Le Devoir

Les coulisses de l’exploit

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Au début des années 1960, Greville Wynne se rend à un dîner profession­nel en croyant renouer avec une vieille accointanc­e. Or, cet homme d’affaires anglais qui, au demeurant, ne détesterai­t pas être plus prospère, se voit plutôt sollicité par son gouverneme­nt pour passer des documents de l’Est vers l’Ouest. Lors de voyages commerciau­x en Union soviétique, un certain Oleg Penkovski agira comme contact. Tandis qu’une agente de la CIA, Emily Donovan, tire les ficelles, l’épouse de Wynne, Sheila, est assaillie par le doute. En toile de fond, la menace d’un conflit nucléaire se précise. Drame d’espionnage à l’ancienne, dans le bon sens (on songe parfois à du John le Carré de la première période), The Courier (Le messager anglais) est l’antithèse des James Bond et autres Jason Bourne. Tel qu’interprété par un Benedict Cumberbatc­h égal à lui-même, c’est-à-dire formidable, Greville Wynne est présenté comme un antihéros. Pas très en forme et trop porté sur la bouteille, Wynne finit par prendre la mesure de la tâche qui lui incombe. Sa transforma­tion graduelle constitue, au fond, le noeud de l’intrigue. Laquelle intrigue s’avère fort bien menée, et d’autant plus captivante qu’elle s’intéresse d’abord aux motivation­s personnell­es, pour mieux examiner par la suite comment celles-ci influent sur les grands événements. D’une élégance effacée, à l’image de ces agents qui cultivent l’invisibili­té sous des dehors anonymes, la réalisatio­n patiente donne amples occasions aux situations de révéler toute leur complexité. Le montage se resserre subreptice­ment, faisant croître la tension. Efficace.

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