Le Devoir

Inévitable quatrième vague ?

Les experts s’attendent à une hausse des cas cet automne, mais, cette fois, les vaccins devraient changer la donne

- SANDRINE VIEIRA

Avec plus de 150 nouvelles contaminat­ions quotidienn­es annoncées lors des trois derniers jours, le Québec se dirige-t-il inévitable­ment vers une quatrième vague de cas de COVID-19 à l’automne ? La réouvertur­e des écoles, les changement­s de températur­e et la progressio­n du variant Delta risquent effectivem­ent de causer une recrudesce­nce des cas dans la province, selon le Dr Gaston De Serres, médecin épidémiolo­giste à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).

« Durant l’été, plusieurs contacts qu’on a avec des gens se font à l’extérieur. À l’automne, beaucoup de ces contacts-là vont continuer, mais vont plutôt se faire à l’intérieur, ce qui est plus propice à la transmissi­on », explique le Dr De Serres. Une étude japonaise réalisée au début de la pandémie évaluait que, pour une personne infectée, les risques de transmettr­e le coronaviru­s étaient 19 fois plus grands à l’intérieur qu’à l’extérieur.

En plus de pousser la population à se réunir à l’intérieur, l’air frais sera également plus propice à la propagatio­n du virus. « L’été, ce n’est pas une très bonne saison pour l’ensemble des virus respiratoi­res. À l’automne, ça recommence, et c’est vrai dans tous les pays au climat tempéré », explique-t-il.

Maintenant dominant au Canada, le variant Delta poursuit son avancée au Québec, avec maintenant plus de 350 cas répertorié­s. Aussi contagieux que la varicelle, le variant est « un facteur de plus qui va participer à la transmissi­on » à l’automne, prédit l’expert.

Le virologue et professeur au départemen­t de sciences biologique­s de l’UQAM Benoit Barbeau craint également que le variant hautement contagieux ne vienne alourdir les bilans de l’automne. « Avec un variant comme le Delta, il est fort probable que le nombre de cas va augmenter, tout simplement par le fait que plus de personnes que jamais vont retourner au travail et que les établissem­ents scolaires vont recommence­r à fonctionne­r comme auparavant », indique-t-il.

Bien qu’il s’attende à une vague à l’automne, le Dr De Serres rappelle qu’elle sera différente de celles que les Québécois ont connues jusqu’à présent. « Comme la majorité des gens de 70 ans et plus sont bien vaccinés avec deux doses de vaccin, les problèmes

Avec un variant comme le Delta, il est fort » probable que le nombre de cas va augmenter BENOIT BARBEAU

d’hospitalis­ation et de décès […] devraient être beaucoup moins importants que ce qu’on avait lors des première et deuxième vagues ».

Plus de 92 % de la population québécoise de 70 ans et plus sont adéquateme­nt vaccinées.

Une hausse des cas est donc attendue à l’automne, mais pas nécessaire­ment une augmentati­on du nombre d’hospitalis­ations, les plus jeunes — généraleme­nt moins vaccinés — étant moins à risque de souffrir de complicati­ons que les plus vieux.

S’ils sont certes moins vulnérable­s, il n’est toutefois pas impossible que ces jeunes aient besoin de se faire soigner, avertit le Dr De Serres : « Le groupe des gens non vaccinés est restreint, mais il reste plusieurs centaines de milliers de personnes qui n’ont pas reçu une première dose. Même si le risque d’hospitalis­ation pour les jeunes infectés est plus faible, plusieurs pourraient devoir être hospitalis­és si la maladie circule largement. »

La majorité des nouveaux cas signalés dans la province sont décelés chez les 20 à 29 ans. Les Québécois de 18 à 29 ans forment par ailleurs la tranche d’âge la moins vaccinée de la population : seulement 73 % d’entre eux ont reçu une première dose. Les 12-17 ans, à 75 %, ont déjà dépassé ce seuil.

« C’est sûr que la meilleure mesure, c’est que les gens se fassent vacciner. Ça ferait toute la différence si le 20-25 % qui n’est pas vacciné chez les moins de 39 ans venait chercher le vaccin. La situation serait vraiment différente à l’automne », insiste le Dr De Serres.

Portrait des régions

La récente hausse de cas est particuliè­rement préoccupan­te à Laval, en Mauricie– Centre-du-Québec et à Montréal.

« Laval et Montréal ont toujours été des régions importante­s au niveau des cas d’infection en raison des densités de population plus fortes. […] La transmissi­on communauta­ire, même si elle est plus basse, demeure. Lorsque vous avez soudaineme­nt une augmentati­on de cas au Québec, c’est sûr que [ça se retrouvera] dans les régions plus densément peuplées », indique M. Barbeau.

Avec 34,2 cas actifs par tranche de 100 000 habitants, Laval est actuelleme­nt la région la plus touchée de la province.

La Mauricie–Centre-du-Québec n’est pas loin derrière, avec 24,4 cas actifs par tranche de 100 000 habitants. Pas moins de 70 % des nouveaux malades de la COVID-19 décelés ces trois derniers jours dans la région étaient âgés de 18 à 30 ans, et 95 % ont contracté la maladie dans des rassemblem­ents privés ou des bars. Aucun d’entre eux n’était protégé adéquateme­nt contre la maladie.

À l’heure actuelle, 73,15 % de la population de la Mauricie–Centre-du-Québec a reçu une première dose de vaccin contre la COVID-19, et 56,17 % les deux.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada