Guy Laliberté investit dans un fonds de capital-risque en culture |
L’incubateur pour jeunes entreprises spécialisé dans le secteur du divertissement Zú Montréal devrait lancer cet automne le fonds Zú Capital. Parmi les investisseurs dans ce fonds de capital-risque destiné aux technologies de la culture et du divertissement se trouve notamment Guy Laliberté, le fondateur du Cirque du Soleil.
Zú Montréal a vu le jour il y a bientôt trois ans, notamment grâce à une aide de 5 millions de dollars du Groupe Lune Rouge, une organisation qui appartient au milliardaire montréalais. Son rôle au sein de Zú Capital se limitera toutefois à celui d’investisseur, puisqu’il ne touchera pas à sa gestion ni à son administration.
Le nouveau fonds de capital-risque aurait déjà amassé la moitié des 40 millions de dollars qu’il souhaite réunir pour démarrer ses activités. Si le projet se réalise, Zú Capital compte investir dans les entreprises issues de son propre incubateur situé dans la Maison Alcan, au centre-ville de Montréal. Il se réserve le droit de participer au financement d’autres jeunes entreprises. Son but premier est de compléter l’offre de services de Zú Montréal en assurant aux entrepreneurs de l’incubateur un soutien financier lorsque vient le moment de voler de leurs propres ailes.
Guillaume Thérien, l’actuel directeur général de Zú Montréal, fera partie des principaux gestionnaires de Zú Capital. Le modèle du fonds sera essentiellement calqué sur celui de firmes bien connues de capital-risque étrangères spécialisées dans d’autres créneaux du secteur technologique, comme Y Combinator, à Boston, et TechStars, au Colorado.
Du capital-risque pour les technologies de l’art
Zú Montréal a été fondé dans l’intention de stimuler l’innovation en création artistique et divertissement. Sans vouloir trop se spécialiser, l’incubateur a tout de même ciblé certaines technologies qu’il estime plus prometteuses pour ces industries. Cela comprend le développement de places transactionnelles nouveau genre, l’intégration des réseaux 5G, l’utilisation de réalité virtuelle, augmentée ou mixte, et des outils dits « d’engagement » qui facilitent l’interaction des consommateurs avec les créateurs.
L’organisme à but non lucratif offre l’hébergement, l’accès aux technologies de partenaires de renom, comme Unreal Engine (du géant américain du jeu vidéo Epic Games), Lenovo et Telus, ainsi qu’un programme de mentorat pour aider les créatifs à devenir entrepreneurs. Différentes ressources de gestion et d’administration sont également offertes. En somme, il ne manquait qu’un coup de pouce financier pour compléter le tout, explique Guillaume Thérien en entrevue au Devoir.
« C’est une des lacunes de l’industrie du divertissement. Le modèle du financement n’a pas beaucoup changé depuis plusieurs années. On n’y retrouve pas ce modèle du capitalrisque collaboratif et participatif », dit-il. Du côté des investisseurs, on boude trop souvent les industries liées aux arts et à la culture, même si elles sont parmi les plus grandes créatrices de « contenu », l’ingrédient de base nécessaire à l’éclosion de nombreuses nouvelles technologies.
Pensons seulement à Netflix, illustre Guillaume Thérien. « Netflix, au début, s’est seulement intéressé aux canaux de distribution : des DVD livrés par la poste, puis des vidéos distribuées par Internet. Netflix est maintenant devenu un des plus grands producteurs de divertissement vidéo sur la planète. » Le modèle d’affaires même de Netflix — une offre à volonté moyennant un abonnement mensuel — dépasse aujourd’hui le secteur du film et de la télé.
Le prochain Netflix
À l’échelle mondiale, les prochaines années seront riches en innovation technologique.
L’arrivée des premiers réseaux sans fil de cinquième génération (5G) promet de faciliter le déploiement de certaines de ces innovations : la réalité virtuelle et augmentée, surtout si elle se fait en direct, exigera des réseaux sans fil rapides et performants. L’émergence ces derniers mois des jetons non fongibles, ou NFT en anglais, fait saliver bien des artistes et des collectionneurs, puisqu’il s’agit d’un protocole d’authentification automatisé qui certifie la propriété d’actifs qui n’ont pas nécessairement de forme physique.
Bref, ce ne sont pas les occasions majeures de transformer l’industrie du divertissement qui vont manquer à court terme. Et, déjà, plusieurs entreprises montréalaises sont impliquées dans cette transformation.
Les studios Felix & Paul sont connus à l’international grâce à leurs documentaires en réalité virtuelle tournés à bord de la Station spatiale internationale. La société Ova s’impose dans le monde de la réalité augmentée grâce à sa plateforme StellarX, qui rend la création d’environnements virtuels accessible au plus grand nombre. Gallea, qui vient d’être placée au palmarès des 20 startup à surveiller de l’organisme Montréal inc., a développé le principal marché d’oeuvres d’art en ligne au Canada.
Bref, Zú Capital croit que le moment était bien choisi pour lancer son propre fonds spécialisé. « Souvent, les premiers adeptes de nouvelles technologies sont des créateurs ou des gens issus du monde du divertissement, dit Guillaume Thérien. Nous espérons pouvoir créer de la propriété intellectuelle et attirer des investissements étrangers ici. »
Le prochain Netflix sera peut-être montréalais…
Le modèle du financement n’a pas beaucoup changé depuis plusieurs années GUILLAUME THÉRIEN »