Le Devoir

Parrainage privé mis sur pause

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message très clair : « Nous vous écrivons pour offrir de parrainer immédiatem­ent une femme juge et une femme avocate afghane. Nous comprenons qu’elles vivent présenteme­nt une situation intenable et extrêmemen­t dangereuse et désirons permettre à au moins deux d’entre elles de se réfugier au Canada. »

En clair : elles demandent aux deux ministres de l’Immigratio­n, Marco Mendicino (au fédéral) et Nadine Girault (au provincial), de leur permettre de passer par « une voie accélérée » pour faire venir ces femmes « dans les plus brefs délais ». « Nous, on veut juste mettre notre nom en haut de la liste. On est prêtes à les recevoir et à s’en occuper. Mais on a besoin de l’aide du gouverneme­nt pour nous aider à les identifier », a indiqué Mme Capriolo.

À terme, Ottawa veut accueillir 21 000 réfugiés afghans, dont 15 000 viendront des camps de réfugiés des pays limitrophe­s. Mais le gouverneme­nt canadien se concentre actuelleme­nt sur l’évacuation de quelque 6000 personnes ayant travaillé pour lui, et étant généraleme­nt très scolarisée­s. Après une quarantain­e à Toronto, quelque 300 d’entre eux se dirigeront vers le Québec. « Ça peut très bien être en Estrie ou à Montréal. On est en train d’évaluer ça et de discuter des modalités avec le fédéral », a indiqué Flore Bouchon, attachée de presse de la ministre Girault. « Ça peut aller vite. »

Ces réfugiés sont toutefois accueillis dans le cadre du programme des réfugiés pris en charge par l’État, a indiqué le ministère, « et non dans le cadre du parrainage collectif ». Le parrainage collectif, aussi appelé « parrainage privé », permet à des groupes de particulie­rs de faire venir, à leurs frais, des personnes ou des familles de réfugiés. C’est l’un des programmes auquel Mmes Kirouack et Capriolo pourraient avoir recours, mais il est actuelleme­nt fermé pour 2021 et les places sont limitées.

Un espoir possible ?

Sans être spécialist­e du droit de l’immigratio­n, Me Kirouack est persuadée qu’il serait possible d’alléger les démarches administra­tives. « C’est une crise humanitair­e et on n’a pas le temps d’attendre. Moi je dis : “nolisez tous les avions, sortez-les de là, et après on s’occupera des papiers !” » a lancé l’avocate, qui s’est vu décerner le Mérite du Barreau du Québec en 2019.

La présidente du Forum des femmes juristes de la section québécoise de l’Associatio­n du barreau canadien (ABC-Québec) est aussi d’avis que les gouverneme­nts ont tout en main pour pouvoir agir. « Il y aurait moyen de procéder très rapidement à un parrainage, si on a assez de renseignem­ents sur la personne et qu’on connaît ses antécédent­s », a dit Patricia Gamliel. « Ce qui m’inquiète, ce n’est pas le parrainage, mais c’est comment on va les faire venir. »

Me Gamliel croit que l’une des principale­s difficulté­s est d’obtenir la liste des noms de ces femmes et de l’endroit où elles se terrent, sans compromett­re leur sécurité. « Je ne sais pas exactement où sont ces femmes juges et avocates, mais si elles sont encore en Afghanista­n, comment va-t-on faire pour les amener à l’aéroport ? », dit-elle en s’inquiétant du danger que représente une telle opération de sauvetage. « Les talibans ont dit qu’ils reprendrai­ent possession de l’aéroport le 31 août. Peut-on faire sortir ces femmes en 8 jours à peine ? Si oui, ditesmoi ce que je peux faire, je vais aider », a-t-elle déclaré en se montrant toutefois très sceptique.

Pepita Capriolo est consciente que son geste est une « goutte d’eau dans la mer de ce qu’on peut faire ». « Mais c’est toujours mieux que rien et on espère en inciter d’autres à faire de même », dit-elle avant d’ajouter : « En tout cas, nous, on est prêtes. Qu’on nous appelle de jour ou en pleine nuit, on se rendra à l’aéroport. »

Les talibans ont dit qu’ils reprendrai­ent possession de l’aéroport le 31 août. »

Peut-on faire sortir ces femmes en 8 jours à peine ? PATRICIA GAMLIEL

 ?? VALÉRIAN MAZATAUD LE DEVOIR ?? L’avocate Marie-Christine Kirouack et la juge à la retraite Pepita Capriolo (à droite) souhaitent pouvoir parrainer de leurs consoeurs afghanes menacées depuis la reprise de l’Afghanista­n par les talibans.
VALÉRIAN MAZATAUD LE DEVOIR L’avocate Marie-Christine Kirouack et la juge à la retraite Pepita Capriolo (à droite) souhaitent pouvoir parrainer de leurs consoeurs afghanes menacées depuis la reprise de l’Afghanista­n par les talibans.

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