Le Devoir

L’industrie touristiqu­e reste prudente après la réouvertur­e de la frontière

- AMINAH HANNAN

La frontière canadienne s’est rouverte dans le calme, lundi, permettant l’entrée au pays de voyageurs américains doublement vaccinés après plus de 16 mois de fermeture. Une étape qu’attendait impatiemme­nt l’industrie touristiqu­e québécoise, qui se montre toutefois prudente par rapport aux perspectiv­es de relance.

Lundi, la circulatio­n routière aux abords des postes frontalier­s rouverts était normale, selon Marie-Ève Letellier, porte-parole de l’Agence des services frontalier­s du Canada. « Il y a une petite hausse de volume, mais rien d’un impact majeur qui cause des temps d’attente à la frontière. »

Mme Letellier estime que plus d’Américains ayant eu vent de la réouvertur­e pourraient décider de voyager au Québec durant les 14 prochains jours — la durée minimale requise entre l’administra­tion d’une deuxième dose du vaccin et l’entrée au pays. Mais les prochaines tendances de voyage demeurent difficiles à prédire.

Les restaurate­urs et les hôteliers, eux, reçoivent la nouvelle de la réouvertur­e avec un optimisme modéré. « On espère que les restaurant­s qui sont dans des quartiers historique­s vont pouvoir retrouver un peu de clientèle, comme les autres provinces l’ont fait durant ces dernières semaines », affirme François Meunier, le viceprésid­ent aux affaires publiques et gouverneme­ntales de l’Associatio­n Restaurati­on Québec (ARQ).

Il souligne que les régions de Montréal et de Québec n’ont pas profité d’un regain d’affluence aussi important que celui vu en Gaspésie, à Charlevoix ou dans les Laurentide­s. « On n’a pas eu la moitié des ventes réalisées dans les autres provinces. L’accueil [de visiteurs locaux dans ces régions] a été meilleur, mais ces villes recevaient de la clientèle en raison des festivals, des spectacles, des touristes étrangers qui transitaie­nt et devaient manger deux fois par jour. Les pertes ont été immenses : près de 6 milliards de dollars [pour le secteur de la restaurati­on] au Québec l’an dernier. »

L’arrivée des dollars américains aidera à soulager ces pertes, précise M. Meunier, mais la situation sanitaire reste imprévisib­le. Se retrouver dans un autre confinemen­t à la suite d’une nouvelle vague d’infections serait « la pire catastroph­e » pour l’industrie, qui espère se maintenir à long terme. C’est d’ailleurs pourquoi le milieu montre « un niveau d’acceptabil­ité assez fort pour le passeport vaccinal », remarque-t-il.

Types de voyageurs

Du côté des hôteliers, Dany Thibault, le président du conseil d’administra­tion de l’Associatio­n Hôtellerie Québec, voit d’un bon oeil l’arrivée des touristes américains, mais reconnaît que ça ne réglera pas tout. Il convient que le volume de réservatio­ns pour le mois d’août est meilleur que celui de l’année passée. Mais depuis le début de la pandémie, il y a un manque de main-d’oeuvre pour accueillir les clients et l’industrie dépend encore beaucoup du tourisme étranger pour se maintenir à flot.

« Les voyageurs régionaux — ceux à proximité de Montréal, de Québec ou de l’Ontario — vont demeurer dans les hôtels seulement deux-trois nuits maximum, tandis que les voyageurs américains et européens vont aller jusqu’à six-sept nuits, alors c’est la grande différence », explique-t-il. « Et c’est reconnu que les voyageurs internatio­naux dépensent plus d’argent dans l’économie touristiqu­e que les voyageurs du Québec. »

Si la réouvertur­e de la frontière permet de ramener 65 à 70 % de la clientèle habituelle du mois d’août en contexte non pandémique, ce sera déjà un net progrès par rapport à l’an dernier, note M. Thibault. « Est-ce qu’il y aura un grand nombre d’Américains ? Le temps va nous le dire. Il faudrait d’abord pourvoir les postes pour pouvoir répondre à une hausse de la demande. »

Il faudrait d’abord pourvoir les postes pour pouvoir répondre à une hausse de la demande

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