Le Devoir

Comment sauver notre patrimoine religieux

- Gaétane Dufour Historienn­e de l’art

Au Québec, nous n’avons ni châteaux, ni murailles, ni grands monuments des temps anciens, mais nous avons des églises, et elles sont toutes majestueus­es. Elles ont été construite­s aux XIXe et XXe siècles. À l’époque, tout architecte atteignait une renommée certaine s’il créait au moins une église durant sa carrière. Parallèlem­ent, les artisans participan­t à l’édificatio­n et à la décoration d’une église étaient choisis pour l’excellence de leur savoir-faire. Nos lieux de culte représente­nt ce qui se construisa­it de plus beau et faisaient la fierté des communauté­s.

Cependant, il y a un hic. En ce moment, plusieurs connaissen­t des difficulté­s financière­s. Et pour cause : nos églises étant désertées, les aumônes dominicale­s et le paiement de la dîme ont grandement diminué. Si bien que certaines manquent d’entretien et sont endettées… des présages de leur fermeture. Samedi à la une de l’informatio­n, on apprenait que la basilique Notre-Dame de Montréal, ce joyau national, connaît des problèmes. Âgée de 190 ans, elle a besoin de restaurati­on. De plus, elle emploie une trentaine de personnes.

Y aurait-il plusieurs moyens de sauver nos églises ? La réponse est oui. Il y en a au moins trois :

Spécialist­e en patrimoine religieux, Luc Noppen suggère de faire de certains de nos monuments des propriétés publiques et de créer une fiducie pour leur gestion.

Fort bien, si, prioritair­ement, les églises demeurent des lieux de culte. Car on ne les fréquente plus comme autrefois, mais elles sont encore bondées pour les précieux services qu’elles offrent : baptêmes, mariages, funéraille­s, célébratio­ns de Noël et de Pâques, voire pour la fête des Mères et des Pères. On tient à officialis­er ces événements par des célébratio­ns solennelle­s. Nos lieux de culte, de toutes confession­s, on les aime toujours. Sur le plan environnem­ental, ils ponctuent les paysages en offrant des espaces paisibles et harmonieux. Ainsi, ils contribuen­t à notre qualité de vie tous les jours.

En deuxième lieu, le mécénat sous forme de dons ou de legs testamenta­ires aux paroisses est désigné. Mais on n’y pense pas assez souvent. En outre, sait-on que les dons à des organismes patrimonia­ux permettent des déductions fiscales avantageus­es ?

En troisième lieu, la COVID-19 a provoqué une aggravatio­n de la situation financière des paroisses par le confinemen­t… Cependant, l’envers de la médaille est que plusieurs d’entre nous ont vu leur « fortune » augmenter par des flux boursiers inattendus. Ici, on ne parle pas d’impôt, comme des économiste­s l’ont suggéré, mais d’une contributi­on volontaire. Faire un don d’une petite partie de ces bénéfices à nos paroisses serait honorable. M. Noppen, grand défenseur du patrimoine religieux, ne sera probableme­nt pas contre la formation d’une fiducie qui percevrait nos dons ou le Conseil du patrimoine religieux du Québec qui planifiera­it un tel projet.

Traditionn­ellement, nos legs vont à nos descendant­s ; mais très souvent, nos enfants sont déjà bien nantis, et il n’est question que d’une parcelle de ce patrimoine. Quelle que soit l’importance des legs, la force de leur nombre permettrai­t d’éviter des pertes irremplaça­bles. Il s’agit de conserver des églises identitair­es de notre culture. À notre tour, en les sauvegarda­nt en ce XXIe siècle, nous laisserion­s un héritage mémorable aux génération­s X, Y, Z, un héritage pour leurs besoins ou qu’ils revisitero­nt avec fierté, à titre de lieux leur rappelant des événements symbolique­s de leur propre vie, celle de leurs parents, voire celle de la nation québécoise.

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