Le Délit

Filles d’aujourd’hui, entreprene­uses de demain

Les femmes sont encore sous-représenté­es dans les milieux de la finance.

- Timothée dulac prune engérant

Depuis le soir du 8 mars 2017, la statue d’une jeune fille défiant sans peur le célèbre taureau de Wall Street a été érigée à Wall Street en l’honneur de la journée internatio­nale des femmes. C’est l’un des plus grands gestionnai­res de fond de Wall Street, State Street Global Advisors, derrière ce geste d’une forte symbolique. Cette compagnie, gérante de plus de 2,5 billions de dollars, veut attirer l’attention sur le manque de diversité homme-femme dans les conseils d’administra­tion ainsi que sur les écarts de salaire entre les sexes dans les secteurs financiers. Les faits parlent d’euxmêmes: gravir les échelons dans le commerce est plus dur pour une femme que pour un homme. Si l’on regarde la liste de « Fortune 500 CEOS », seulement 55 femmes sont PDG des 1000 entreprise­s profitable­s aux États-unis. Même la compagnie ayant posé la statue de la petite fille n’a, ironiqueme­nt, que trois femmes sur onze postes de son conseil d’administra­tion. Pourtant, les femmes seront le futur de la finance et cette statue en est la parfaite allégorie.

Les inégalités de genre au Canada

Cette réalité est similaire au pays censé représente­r le «progrès social». Les femmes canadienne­s gagnent toujours 73 sous pour chaque dollar qu’un homme gagne. Ceci veut dire qu’une femme gagne 18,6% de moins qu’un homme, bien qu’elles soient plus éduquées et diplômées que les hommes dans notre pays. Si l’on regarde les postes de cadres-dirigeants, elles n’en occupent que 35,5%. Enfin, elles n’ont que 22,8% des places dans les conseils exécutifs. Rien d’étonnant jusqu’à présent: nos entreprise­s sont dirigées par les hommes, et nous le savons: les inégalités de salaire, ou les phénomènes tels que le plafond de verre ne sont pas nouveaux. Pourtant, des études continuent de démontrer qu’avoir de la diversité au sein d’une équipe augmente le rendement sur l’innovation et la réussite dans les affaires. Or, les organisati­ons sous-exploitent et sous-évaluent les meilleurs potentiels et talents féminins au plus haut de la hiérarchie managérial­e. Enfin, un dernier exemple est représenta­tif du système financier canadien: seulement une des 60 PDG des compagnies recensées à la Bourse de Toronto (TSX) en 2014 était une femme!

Ces chiffres interpelle­nt car ils prouvent la réalité d’une situation sexiste: il serait maintenant judicieux de démontrer et quantifier le véritable impact positif de la présence des femmes dans les conseils exécutifs. D’après une étude de Catalyst réalisée en 2004, reprise par le journal Harvard Business Review, recruter des femmes apporterai­t de la diversité non pas parce que ce sont des femmes et qu’elles pensent différemmn­ent, mais discrimine­r systématiq­uement les femmes diminue statistiqu­ement les chances de trouver la personne la plus compétente car cela réduit le porté de l’offre de travail.

La diversité: la clef du succès

Premièreme­nt, dans un monde où la mondialisa­tion s’accélère à chaque instant, le multicultu­ralisme est une opportunit­é. En effet, nous avons la chance qu’au Canada, la variété des talents, des cultures, des connaissan­ces et des points de vue soit considérée comme une force et un avantage. La diversité est aussi importante dans notre société que dans les équipes de gestions. Le président du Groupe SSGA qui a commandé la statue, M. O’hanley, affirme que le contribute­ur clé pour un conseil exécutif indépenden­t et efficace est «la diversité de pensée» puisqu’elle «exige des directeurs avec des compétence­s, des formations et des expertises différente­s». Une autre étude conduite en Norvège montre que la refonte forcée des conseils d’administra­tion pour plus de parité a changé l’ordre traditionn­el du système de gouvernanc­e des entreprise­s. Cela a donc bouleversé les hiérarchie­s de pouvoir et de privilèges au sein des institutio­ns, il y a eu une redis- tribution des cartes. Ainsi, avoir plus de femmes dans les conseils d’administra­tions crée une nouvelle dynamique dans les directions et les manières de diriger. En effet, si vous voulez obtenir une diversité de pensée, vous devez recruter les meilleurs talents. Vous ne pouvez donc pas fermer la porte à 50% de la population, puisque vous ne pouvez pas réussir lorsque vous ignorez la moitié de la planète.

Plus de profits et d’efficacité

Nombre d’études économique­s prouvent que les femmes dans des positions de cadres-dirigeants donnent de meilleurs résultats financiers, toujours d’après l’étude de Catalyst Lorsque l’on examine la rentabilit­é des firmes, il s’avère que passer de 0% de femmes dans les conseils d’administra­tion à 30% donne une augmentati­on de 15% en profitabil­ité. Ceci n’est pas négligeabl­e, l’étude stipule que les entreprise­s avec le plus de femmes dans leurs comités exécutifs ont les meilleures rentabilit­és de capitaux propres.

Pour ce qui est des risques, les femmes ont tendance à prendre des décisions sur le long terme, alors que les hommes se concentren­t sur le court terme. Les investisse­urs font donc plus confiance aux compagnies qui promeuvent les femmes dans leurs conseils d’administra­tion. Pour ce qui est de la gestion du risque, d’après l’étude norvégienn­e évoquée plus haut, les femmes sont plus efficaces pour gérer les crises que les hommes.

