Le Devoir

Manque de perspectiv­es

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Je travaille avec le Mouvement ATD Quart Monde, un organisme de lutte contre la pauvreté. Je connais le genre de familles que présente la série Au coeur de la DPJ. Je trouve déplorable d’aborder un enjeu aussi complexe en ne montrant qu’une seule perspectiv­e, celle des intervenan­ts. Nous ne savons rien de l’expérience que font les parents des services sociaux. Nous n’entendons jamais parler les organismes communauta­ires qui agissent auprès des familles en difficulté.

Nous passons sous silence la maltraitan­ce institutio­nnelle qu’elles peuvent subir. Nous ne voyons pas la violence que représente la séparation d’une fratrie dans différents foyers. Nous ne savons rien de ce que vivent les jeunes lorsqu’ils sont envoyés dans un centre qui a toutes les caractéris­tiques d’un milieu carcéral.

Au coeur de la DPJ joue un rôle crucial dans la représenta­tion que nous nous faisons des familles en difficulté, dont beaucoup vivent en situation de pauvreté. Les parents nous apparaisse­nt uniquement sous l’angle de leurs manquement­s. Ils deviennent ainsi des mésadaptés sociaux, des gens incapables de démêler ce qui est adéquat pour un enfant de ce qui ne l’est pas. Personne ne s’étonne que leur point de vue ne soit pas sollicité puisque leur parole est, de toute façon, disqualifi­ée d’avance.

Si notre système de protection de la jeunesse est en crise au Québec, c’est peut-être parce qu’il n’est pas réfléchi avec les principaux concernés. Tant que nous serons incapables, comme société, d’inclure les personnes marginalis­ées dans la réflexion sur nos institutio­ns, nous contribuer­ons à leur exclusion sociale. Caroline Moreau

Montréal, le 19 février 2021

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