Dans le Portugal de Montréal
À Montréal, on a surtout entendu parler des quartiers chinois et italien. Mais, si plusieurs savent qu’il y a un quartier portugais dans la métropole, la plupart d’entre nous ne pourraient en dire plus. Petite visite guidée pour un dépaysement assuré !
Danny Pavlopoulos est à moitié grec et à moitié péruvien, mais il connaît le quartier portugais comme sa poche. Premièrement parce que sa grand-mère péruvienne lui faisait découvrir à pied plusieurs quartiers de Montréal quand il était enfant, dont celui-ci. Deuxièmement, car il a cofondé, il y a quelques années, l’agence Spade & Palacio, qui propose des visites « non touristiques » en petits groupes, et qui offre, entre autres, une promenade axée sur les murales du quartier portugais.
Nous nous rencontrons sur la Main pour entamer la visite du quartier situé entre le boulevard Saint-Laurent et la rue Saint-Urbain, qui s’étend depuis l’avenue des Pins jusqu’au boulevard Saint-Joseph. « Dans les années 1950, la plupart des nouveaux arrivants portugais venaient des îles des Açores et de Madère. Il y avait une entente entre les gouvernements : les îles manquaient de travail, et le Québec avait besoin d’hommes pour occuper des emplois en agriculture et en construction. Par après, il y a eu une deuxième vague d’immigration à la suite de la révolution des OEillets en 1974 et de la chute de la dictature au Portugal. Ces événements ont provoqué des lendemains politiques agités », explique notre guide en déambulant sur Saint-Laurent.
Tout en racontant un pan d’histoire, Danny Pavlopoulos désigne une succursale de Pharmaprix, « qui était autrefois un supermarché juif, Warshaw, là où le poulet portugais serait arrivé à Montréal. Et ce, grâce à un Portugais qui aurait convaincu les propriétaires de vendre son poulet mariné ». Ici, l’histoire des Juifs et celle des Portugais sont très liées, souligne Danny Pavlopoulos. « Souvent, des commerces ayant appartenu à des Juifs sont passés aux Portugais et vice-versa. Leur proximité est marquée dans le quartier. » Preuve de ce qu’il avance : une grande murale de Leonard Cohen, d’origine juive, au coin des rues Napoléon et Saint-Dominique, faite par l’artiste montréalais d’origine portugaise Kevin Ledo.
Le goût du Portugal
Les vagues d’immigration et cette envie des Portugais de retrouver les goûts de leur pays ont laissé leurs marques sur ce quartier montréalais. Non loin de ce qui a été Warshaw, on aperçoit la rôtisserie Coco Rico puis le Jano. Ces deux adresses proposent des spécialités portugaises : poulet rôti, côtes levées, rôti de porc, pommes de terre à la portugaise, sandwichs au poulet, au porc, à l’agneau, sardines, crevettes et calmars grillés, etc.
D’après Danny Pavlopoulos, il ne faut pas non plus hésiter à entrer dans les petits commerces du coin. À la boulangerie et épicerie Soares et Fils, on trouve selon lui le meilleur chorizo en ville, et l’on peut s’y procurer de savoureux fromages des Açores. De son côté, l’épicerie Segal est connue par plusieurs pour ses beaux fruits et légumes bon marché et pour ses morues salées et séchées vendues à l’air libre derrière le magasin.
Sur l’avenue Duluth, le Café Central portugais transporte quant à lui instantanément ses clients dans l’ambiance d’un ancien café du pays des OEillets. Le petit local sombre qui refuse de suivre les modes accueille surtout des hommes qui dégustent le plat du jour avec un verre de vin, une bière ou un porto. Ils y viennent pour parler de politique, regarder le soccer ou jouer aux cartes.
De retour sur la Main, la Casa Minhota sert quant à elle des spécialités « vraiment bonnes » affirme notre guide. Palourdes, pieuvres, morue, sardines, calmars, poulet grillé, poires au porto et, bien sûr, les fameuses natas, des tartelettes sucrées aux oeufs qui constituent le dessert vedette du Portugal. Mais, selon Danny Pavlopoulos, si l’on veut goûter ces dernières, le meilleur endroit pour le faire est la pâtisserie Les Anges gourmets, car elles fondent en bouche.
Tout près de là, c’est en croisant la rue Rachel qu’on parvient au coeur du quartier portugais, précise le guide en désignant l’église Santa Cruz, le centre communautaire du même nom ainsi que l’Association portugaise du Canada.
Un peu plus au nord, au coin du boulevard Saint-Laurent et de la rue Vallières, juste après avoir dépassé la quincaillerie Azores, dont la vitrine est décorée d’objets rappelant le pays, on arrive au parc du Portugal. On y admire des azulejos, des colonnes faites de tuiles bleues et blanches comme on en trouve partout à Lisbonne et à Porto. Puis, une grande façade au portrait de la populaire chanteuse de fado Amália Rodrigues donne sur le parc, comme si son esprit veillait sur ce dernier.
« Peu de gens le savent, précise Danny Pavlopoulos avant de terminer la visite, mais on doit aux Portugais les maisons colorées du Plateau. » Depuis leurs îles natales, ils auraient ramené à Montréal l’une de leurs traditions locales, qui était de peindre leur habitation. Résultat : un quartier plein des saveurs et des couleurs de ce peuple venu d’Europe.
Pour continuer les découvertes de ce quartier ou d’un autre à Montréal, Spade & Palacio propose différentes visites en groupe ou privées : spadeandpalacio.com
Merci à Tourisme Montréal pour l’organisation de la visite.