Le Devoir

La crampe, ennemie imprévisib­le des athlètes

- LISE DENIS LE DEVOIR

Imprévisib­le, la crampe est la bête noire des athlètes. On se rappelle les tristes adieux d’Usain Bolt aux championna­ts mondiaux d’athlétisme en 2017, quand il n’avait pu terminer sa dernière course à cause d’une crampe à l’ischiojamb­ier. Qu’est-ce qu’une crampe et pourquoi apparaît-elle ?

C’est une « contractio­n involontai­re d’un muscle, qui est constante, douloureus­e et assez paralysant­e », explique Gilles Gouspillou, physiologi­ste musculaire. Une crampe « nuit clairement à la performanc­e. Souvent, les athlètes vont s’effondrer » ajoute-t-il. Et s’ils ne s’effondrent pas, la crampe a le don de pouvoir revenir à de multiples reprises.

Si les mécanismes de la crampe restent flous, c’est parce qu’elle est imprévisib­le, donc difficile à étudier. Il existe cependant deux principale­s théories.

Deux théories

La première est celle d’un déséquilib­re électrolyt­ique. « Sur des exercices de longue durée, on peut avoir un débalancem­ent entre les ions et l’eau qu’on perd. Si le déséquilib­re est trop important au niveau des fibres musculaire­s et des cellules nerveuses, on peut les rendre hyper excitables, donc plus faciles à contracter », explique celui qui est aussi marathonie­n. Il précise que « le mécanisme de cause à effet n’est pas certain », mais que ce déséquilib­re électrolyt­ique pourrait augmenter les probabilit­és d’avoir des crampes, surtout lors de longues épreuves.

Pour Pierre-Mary Toussaint, préparateu­r physique de l’équipe nationale de boxe, la crampe tient plutôt d’une fatigue musculaire. Une théorie partagée par M. Gouspillou, qui explique que lorsque les fibres musculaire­s s’étirent trop vite, un message de contractio­n va être envoyé par les fuseaux neuromuscu­laires censés protéger les muscles. Inversemen­t, lorsque la tension des fibres musculaire­s au niveau des tendons est trop forte, un message d’inhibition va être envoyé aux motoneuron­es, qui deviennent alors moins excitables,

Souvent, les athlètes vont s’effondrer

GILLES GOUSPILLOU »

donc moins facilement contractés.

« Un moyen qu’utilisent les joueurs de soccer pour arrêter les crampes, c’est de venir étirer le muscle. La relation de cause à effet est encore une fois incertaine, mais l’athlète espère ainsi profiter de cet effet d’inhibition », indique M. Gouspillou.

Les deux théories, qui ne font pas consensus entre les experts, ne sont pas mutuelleme­nt exclusives. « Puisque les crampes peuvent survenir dans des conditions très diverses, il est probable que de multiples mécanismes soient impliqués », avance le physiologi­ste.

La fatigue et la chaleur semblent toutefois favoriser les crampes. Certains athlètes auraient même des prédisposi­tions héréditair­es, avance M. Toussaint. Selon lui, l’entraîneme­nt est la meilleure façon de prévenir une crampe, permettant ainsi aux « contractio­ns répétées de ne plus être vues comme un stress par le corps ».

On ne trouvera probableme­nt pas de boissons à électrolyt­e dans les valises des sportifs, mais certains athlètes pourraient avoir apporté du jus de cornichon à Tokyo. Le vinaigre permettrai­t aux crampes de s’atténuer plus rapidement.

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