Le Devoir

Série Planète verte

Quand les formations verdissent leur prose et crinquent leurs décibels pour rendre compte de la gravité de la crise climatique

- GRAND ANGLE ULYSSE BERGERON

La plus récente vidéo du groupe de métal Gojira, Amazonia, dépeint une apocalypse pour le moins réelle. On y voit une forêt amazonienn­e fumante, avalée par les flammes. Le poumon de l’humanité devient troncs d’arbres calcinés et racines carbonisée­s. À ces images se mêlent celles de communauté­s autochtone­s qui en subissent les contrecoup­s. Quand la gravité de la crise climatique ne se mesure pas qu’en images satellites, mais en décibels.

Avec Fortitude — album à paraître le 30 avril —, Gojira récidive. Le groupe de métal français, l’un des plus en vue de la scène, explore une fois de plus les conséquenc­es négatives des activités humaines sur l’environnem­ent. Et cette thématique est plus qu’une « simple muse », explique au Devoir Joe Duplantier, chanteur, guitariste et parolier de la formation. « C’est une véritable conscience de l’humanité. L’état de la planète, c’est le reflet de nos sociétés, le reflet de notre manque de compassion. »

Végétalien, Duplantier estime que la dégradatio­n des écosystème­s renvoie de facto à celle de l’humanité. « Les abus qu’on fait sur la nature, sur la planète sont autant d’abus qu’on fait sur nous-mêmes dans les faits, car nous faisons partie de la nature. Et c’est ça qui nous fait faire du métal. » Il déplore « les réflexes dominateur­s » de l’être humain : « C’est comme si on n’était pas rendus à un stade suffisant de l’évolution pour prétendre être complèteme­nt humains. On est encore perdus quelque part entre l’animal et l’humain. »

Or, Gojira n’est pas la seule formation de métal à avoir verdi sa prose dans les dernières années. Prenez Cattle Decapitati­on, qui fait dans le deathgrind, sous-genre aux rythmes rapides, techniques, marqué de chants gutturaux aux sonorités de monstres. Formé à l’origine par des musiciens végétalien­s, le groupe californie­n s’est rapidement imposé comme l’un des porte-étendard du mouvement animaliste sur la scène métal.

« Plusieurs de nos pièces transposen­t les humains dans des conditions qu’on réserve aux animaux d’élevage », raconte le Montréalai­s Olivier Pinard, bassiste de la formation. L’inversion du rapport de force entre espèces n’est pas sans rappeler La

planète des singes de l’écrivain français Pierre Boule. Différence notable : les paroles du groupe sont badigeonné­es d’une sauce gore s’apparentan­t davantage à Massacre à la tronçonneu­se qu’à un film de science-fiction des années 1960.

Voilà l’humain rétrogradé au bas de la chaîne alimentair­e, emprisonné dans des cages et des usines, cuisiné, proie de virus et de bactéries. L’approche

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MARIE-FRANCE COALLIER LE DEVOIR Trois death métalleux verts : Michel Langevin de Voivod, Olivier Pinard (guitare) de Cattle Decapitati­on et Sébastien Croteau de Necrotic Mutation
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