Le Devoir

Denise Bombardier s’incline devant la protestati­on des auteurs autochtone­s

Face aux critiques du milieu littéraire, la chroniqueu­se a décidé se retirer des entrevues avec les écrivains issus des Premières Nations au Salon du livre de Québec

- ANNABELLE CAILLOU

Après la vague de mécontente­ment soulevée dans le milieu littéraire et de l’édition, la chroniqueu­se Denise Bombardier préfère se retirer des entrevues qu’elle devait animer avec des auteurs des Premières Nations au prochain Salon internatio­nal du livre de Québec (SILQ).

« Je ne vois pas pourquoi j’insisterai­s à interviewe­r des gens qui ne veulent pas que je les interviewe. Je ne veux forcer personne », a indiqué Denise Bombardier en entrevue avec Le Devoir vendredi matin.

La directrice des communicat­ions du SILQ, Johanne Mongeau, a confirmé que la chroniqueu­se ne mènerait pas les entrevues avec les autrices innues Naomi Fontaine et Joséphine Bacon, cette dernière ayant pour sa part fermement refusé jeudi de se retrouver en entrevue avec Mme Bombardier. « Nous sommes en train de voir qui pourrait la remplacer pour ces deux rencontres », précise Mme Mongeau.

Comme le programme le prévoit, Mme Bombardier animera toujours d’autres rencontres lors de l’événement littéraire qui se tiendra du 7 au 11 avril. Elle discutera notamment avec Michel Jean, mais aussi avec Ken Follett, EricEmmanu­el Schmitt, Patrick Senécal et Michelle Labrèche-Larouche.

« C’était notre demande et la bonne chose à faire », a réagi de son côté l’auteur innu Louis-Karl Picard-Sioui.

La veille, il avait manifesté son malaise — et celui des autres auteurs autochtone­s invités au SILQ — auprès de la direction de l’événement. Il jugeait que le choix de Denise Bombardier pour animer les entrevues manquait de sensibilit­é.

Rappelons que l’autrice et chroniqueu­se au Journal de Montréal a plusieurs fois tenu des propos controvers­és sur les Autochtone­s. En 2015, elle a notamment qualifié la culture autochtone de « mortifère » et « antiscient­ifique » dans une de ses chroniques. Des mots qui ont grandement secoué les membres des communauté­s autochtone­s.

« À chaque fois qu’elle aborde la question autochtone, c’est pour le faire d’une façon méprisante, démagogiqu­e et sans aucune sensibilit­é envers notre culture et notre réalité », avait commenté M. Picard-Sioui en entrevue avec Le Devoir jeudi. Des accusation­s que rejette Mme Bombardier. « Il y a deux semaines encore, j’ai expliqué dans un texte que je considérai­s qu’au Canada le racisme systémique s’exerce bel et bien sur les Autochtone­s », se défend-elle, citant sa chronique publiée dans Le Journal de Montréal du 2 février dernier, intitulée « Nous, les Blancs ».

« Erreur de jugement »

Le sujet est maintenant clos aux yeux de M. Picard-Sioui. « J’espère que tout le monde ressort grandi de cette histoire et que ça va permettre davantage d’échanges dans le milieu à l’avenir pour éviter ce genre de situation », précise celui qui considère cet épisode comme « une erreur de jugement », voire « un manque de connaissan­ce du milieu » de la part du SILQ.

Ce dont se défend l’équipe du Salon du livre. « Si vous regardez la programmat­ion, sur 30 auteurs présents, 5 sont issus des Premières Nations. Pas parce qu’il faut en inviter, mais parce qu’on veut le faire, car on reconnaît leur talent. […] Ce n’est donc certaineme­nt pas un manque de sensibilit­é ou un manque de connaissan­ce du milieu littéraire », insiste Mme Mongeau.

Le SILQ n’en respecte pas moins les réactions des auteurs autochtone­s et souhaite « corriger le tir ». « On ne prend pas ça à la légère. On a trop de respect pour ces auteurs avec qui on travaille depuis des années », poursuit la directrice des communicat­ions.

L’autrice et chroniqueu­se au Journal de Montréal a plusieurs fois tenu des propos controvers­és sur les Autochtone­s. En 2015, elle a notamment qualifié la culture autochtone de « mortifère » et « antiscient­ifique » dans une de ses chroniques.

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KARINE DUFOUR RADIO-CANADA Denise Bombardier ne mènera pas les entrevues avec les autrices innues Naomi Fontaine et Joséphine Bacon.

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