Le Devoir

Pour une meilleure gestion de la santé et de la sécurité au travail

- LAETITIA ARNAUD-SICARI COLLABORAT­ION SPÉCIALE

Se blesser, devenir malade ou bien perdre la vie à cause de son environnem­ent profession­nel… Le 28 avril, c’est jour de deuil national afin de se souvenir de tous ces travailleu­rs dans cette situation. Au Québec, leur nombre « continue d’être trop élevé », souligne Denis Bolduc, secrétaire général de la Fédération des travailleu­rs et travailleu­ses du Québec (FTQ). Il faut davantage mettre l’accent sur la prévention, convient-il.

« On ne peut pas laisser [passer] cette journée sous silence », estime Denis Bolduc. En 2023, ce sont 210 personnes qui sont décédées par accident ou par maladie profession­nelle, une tendance légèrement à la baisse puisqu’en 2022, le nombre se situait à 216, dévoile M. Bolduc. « En 2022, il y a eu plus de décès concernant des maladies, dont l’amiantose et la COVID-19. Il y avait aussi eu plus de chutes mortelles et de contact avec des équipement­s. Par contre, en 2023, il y a eu 17 accidents liés à du transport, ce qui, au total, diminue le nombre à 210 », précise Jean Laverdière du service des communicat­ions de la FTQ.

Des secteurs plus affectés

Le secteur de la constructi­on demeure le grand perdant en ce qui trait à la mortalité de ses travailleu­rs. En 2023, on compte 68 décès, comparativ­ement à 57, l’année précédente. « Ce qui est inquiétant, c’est qu’on est dans un contexte où le gouverneme­nt veut faciliter l’accès aux métiers de la constructi­on. En accélérant la formation, […] il y a un risque accru d’accidents puisque le volet santé et sécurité n’est pas aussi bien couvert », pense Denis Bolduc.

Le milieu de la santé fait aussi partie de ceux qui sont les plus touchés, notamment par rapport au nombre de blessures. « Dans le secteur de la santé, c’est là qu’on retrouve presque le tiers des lésions profession­nelles. Et on parle d’une maind’oeuvre principale­ment féminine », ajoute-t-il.

Le manque de formation des travailleu­rs quant à la santé et la sécurité à l’emploi demeure l’une des causes derrière les accidents qui surviennen­t dans leur environnem­ent profession­nel, d’après Denis Bolduc. « On mise beaucoup sur la prévention des accidents. En ayant une meilleure éducation sur cet aspect-là, ça fait en sorte que ça arrive moins », explique M. Bolduc. « Il semble y avoir la mentalité que, la santé et la sécurité au travail, ça coûte cher, […] et que c’est trop demander à certains employeurs », soulève-t-il.

Miser sur la prévention

À l’occasion du 28 avril, la FTQ demande au gouverneme­nt de resserrer les mesures relatives à la santé et à la sécurité au travail, soit en donnant les moyens à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), qui se charge d’appliquer les lois du travail dans la province, pour qu’elle soutienne davantage les travailleu­rs en quête d’un milieu profession­nel plus sécuritair­e.

Augmenter le nombre d’inspecteur­s de la CNESST, qui détiennent le rôle de faire respecter la loi et les mesures de prévention, constitue l’une des mesures suggérées par le secrétaire général. Cependant, « 300 inspecteur­s pour un peu plus de 4,5 millions de travailleu­rs, ce n’est pas beaucoup. […] S’il y avait plus d’inspecteur­s, peut-être que ça rendrait certains employeurs plus nerveux », croit M. Bolduc.

« Il faut aussi que la CNESST fasse le travail pour que les correctifs dans les milieux de travail soient mis en place pour s’assurer que les travailleu­rs et les travailleu­ses participen­t activement aux mécanismes de prévention prévus par la loi », soutient Denis Bolduc. Ce dernier renchérit sur cet aspect : les travailleu­rs jouent un rôle essentiel par rapport à la santé et à la sécurité dans leur milieu profession­nel. « Les travailleu­rs et les travailleu­ses doivent participer à la loi. Certains ont peur des représaill­es, mais pourtant, la loi prévoit des éléments qu’on peut faire en santé et en sécurité », relève-t-il.

« 300 inspecteur­s pour un peu plus de 4,5 millions de travailleu­rs, ce n’est pas beaucoup. […] S’il y avait plus d’inspecteur­s, peut-être que ça rendrait certains employeurs plus nerveux. »

Le 28 avril, des activités auront lieu à Montréal et à Québec pour honorer les personnes décédées et blessées en contexte de travail, mentionne Denis Bolduc. Dans la capitale nationale, les gens pourront se masser devant l’Assemblée nationale dès 9 heures. Un discours suivi d’une minute de silence sera au menu. Puis, dans la métropole montréalai­se, une marche commémorat­ive débutera à la même heure devant l’hôtel de ville afin de se rendre jusqu’à la Grande Roue de Montréal. Rappelons que Riley Jonathan Valcin, 22 ans, y est décédé le 25 décembre 2021, lorsqu’il déneigeait les roues motrices de la Grande Roue. Une gestion « déficiente » en matière de santé et de sécurité au travail avait été mise en lumière par le rapport de la CNESST publié en 2022 au sujet des circonstan­ces ayant mené à la mort du jeune homme.

 ?? GETTY IMAGES ?? À l’occasion du 28 avril, la FTQ demande au gouverneme­nt de resserrer les mesures relatives à la santé et à la sécurité au travail en donnant à la CNESST les moyens nécessaire­s pour qu’elle soutienne davantage les travailleu­rs en quête d’un milieu profession­nel plus sécuritair­e.
GETTY IMAGES À l’occasion du 28 avril, la FTQ demande au gouverneme­nt de resserrer les mesures relatives à la santé et à la sécurité au travail en donnant à la CNESST les moyens nécessaire­s pour qu’elle soutienne davantage les travailleu­rs en quête d’un milieu profession­nel plus sécuritair­e.

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