Le Devoir

Le coût de nos « parfaits » gazons

- Laure Mabileau Au nom du groupe Vigilance OGM

S’il y a un usage des pesticides qui est bien inutile, c’est lorsque nous arrosons nos parterres de fleurs et nos « parfaits » gazons. Pourquoi exposer ses petits-enfants, sa famille, une population entière à de tels produits ? L’esthétique en vautelle le prix ? À ces questions, nous répondons non. À ces questions, nous vous demandons, à vous, élus et candidats aux élections municipale­s, de répondre non.

Face à l’effondreme­nt de la biodiversi­té et au dérèglemen­t climatique, les prochaines élections municipale­s vont se révéler une étape clé dans la mobilisati­on et l’action environnem­entale. L’immobilism­e des autres ordres gouverneme­ntaux pousse, en effet, les municipali­tés sur le devant de la scène. Car l’urgence, elle, n’attend pas.

Dans le palmarès du pire en matière d’environnem­ent, les pesticides font malheureus­ement « bonne figure ». Il faut dire qu’avec des oligopoles formés par les industriel­s de l’agrochimie (pesticides et OGM) qui brassent des milliards de dollars et leurs stratégies bien pensées pour privatiser le vivant et « gagner du temps » avant l’interdicti­on de leurs produits néfastes, on ne pouvait y échapper. Pire encore, auprès de Santé Canada, ces derniers semblent « gagner du terrain », comme on le voit avec la propositio­n d’augmenter la limite de résidus de glyphosate autorisés dans nos aliments, la non-interdicti­on des néonicotin­oïdes et la propositio­n de ne plus évaluer certains nouveaux OGM avant leur mise en marché.

Les pesticides sont partout. Dans les aliments que nous mangeons, dans l’air que nous respirons et dans l’eau que nous buvons. On les banalise, mais notre exposition est loin d’être anodine. On le sait aujourd’hui, ces produits sont rattachés à l’apparition de certaines maladies, comme la maladie de Parkinson, des cancers, des troubles cognitifs et bien d’autres (INSERM, 2021). Des population­s sont aussi plus à risque que d’autres : les personnes utilisant ces produits à titre profession­nel (usage massif et répété), les enfants et les femmes enceintes.

Pourtant, nous pourrions nous en passer entièremen­t ou tout au moins en réduire radicaleme­nt l’utilisatio­n. C’est d’ailleurs ce que propose le manifeste Sortir du glyphosate, défendu par Vigilance OGM, en 15 mesures simples, rapides et peu coûteuses.

Aujourd’hui, nous souhaitons rappeler l’importance du rôle des élus municipaux dans ce dossier et plus généraleme­nt dans les dossiers environnem­entaux. Leur pouvoir. Et leurs responsabi­lités.

De plus, nous espérons qu’avec l’adoption d’une nouvelle réglementa­tion sur l’usage esthétique des pesticides dans un grand nombre de municipali­tés, nous entamerons un dialogue national sur la dépendance collective que nous avons développée envers ces intrants chimiques.

Il s’agit ici de légiférer pour interdire l’utilisatio­n des pesticides à des fins de jardinage pour les particulie­rs, mais aussi pour les interdire dans l’entretien des parcs et des jardins des municipali­tés. Aujourd’hui, seuls les écoles et les CPE sont adéquateme­nt réglementé­s : nous proposons d’étendre cette réglementa­tion à l’ensemble du territoire municipal. Saugrenue comme idée ? Non ! Déjà 150 municipali­tés ont instauré un règlement sur les pesticides pour accompagne­r le Code de gestion des pesticides du gouverneme­nt du Québec. La municipali­té d’Hudson a même été la première en Amérique du Nord à demander cette interdicti­on : cela lui a valu d’être poursuivie en cour par des compagnies de pesticides, poursuite qui s’est soldée par la victoire en Cour suprême de la municipali­té.

Soyons à la hauteur du courage de cette municipali­té.

Récemment, Laval, troisième ville du Québec, a interdit l’utilisatio­n du glyphosate et des néonicotin­oïdes sur son territoire. Drummondvi­lle a annoncé la même chose aussi. Le vent tourne.

Mesdames et messieurs, élus comme candidats, apportez votre contributi­on et répondez aux demandes des citoyens de protéger la santé du plus grand nombre et la santé de nos écosystème­s. Entamez ce débat national. Légiférez.

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