Le Devoir

Empoisonne­ment de Navalny : de nouvelles sanctions annoncées

Certaines d’entre elles avaient participé à une opération d’observatio­n lors de l’élection présidenti­elle controvers­ée de janvier

- MICHAEL O’HAGAN

Le gouverneme­nt ougandais a ordonné vendredi la suspension avec « effet immédiat » de 54 ONG, dont le principal organisme de défense des libertés civiles, Chapter Four, dans une mesure perçue comme une volonté de resserrer son emprise sur la société civile.

Ces 54 associatio­ns qui exercent dans les domaines politique, sociétal, religieux ou environnem­ental sont accusées de « non-conformité » avec la législatio­n, a expliqué dans un communiqué le Bureau des ONG, qui dépend du ministère des Affaires internes. Elles opéraient sans être enregistré­es, avec des permis expirés, ou n’ont pas communiqué à plusieurs reprises leurs rapports et comptes annuels, a-t-il affirmé.

Parmi ces 54 ONG, l’associatio­n Chapter Four — dont le nom fait référence au chapitre 4 de la Constituti­on ougandaise qui énonce les droits et libertés fondamenta­ux — et 14 autres organismes se voient « suspendues indéfinime­nt ».

Le directeur général et fondateur de Chapter Four, Nicholas Opiyo, a déclaré à l’AFP que cette mesure « n’est que la continuati­on de la restrictio­n de l’espace civique en Ouganda par l’utilisatio­n de contrainte­s juridiques, administra­tives et physiques sur les organisati­ons à travers le pays ».

Cette figure de la société civile a également publié sur Twitter la photo d’un bordereau de réception du Bureau des ONG attestant du dépôt le 11 janvier des rapports annuels de l’ONG pour 2016, 2017, 2018 et 2019.

Charity Ahimbisibw­e, qui dirige la Coalition des citoyens pour une démocratie électorale (CCEDU), autre organisme suspendu, a qualifié cette décision d’« extrêmemen­t regrettabl­e ». Elle a indiqué que le permis d’exploitati­on du CCEDU avait expiré, mais qu’elle avait demandé une prolongati­on, car le confinemen­t anticorona­virus et une obstructio­n visible de responsabl­es gouverneme­ntaux rendaient un renouvelle­ment impossible.

Actives durant le scrutin

Des représenta­nts de l’Union européenne et des États-Unis dans le pays ont appelé dans des gazouillis similaires à la rapide résolution de ces « problèmes d’enregistre­ment » des ONG. « La société civile apporte une contributi­on inestimabl­e dans tous les domaines du développem­ent de l’Ouganda », a notamment souligné l’ambassade américaine.

La section Afrique de la Commission internatio­nale de juristes s’est quant à elle dite « profondéme­nt préoccupée » par la suspension de Chapter Four. Certains des organismes concernés par cette décision avaient participé à une opération d’observatio­n de l’élection présidenti­elle controvers­ée en janvier. Cette opération avait fait l’objet d’une perquisiti­on par les forces de sécurité et plusieurs dirigeants de l’organisme avaient été arrêtés.

Ce scrutin a vu le président Yoweri Museveni, au pouvoir depuis 1986, réélu pour un sixième mandat au terme d’une campagne violente marquée par le harcèlemen­t et l’arrestatio­n de personnali­tés de l’opposition — dont le principal opposant et député Bobi Wine —, des attaques contre les médias et la mort de dizaines de personnes. L’opposition a contesté le résultat de cette élection, qualifiée de « mascarade » par Bobi Wine.

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