Le radicalisme, symptôme du désespoir
La détresse psychologique est associée à l’adhésion aux théories complotistes
Exacerbée par la pandémie, la détresse des jeunes adultes de quatre grandes villes canadiennes est directement associée à une plus grande adhésion aux théories du complot liées à la COVID et à l’appui à la radicalisation violente. Et le niveau de détresse serait significativement plus élevé à Montréal.
Tels sont les premiers résultats d’un vaste coup de sonde réalisé auprès de jeunes de 18 à 35 ans de Montréal, Toronto, Calgary et Edmonton dans le cadre d’une recherche menée sur les effets de la détresse par l’équipe de Recherche et Action sur les Polarisations Sociales, dirigée par la Dre Cécile Rousseau.
Cette professeure de l’Université McGill, spécialisée en psychiatrie sociale et interculturelle, juge ces constats particulièrement préoccupants.
Parmi les 6000 participants, plus de la moitié de ceux qui présentaient des signes de détresse dépassaient un « seuil clinique ». Et cette détresse était directement associée à une plus grande adhésion aux mouvances conspirationnistes endossant la violence.
« On a pu établir une association claire entre cette détresse et l’adhésion aux théories du complot, mais aussi à l’appui à la radicalisation violente », explique celle dont l’équipe du CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Îlede-Montréal intervient auprès de personnes identifiées
Les appels à l’aide de femmes en difficulté se sont multipliés sur les médias sociaux depuis le début de l’état d’urgence sanitaire, constate la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes (FMHF).
Malgré leurs moyens limités, les 36 établissements membres ont chargé des intervenantes de répondre, par écrans interposés, aux personnes qui « communiquent directement [avec elles] via les réseaux sociaux pour avoir des informations et du soutien ». Si une femme et ses enfants se trouvent dans une situation « critique », « on leur demande de venir en maison d’hébergement le plus rapidement possible », explique la directrice générale de la FMHF, Manon Monastesse dans un entretien avec Le Devoir.
Les mesures de confinement visant à ralentir la progression de la COVID19 posent « un défi supplémentaire » à toute personne cherchant à fuir la violence, fait-elle remarquer. « Elle est
Les maisons d’hébergement accueillent de plus en plus des femmes ayant vécu « des violences sévères en très peu de temps »
presque 24 heures sur 24 avec son conjoint violent. La première chose qu’il va faire, c’est de priver sa conjointe de ses réseaux sociaux, familiaux, de ses collègues de travail… » indique la porte-parole de la FMHF. « [Pour lui,] la pandémie, c’est un terreau fertile. »
Du coup, « les femmes vont communiquer beaucoup plus par Facebook, par Twitter, par d’autres médias sociaux, ou par courriel », souligne-telle. « Avant la pandémie, on voyait cela très peu. »
Cela dit, près du tiers des femmes sollicitent de l’aide en appelant dans une maison d’hébergement ou encore SOS violence conjugale.
Un état « beaucoup plus sévère »
Les maisons d’hébergement accueillent de plus en plus des femmes ayant vécu « des violences sévères en très peu de temps », ou encore « du contrôle coercitif intense, 24 heures sur 24 ». « Elles arrivent dans un état psychologique de traumatisme beaucoup plus sévère. […] Les enfants aussi », explique Mme Monastesse près d’un an après l’arrivée de la COVID-19 au Québec.
La directrice de L’Aquarelle, MarieEve Guay, constate que les femmes se réfugient dans les maisons d’hébergement plus fréquemment après avoir été victimes d’une agression, mais moins fréquemment « pour se mettre en sécurité quand la tension monte ». « C’est après-coup qu’on reçoit les femmes, souvent avec l’accompagnement de policiers », ajoute la directrice de la maison d’hébergement pour femmes sise à Chibougamau.
En temps normal, les femmes se présentent sans avertissement à L’Aquarelle, dont l’adresse est connue de toutes dans la région, y compris dans les communautés autochtones environnantes. Au début du mois, plusieurs jours se sont écoulés avant qu’une femme ne frappe à la porte, « du jamais vu ».
En prévision du budget, la responsable de L’Aquarelle appelle le gouvernement caquiste à poursuivre le rehaussement des sommes allouées aux maisons d’hébergement pour femmes qu’il a amorcé l’année dernière. « Il faut de loin améliorer les conditions de travail des intervenantes. C’est vraiment le nerf de la guerre en ce moment », fait-elle valoir.
Les maisons d’hébergement pour femmes se verront allouer en moyenne 100 000 dollars chacune de plus par année, avait promis le ministre des Finances, Eric Girard, dans son budget 2020-2021. Il leur en faudrait « facilement » 200 000 $ de plus chacune « juste pour la consolidation » de leurs activités, soutient la FMHF dans le cadre des consultations prébudgétaires.