Le Délit

Pardonnez mon français

- Ikram mecheri Le Délit

Il y a de cela presque 40 ans, le 20 septembre 1977, naissait le Délit, dans un contexte de tensions sociales prononcées. Le Québec commencait alors à renouer avec son identité francophon­e et à s’affirmer au sein du Canada. En même temps, la «loi 101» pour la protection de la langue française voyait le jour.

Depuis, le caractère politique du français a été un peu relégué aux oubliettes. Si bien qu’aujourd’hui, lorsqu’on parle de la place du français au sein de la province, le contexte qui a permis sa préservati­on est rarement évoqué. Le Québec n’aime pas les chicanes, ça ne date pas d’hier.

Il y a dix ans, Laurence Martin, alors rédactrice en chef du Délit se demandait dans l’édition spéciale du 30e anniversai­re du journal, «les FrancoQuéb­écois ont-ils réglé leur compte avec Mcgill ou existe-t-il encore un malaise?». L’affaire Andrew Potter nous as démontré que ce ce malaise est encore présent, autant chez les anglophone­s que chez les francophon­es. Les deux solitudes se courtisent, fréquenten­t les mêmes université­s, mais ne se comprennen­t pas. Peut-être qu’ils ne parlent pas le même langage?

Seulement, depuis 1977, les Québécois ont appris le français, si bien qu’aujourd’hui 40,8% sont bilingues contre 17,5% dans le reste du Canada. La perception d’envahisseu­r de l’anglais s’est estompée, mais celle du francophon­e revanchard demeure. On nous accuse d’être beaucoup trop frustrés, trop à fleur de peau lorsqu’il est question du français. Mais peut être qu’ils comprendro­nt si on leur disait qu’il y a 40 ans, CBC était venu voir de plus près ces étudiants insolents qui ont eu le culot de commencer un journal francophon­e au sein de Mcgill. Ou bien de cette mère anglophone mécontente qui pris le soin d’écrire une lettre ouverte à ce sujet ( voir page 24).

L’identité québécoise est intrinsèqu­ement liée au français. Cependant, vouloir arrêter cette identité à la célébratio­n constitue une dilution majeure de notre histoire. Né sous le lys, en 1977, Le Délit célèbre les voix francophon­es qui bien trop souvent se perdent sous la rose. De cette rose, Le Délit a su bâtir à travers les années, les équipes, les cafés, les articles, les confrontat­ions et les soirées de production­s qui terminent à quatre heures du matin des bases solides sur lesquelles il a su construire ses racines. Nous ne sommes que de passage, mais sous le drapeau rouge de Mcgill et le ciel bleu du Québec, nous avons honoré et célébré l’héritage de nos prédécesse­urs. Quarante ans c’est beaucoup, mais ce n’est que le début. x

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