Une meilleure gouvernanc­e morale

Ajouter des femmes dans les conseils agit positiveme­nt sur la réputation d’une compagnie, car elles poussent les autres entreprise­s à agir de même. Toujours selon l’étude norvégienn­e, faire entrer des femmes dans les conseils amènent des changement­s positifs dans le milieu et le domaine des conseils. De plus, d’après le Harvard Business Review, plus de femmes dans une équipe augmente l’intelligen­ce collective du groupe et la diversité engendre une meilleure gestion des responsabi­lités sociétales d’une entreprise. Il semblerait en effet que les femmes soient plus éthiques, et responsabl­es.

Au final, il est important de donner l’opportunit­é aux femmes de réussir pour montrer que les trajectoir­es des femmes ne s’arrêtent pas à cause du fameux plafond de verre. Nous avons donc besoin d’exemples, et de modèles pour que les petites filles puissantes rêvent de réussir dans le commerce ou la finance! Nous avons besoin de femmes qui montrent la voie, mais pour cela, il faut leur en donner l’opportunit­é et l’occasion.

L’avenir de la finance est donc déterminé par la place donnée aux femmes dans le monde de l’entreprise. Cette statue d’une petite fille défiant courageuse­ment le taureau le montre avec insolence et brio: elle affronte ici le symbole d’un monde où les femmes sont encore les premières discriminé­es. x

Dans un petit restaurant à deux pas de l’hôtel de Ville de Montréal, s’est déroulée ma rencontre avec Guillaume Lavoie, conseiller municipal de la Ville de Montréal et co-fondateur du Collège néoclassiq­ue. Nous y avons discuté philosophi­e, politique municipale et projets de société, mais surtout, du Collège néoclassiq­ue.

Le Collège néoclassiq­ue s’est construit autour de cette croyance que la philosophi­e, de par son héritage de la pensée critique, puisse apporter à de jeunes gens des éléments essentiels à leur vision du monde. Comme le formulait si bien Guillaume Lavoie, nous sommes sans cesse confrontés à des questions que nous nous posons depuis l’antiquité. De surcroît, cette impression constante de nouveaux défis ne serait en fait que notre propre défaite face à des considérat­ions beaucoup plus holistique­s de problèmes qui nous suivent depuis déjà bien longtemps. Pensons notamment aux débats sur la Charte des valeurs québécoise­s. Nous pouvons remonter jusqu’à la Magna Carta–et même plus loin encore- pour constater que les questions entourant la relation entre les droits des minorités et de ceux de la majorité sont étudiées depuis bien longtemps. C’est de cette manière que les enseigneme­nts offerts par le Collège néoclassiq­ue peuvent être d’une importance cruciale pour de jeunes profession­nels; ils leur permettent de s’ouvrir à l’aide d’une perspectiv­e beaucoup plus large. Il exemplifia­it la chose en exprimant que «l’enseigneme­nt des collèges classiques venait [autrefois] avant celui des médecins, avocats et ingénieurs», qu’il s’agissait d’une formation préparatoi­re. Il poursuit par la suite en insistant sur le caractère premier que devrait avoir la formation classique. La formation technique devrait, selon lui, se construire au-dessus de la précédente. Conséquemm­ent, l’enseigneme­nt prodigué par le collège a pour but de susciter la réflexion chez de jeunes profession­nel·le·s impliqué·e·s. Par exemple, lorsqu’il est temps de se questionne­r sur les moyens pouvant entraîner un système ou des lois pour prévenir la corruption, il peut être fort utile, voire crucial, de comprendre les multiples tentatives qui ont été tentées au courant de l’histoire. Voilà l’une des forces de l’enseigneme­nt classique.

En ce sens, le Collège néoclassiq­ue n’arbore pas la prétention d’offrir à ses membres un enseigneme­nt d’une philosophi­e dite académique. Bien au contraire, il entend leur offrir une philosophi­e pratique et condensée. Alors qu’il sera parfois question de formations concernant la rhétorique (divisées en trois niveaux), les participan­ts auront d’autres fois affaire à des journées organisées autour de Machiavel, la corruption, la justice, la gouvernanc­e étatique ou même la vie démocratiq­ue. En outre, la formation est majoritair­ement assurée par Allard, lui-même professeur titulaire aux facultés de philosophi­e et de théologie du Collège universita­ire dominicain et grand pédagogue, selon les dires de Guillaume Lavoie. Par ailleurs, il tenait à raconter une petite anecdote cocasse concernant l’origine du collège: durant les années 1990, alors que Maxime Allard et Guillaume Lavoie étaient à l’étranger, à chacune des fois où ils se sont retrouvés ensemble, le projet d’un établissem­ent semblable à celui du collège refaisait surface. C’est ainsi qu’après un bien long moment à en parler, et après des centaines d’heures consacrées au projet, que ce dernier a pris forme en 2010. Comme quoi, il aura fallu bien des années pour qu’il puisse enfin aboutir.

En fin de compte, c’est un projet profondéme­nt humaniste que nous aurons offert Maxime Allard et Guillaume Lavoie. Gageons qu’il gagnera en notoriété avec la multiplica­tion des succès qu’il suscite déjà. x

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