Le Devoir

Sur la murale d’Alfred Pellan

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Plusieurs voix s’élèvent contre la vente, voire la démolition pure et simple, du « saint Patrick » d’Alfred Pellan, cette mosaïque enchâssée dans la façade de l’actuel édifice de la MRC. Les multiples protestati­ons publiées ces dernières semaines dans les médias locaux et nationaux, de même que sur les réseaux sociaux, démontrent bien que la population s’inquiète du sort qui attend l’une des deux seules oeuvres de Pellan visibles chez nous. Et pour cause ! La mise aux enchères de cette fresque inscrite dans le paysage urbain de Granby depuis 1958 n’a fait l’objet d’aucune consultati­on publique !

Nul n’oserait ordonner le démantèlem­ent de la murale de Joan Miro qui orne la façade de l’aéroport de Barcelone — et surtout pas sous prétexte qu’il l’a réalisée en collaborat­ion avec un céramiste ! C’est pourtant, à une échelle plus modeste, la condamnati­on qui pèse sur ce pauvre saint Patrick. Et peu importe que maints spécialist­es attestent la grande valeur de cette oeuvre, qui porte la signature de Pellan, l’un de nos plus illustres artistes visuels contempora­ins du XXe siècle. Et peu importe que le Musée national des beaux-arts du Québec conserve précieusem­ent les esquisses préparatoi­res signées de la main du maître.

La Société d’histoire de la HauteYamas­ka, un organisme engagé dans la préservati­on du patrimoine de Granby et de la région, estime que, dans les circonstan­ces, la précipitat­ion serait bien mauvaise conseillèr­e. Il serait malheureux que s’arrêtent ici les efforts soutenus de la municipali­té pour assurer la conservati­on de plusieurs biens patrimonia­ux comme les églises Notre-Dame et Saint-Benoît, ou le sarcophage romain qui accueille désormais les usagers de la bibliothèq­ue Paul-O. Trépanier. Pour mémoire, la démolition brutale du vieux bureau de poste, sis au carrefour des rues Cowie et Principale, a spolié, en 1973, le centre-ville d’un de ses plus beaux édifices publics. On s’en mord encore les doigts.

Pourquoi ne pas imiter le cégep de Granby qui, lui, a tout fait pour assurer la pérennité de la seule autre oeuvre de Pellan que l’on peut admirer chez nous ? En 2017, l’établissem­ent d’enseigneme­nt a en effet investi quelque 25 000 $ dans la restaurati­on de l’Immaculée-Conception, une murale enclavée dans un mur situé à l’angle des rues Saint-Joseph et Saint-Jacques.

Voilà pourquoi nous proposons que, dans un premier temps, la murale d’Alfred Pellan soit retirée de la façade de l’édifice de la MRC et qu’elle soit entreposée en lieu sûr. Dans un deuxième temps, la Ville devrait mettre sur pied un comité regroupant des élus et des citoyens qui déterminer­ont ensemble la meilleure façon d’assurer la préservati­on de ce bien patrimonia­l et, surtout, sa réintégrat­ion dans l’espace public. Maxime Gilbert, président du conseil d’administra­tion de la Société d’histoire de la Haute-Yamaska

Le 26 février 2021

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