Le Devoir

Parés pour la 4e vague ?

- MARIE-ANDRÉE CHOUINARD

Si la tendance des derniers jours est annonciatr­ice de notre proche avenir, le scénario de l’été 2020 semble sur le point de se reproduire : après l’accalmie et le relâchemen­t bienfaiteu­rs des jours doux, voilà qu’une 4e vague se profile pour l’automne, ce qui rend la course aux doubles doses encore plus cruciale maintenant que jamais. Sommes-nous parés pour la 4e vague et, sinon, comment affûter nos armes ? Mardi, le Québec a de nouveau franchi le cap des 175 cas quotidiens, et ce, après une dernière longue fin de semaine ayant produit plus de 500 nouveaux cas d’infection à la COVID-19. Jusqu’à maintenant, il a suffi de tourner les yeux vers l’Europe et les États-Unis pour prédire sans grande marge d’erreur le type d’avenir qui nous attendait. Cette fois n’échappera pas à ce scénario : la pandémie jouera son 4e acte, sur des tonalités différente­s cependant, le variant Delta narguant des pays qui croyaient avoir gagné la joute — l’Australie et Israël, pour ne nommer que ces deux-là, se colletaill­ent encore avec un virus qui n’a pas dit son dernier mot.

Le Québec et le Canada goûteront à une recrudesce­nce de cas au cours des prochaines semaines, ainsi que les modélisati­ons scientifiq­ues le laissent entendre. Si les mesures sanitaires continuent d’être allégées sans le moindre redresseme­nt, et que les taux de vaccinatio­n stagnent encore, les courbes d’infection s’affoleront — quelque 10 000 cas quotidiens sont alors attendus au Canada. Le variant Delta est plus contagieux, et même si l’on prédit qu’il entraînera moins de décès et d’hospitalis­ations que lors des dernières vagues, sa domination ailleurs dans le monde suffit à s’interroger sur notre capacité à faire face aux prochaines secousses.

Au centre des préoccupat­ions, une lourde question : le taux de vaccinatio­n des Québécois et des Canadiens suffira-t-il à adoucir la 4e vague portée par le variant Delta ? Et sous-question : quel serait, au juste, le taux idéal ?

Plusieurs nations ont avancé un taux de 75 % de protection adéquate — double dose de vaccin, ou une dose unique pour les cas préalablem­ent infectés par la COVID —, mais c’était avant l’avènement du Delta. De plus en plus d’experts militent désormais pour des visées plus élevées, de 85 %, voire 90 % de la population vaccinée, pour faire face au prochain assaut sans conséquenc­es gravissime­s. À l’heure actuelle, 66 % des Canadiens sont pleinement vaccinés, et 68 % des Québécois. Décortiqué­es en tranches d’âge et corrélées aux dernières données portant sur les nouveaux cas d’infection, ces statistiqu­es pointent à nouveau un groupe demeuré à découvert, soit les 18-29 ans, dont la cadence de vaccinatio­n n’atteint pas le rythme espéré malgré tous les efforts déployés ces dernières semaines. À quelques semaines à peine d’un retour en classe pour les élèves et les étudiants, la protection vaccinale des groupes les plus jeunes doit demeurer l’enjeu prioritair­e.

En mai dernier, les conditions fixées par le gouverneme­nt du Québec pour autoriser une rentrée scolaire en présence dans les cégeps et les université­s faisaient état d’un pourcentag­e de couverture vaccinale de la population étudiante de 75 %, objectif désormais désuet. Il semblerait, selon des données dont dispose Québec, que cette clientèle dépasse déjà cette statistiqu­e. Le gouverneme­nt affirme que 81 % des étudiants ont reçu une 2e dose (ou sont en voie de l’obtenir). Ces données sont rassurante­s, mais elles doivent être combinées au maintien du port du masque, notamment en prévision de tous les cours qui pourraient être donnés dans des amphithéât­res bondés, si telle est toujours la pratique dans un univers postpandém­ique.

Même si de façon générale au Québec la population des 12-17 ans a bien répondu à l’appel de la vaccinatio­n, à Montréal, des disparités imposantes inquiètent les autorités de santé publique, certaines écoles secondaire­s affichant des taux de vaccinatio­n situés sous la barre des 40, ou même des 25 %. Le gouverneme­nt devrait d’ailleurs, comme le recommande la Dre Mylène Drouin, directrice régionale de santé publique de Montréal, rehausser là aussi son objectif à au moins 85 %. On est loin du compte !

Ces chiffres insuffisan­ts confirment ce que l’on craignait : les écoles seront un milieu de contaminat­ion et de circulatio­n virale très active, d’autant plus qu’avec tous les autres groupes d’âge mieux protégés grâce au double vaccin, la pression du virus sera reportée sur les population­s qui demeurent à découvert.

On n’a pas oublié les ratés spectacula­ires de la campagne de vaccinatio­n dans les écoles qui devait avoir lieu avant la fin des classes, en juin, et qui aurait permis d’amoindrir le tableau décevant du jour. L’année scolaire 2021-2022 doit commencer sous de meilleurs augures et les responsabl­es de l’éducation n’ont plus la moindre excuse pour éviter de ficeler un plan solide : il faudra des campagnes de vaccinatio­n ultrarodée­s et des opérations de dépistage au primaire qui permettron­t de prévenir plutôt que de subir les éclosions. Les enfants du primaire ne doivent pas être oubliés dans l’offensive de l’automne, et ce, même si le vaccin n’est pas encore prévu pour eux. C’est dans la prévention que réside la clé pour ce groupe plus vulnérable.

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