La justice polonaise défie l’Union européenne
Bruxelles juge que les réformes judiciaires menées par Varsovie vont à l’encontre de l’État de droit
Le Tribunal constitutionnel polonais (TK) a défié mercredi l’Union européenne en affirmant que les décisions prises par la Cour de justice de l’UE contre les réformes judiciaires mises en oeuvre par Varsovie étaient inconstitutionnelles. Le TK a estimé que les décisions de l’UE sur le « système, les principes et les procédures » des tribunaux polonais ne sont « pas conformes » à la Constitution polonaise, a annoncé le juge Stanislaw Piotrowicz.
Cette déclaration survient après que la Cour de justice de l’UE (CJUE) a ordonné, plus tôt dans la journée, à la Pologne de suspendre immédiatement les activités de la « chambre disciplinaire » de la Cour suprême, une nouvelle institution mise en place dans le cadre de la réforme du système judiciaire. Cette « chambre » est chargée de superviser les juges, dont ceux de la Cour suprême polonaise, avec le pouvoir de lever leur immunité pour les exposer à des poursuites pénales ou réduire leurs salaires.
Varsovie et Bruxelles sont à couteaux tirés depuis des années au sujet des réformes adoptées par le gouvernement populiste de droite du parti polonais Droit et Justice (PiS). Le gouvernement polonais assure que ces réformes sont nécessaires pour lutter contre la corruption et mettre fin à l’héritage de l’ère communiste dans le système judiciaire. Mais la Commission européenne juge, elle, qu’elles minent l’État de droit, et elle cherche à ramener la Pologne, ainsi que la Hongrie, en conformité avec ce qu’elle considère comme les normes démocratiques européennes.
Elle accuse les deux gouvernements d’étouffer les médias indépendants et d’imposer des réformes qui excluent en fait les juges dont les décisions ne s’alignent pas sur les opinions des partis au pouvoir.
La réforme polonaise du système judiciaire, entrée en vigueur en février 2020, empêche notamment les juges de saisir la Cour européenne de justice de certaines questions légales et crée un organe qui statue sur l’indépendance des juges.
De nouvelles tensions au sujet de cette réforme sont attendues jeudi. La CJUE doit prendre une nouvelle décision sur la légitimité de la « chambre disciplinaire » et le TK se réunit pour statuer sur une éventuelle supériorité du droit national sur celui de l’UE. D’anciens juges du TK ont prévenu récemment que contredire la CJUE « serait une violation drastique des obligations d’un État membre et un pas de plus vers la sortie du pays de l’UE ».
Le gouvernement polonais assure que ces réformes sont nécessaires pour lutter contre la corruption et mettre fin à l’héritage de l’ère communiste dans le système judiciaire