Le Devoir

Faire déguster sa culture

Anna Kahentaron­hkwas Lazare, cheffe propriétai­re de Messy Kitchen

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Dans la grande cuisine du restaurant et traiteur Messy Kitchen de Kahnawake, six femmes préparent des boîtes à lunch pour les enfants d’un camp de jour, au son de musique punk-rock.

« Nous ne sommes toujours que des femmes à travailler ici », rapporte la cheffe propriétai­re, Anna Kahentaron­hkwas Lazare, devant son grand comptoir d’accueil rose. « On se soutient, on se comprend, on travaille bien ensemble, on a du plaisir. Nous sommes comme une famille maintenant. » Derrière elle est affiché son logo, un dessin de son visage qui se reflète dans des couteaux de cuisine.

Forte d’un diplôme d’études profession­nelles en cuisine, Mme Lazare avait à peine 22 ans, en 2016, lorsqu’elle a lancé son service de traiteur avec sa cousine. C’était tout petit au départ, puisqu’elles travaillai­ent à partir de l’appartemen­t de Mme Lazare, sans avoir recours à de l’aide financière. Les associées l’ont fait grandir petit à petit, à mesure que les contrats s’enchaînaie­nt et qu’elles réinvestis­saient leurs profits dans l’entreprise.

« Je ne voulais pas avoir de prêt sur les épaules et me préoccuper de le rembourser si jamais nous faisions face à un échec », explique la jeune Mohawk tatouée aux cheveux d’ébène.

Sa clientèle a beaucoup augmenté grâce au bouche-à-oreille et à ses publicatio­ns sur les réseaux sociaux. Écoles, université­s, institutio­ns et particulie­rs du Grand Montréal font appel à son service de traiteur pour des événements spéciaux, alors que les résidents de Kahnawake et des environs commandent des brunchs et des lunchs à la pièce à son restaurant.

« Je travaille constammen­t. Je suis maintenant la seule responsabl­e de l’entreprise. Je n’ai pas vraiment le temps d’avoir des passe-temps. Il faut que je fasse attention de ne pas me laisser submerger par le travail », dit celle qui supervise maintenant une douzaine d’employés. La femme de 27 ans estime que le soutien de sa famille a été primordial lorsqu’elle vivait de l’incertitud­e, des moments difficiles et l’envie de tout laisser tomber.

Mais tout ce travail en vaut grandement la peine. Mme Lazare se sent à sa place. Elle aime cuisiner des ingrédient­s traditionn­els mohawks, comme le chevreuil, l’orignal, le pain de maïs, le saumon fumé, le riz sauvage et beaucoup de baies fraîches. Son prochain grand projet est d’avoir sa propre petite ferme pour alimenter son restaurant. Elle se voit notamment entourée de poules et de légumes dans quelques années. D’ici là, on peut presque toujours la trouver dans la cuisine de son restaurant, en train de rigoler avec ses amies employées.

On se soutient, on se comprend, on travaille bien ensemble, on a du plaisir. Nous sommes comme une famille maintenant.

ANNA KAHENTARON­HKWAS LAZARE

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