 17 février 2021

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