Le Devoir

Dans la course au « dopage technologi­que »

Les nouvelles chaussures du fabriquant Nike pourraient offrir un avantage subtil aux coureurs

- ÉRIC DESROSIERS À TOKYO

Une nouvelle technologi­e de chaussures de course fera son entrée dans le Stade olympique cette semaine. Mais l’avantage qu’elle conférera sera-t-il si grand ? L’affaire passionne les milieux spécialisé­s depuis quelques années déjà, où certains sont allés jusqu’à parler de « dopage technologi­que ».

Le fabricant américain d’équipement de sport Nike a mis au point de nouvelles chaussures qui améliorera­ient la performanc­e des coureurs de 4 % et auraient aidé à l’établissem­ent de toute une série de nouveaux records du monde depuis 2016 dans les courses de fond comme le marathon et le 10 000 mètres. Basée sur une semelle plus épaisse et rebondissa­nte à l’intérieur de laquelle se trouve une plaque de carbone qui permet une

Il se peut que l’on voie un avant »

et un après FÉLIX-ANTOINE LAPOINTE

meilleure tenue, cette nouvelle technologi­e a récemment été adaptée pour être appliquée aux crampons de course utilisés pour les distances plus courtes. Elle y fera donc ses débuts olympiques aux Jeux de Tokyo cette semaine.

« Contrairem­ent à d’autres sports, le monde de l’athlétisme est très conservate­ur, observe Félix-Antoine Lapointe, entraîneur-chef à la Fédération québécoise d’athlétisme. Et ces nouvelles chaussures pourraient y apporter le plus grand changement technologi­que depuis le remplaceme­nt des pistes cendrées par les pistes [caoutchout­ées] aux Jeux de Mexico. »

Pas une solution magique

« On ne parle pas de chaussures magiques, mais d’un petit plus », dit-il, qui pourrait toutefois être suffisant pour abaisser sensibleme­nt des temps qui ne se sont pratiqueme­nt pas améliorés depuis les années 1980. « Il se peut que l’on voie littéralem­ent un avant et un après. »

La coureuse de 800 mètres Maïté Bouchard avait de bonnes chances, ce printemps, de se qualifier pour les Jeux de Tokyo, mais elle n’y est finalement pas arrivée. Voulant mettre toutes les chances de son côté, elle a utilisé ces fameux nouveaux crampons de Nike. « Ils sont bons, comme toujours avec Nike. Mais est-ce qu’ils ont l’effet qu’on dit ou est-ce que c’est seulement un placebo ? Je ne peux pas le dire encore, explique l’étudiante en médecine. S’il y a une différence, elle n’est pas énorme : le gros du travail, ça reste les coureurs qui le font. »

Jean-Simon Desgagnés a aussi raté de peu sa qualificat­ion pour les Jeux cette année, mais ce n’est pas parce qu’il n’est pas chaussé par Nike. Le spécialist­e du 3000 mètres steeple est commandité par la compagnie New Balance, qui a mis au point sa propre version de cette technologi­e. « Ça ne change pas radicaleme­nt tes performanc­es », estime-t-il lui aussi, d’autant que les autorités sportives encadrant la course sur piste ont été plus rapides que celles des courses sur route pour fixer des limites sur l’épaisseur maximale des nouveaux crampons. « Le problème, c’est si tous les athlètes n’ont pas accès à ces nouvelles chaussures. Sinon, tout le monde va juste courir un petit peu plus vite. »

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