LA CAMPAGNE LIBÉRALE PLUS PRUDENTE APRÈS LES MANIFESTATIONS
Même si le premier ministre Justin Trudeau n’entend pas se laisser intimider par les manifestants croisés lors des rassemblements cette fin de semaine, la campagne libérale prend des précautions supplémentaires afin de réduire les risques de débordement. Contrairement à son habitude, elle a commencé à restreindre la publication de l’adresse des lieux où le premier ministre fait ses annonces.
Mardi matin, par exemple, l’adresse fournie aux médias était celle d’un petit parc de quartier résidentiel de Kanata, en banlieue d’Ottawa. S’y trouvait une employée du Parti libéral qui avait pour tâche de fournir aux journalistes un petit bout de papier sur lequel était inscrit le lieu réel du rendez-vous : la cour arrière d’une résidence privée du secteur. Sur le trajet, deux véhicules de patrouille de la police d’Ottawa étaient aux aguets, en plus des nombreux agents de la GRC déjà sur place.
« Désolée, je n’ai reçu l’invitation qu’à 8 h », laisse tomber une journaliste arrivée en retard au point de presse. La campagne demandait aux médias d’arriver à 9 h, soit une heure avant l’annonce, pour laisser le temps au chien renifleur de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) de s’assurer que personne ne transporte d’explosifs. Le protocole est en place depuis le jour 1 de la campagne.
Trois sources libérales confirment que l’itinéraire de Justin Trudeau est désormais publié encore plus à la dernière minute qu’à l’habitude, pour éviter les visiteurs indésirables.
Dimanche dernier, des manifestants ont perturbé la quiétude lors d’une annonce libérale sur l’environnement. Une autre manifestation avait carrément forcé l’annulation d’un rassemblement partisan de Justin Trudeau vendredi. Les deux incidents se sont produits dans la banlieue torontoise. La sécurité a depuis été renforcée autour du premier ministre Trudeau.
Deux employés politiques libéraux ont indiqué au Devoir que des organisateurs de la campagne ont été agressés par des manifestants dimanche. Certains ont, par exemple, reçu des crachats de protestataires qui scandaient : « Enfermez-le » (« Lock him up ») à l’intention du premier ministre.
« Il faut cesser de les appeler des manifestants. Ce sont des gens radicalisés », dit une source présente lors des débordements cette fin de semaine, mais qui ne peut parler ouvertement de la sécurité de la campagne. Elle craint que le climat ne se détériore encore plus.
Dans l’entourage du chef, on se dit fortement ébranlé par les événements des derniers jours. Des photos de la foule hostile et bruyante de dimanche à Cambridge, en Ontario, montrent notamment une pancarte indiquant que M. Trudeau mérite la pendaison pour « haute trahison ». Le premier ministre a promis de « ne jamais reculer » devant ces « intimidateurs ».
Vendredi soir, quelque 150 manifestants ont empêché la tenue d’un autre rassemblement libéral, celui-là dans le village ontarien de Bolton, à une centaine de kilomètres plus au nord. Selon deux sources proches du dossier, le premier ministre était prêt à s’y rendre quand même, quitte à mettre un gilet pare-balles comme il l’avait fait lors d’un événement de campagne en 2019. C’est la GRC qui n’aurait pas donné son accord.
Plus tard, Justin Trudeau a fait un court discours dans lequel il disait « entendre la colère », à laquelle il souhaite répondre « avec compassion ».
Vendredi soir, quelque 150 manifestants ont empêché la tenue d’un rassemblement libéral dans le village ontarien de Bolton