Le Devoir

La réforme linguistiq­ue de Québec bientôt mise à l’épreuve

Une consultati­on publique accueiller­a 52 personnes et organismes pour discerner les forces et faiblesses du projet de loi 96, nouvelle version de la loi 101

- JOCELYNE RICHER LA PRESSE CANADIENNE

On entendra beaucoup parler de l’avenir de la langue française au Québec du 21 septembre au 7 octobre, à la faveur de la consultati­on d’envergure menée sur le projet de loi 96, cette réforme tant attendue censée succéder à la loi 101.

Au total, durant ces neuf jours d’audiences, vont défiler à l’Assemblée nationale 52 personnes et organismes préoccupés du fait français et souhaitant dicerner les forces et faiblesses de la vaste réforme linguistiq­ue proposée en mai dernier par le ministre responsabl­e du dossier, Simon Jolin-Barrette, en tentant de le convaincre de l’amender, au besoin.

En gros, on peut s’attendre à voir les témoignage­s se diviser en deux camps : ceux qui jugeront que le projet de loi ne va pas assez loin pour assurer la pérennité du français dans tous les secteurs d’activité et les autres, qui demanderon­t au ministre d’adoucir les angles.

Parmi les personnali­tés de marque invitées à participer à l’exercice, notons la présence du sociologue et professeur émérite de l’Université de Montréal Guy Rocher, un des artisans de la Charte de la langue française (familièrem­ent appelée la loi 101) en 1977, dans le premier gouverneme­nt péquiste de René Lévesque.

Âgé de 97 ans, M. Rocher se présentera en commission le 28 septembre. Dans un passé récent, il a dit vouer une grande admiration à Camille Laurin, père de la loi 101, et a souhaité à Simon Jolin-Barrette de marcher dans ses pas en faisant preuve de courage. Il s’est prononcé en faveur de l’idée controvers­ée d’étendre la loi 101 au cégep, une avenue qui n’a pas été retenue par le ministre.

« Loin de Camille Laurin »

Quelques anciens élus péquistes viendront exprimer leur point de vue sur la réforme, dont l’ex-ministre Louise Beaudoin, qui disait en mai qu’avec le projet de loi 96 on était « loin de Camille Laurin, de ses audaces et de son courage ».

Elle juge quand même plusieurs mesures intéressan­tes, soit le rôle exemplaire que devra jouer l’État, le droit reconnu d’apprendre le français et l’élargissem­ent de la francisati­on aux entreprise­s comptant entre 25 et 49 employés.

Le lent déclin du français

L’auteur du livre Pourquoi la loi 101 est un échec, Frédéric Lacroix, estime que le français n’a cessé de reculer au Québec, malgré plus de quatre décennies d’applicatio­n de la loi 101.

Il viendra expliquer pourquoi aux parlementa­ires et comment inverser la tendance, selon lui.

Un des spécialist­es de la question linguistiq­ue, l’auteur, statistici­en et professeur à l’Université d’Ottawa Charles Castonguay, fait partie de ceux qui documenten­t depuis des années le lent déclin du français au Québec.

Il estime que le projet de loi 96 ne

En gros, on peut s’attendre à voir les témoignage­s se diviser en deux camps : trop ou pas assez

va pas assez loin pour redresser la barre et accroître les transferts linguistiq­ues des immigrants vers la majorité francophon­e.

Du droit aussi

Plusieurs experts en droit, particuliè­rement sur les questions constituti­onnelles, viendront apporter leur éclairage. Parmi ceux-ci : Patrick Taillon, de l’Université Laval, Jean Leclair, spécialist­e en droit constituti­onnel et du droit autochtone, Daniel Turp, professeur à l’Université de Montréal, et Benoît Pelletier, ancien ministre libéral et désormais professeur titulaire à l’Université d’Ottawa.

M. Pelletier a accueilli favorablem­ent un des volets du projet de loi qui, bien que de « portée limitée », a fait couler beaucoup d’encre, soit la propositio­n d’inscrire dans la Constituti­on canadienne le fait que les Québécois forment une nation et que le français constitue la seule langue officielle du Québec et la langue commune de cette nation.

Le monde municipal viendra commenter les articles portant sur le statut bilingue accordé à certaines villes. On entendra la Ville de Montréal, l’Union des municipali­tés du Québec, l’Associatio­n des municipali­tés de banlieue et la Fédération québécoise des municipali­tés.

Les grandes centrales syndicales seront, elles aussi, au rendez-vous, tout comme les organisati­ons patronales, de même que de nombreux organismes, dont ceux impliqués de près dans la promotion du français .

Le projet de loi 96 est un document ambitieux comportant quelque 200 articles, qui feront l’objet par la suite d’une étude détaillée, avant son adoption.

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