Deuxième école à Saint-Jean : Holy Cross?
Déplacer les élèves de la 7e à la 12e année dans les bâtiments de l’école Holy Cross dès septembre 2017? La solution proposée par Dale Kirby pour résoudre le manque d’espace à l’École des Grands-Vents de Saint-Jean suscite des questions pour les parents.
Mardi 11 avril, lors d'une réunion spéciale des parents de l'École des Grands-Vents de Saint-Jean, le Conseil scolaire francophone provincial de Terre-Neuve et du Labrador (CSFP) a présenté les plus récents développements de ses négociations avec le gouvernement provincial. En gros, une nouvelle école, ça devra attendre cinq ans, minimum.
Face à cette réalité, le CSFP a présenté une solution proposée au départ par Dale Kirby, ministre de l'Éducation et du Développement de la Petite Enfance : emménager les élèves de la 7e à la 12e année dans l'école intermédiaire Holy Cross du Newfoundland and Labrador English School District (NLESD). Les élèves qui la fréquentaient étudient maintenant à Brother Rice Junior High.
Selon le CSFP, cette grande école, vieille de cinquante ans mais encore en état d'usage, pourrait aider à remédier aux problèmes criants de manque d'espaces à l'École des GrandsVents. Quelque 175 élèves et les membres du personnel sont depuis quelques années entassés dans des locaux scolaires du Centre des Grands-Vents, conçus au départ pour accueillir autour de 85 élèves.
Le CSFP a souligné que cette solution ne serait que temporaire, puisque leur but ultime est de construire une nouvelle école dans l'ouest de la ville, afin de rejoindre plus de familles francophones et d'augmenter le nombre d'élèves que peut accommoder le CSFP dans la région de Saint-Jean. Leur principal outil pour atteindre ce but est l'Article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantit le droit à l'instruction dans la langue de la minorité.
Cela étant dit, impossible de savoir à l'heure actuelle si ce projet de nouvelle école aboutirait en une autre école pour les niveaux primaire et élémentaire, pour les niveaux intermédiaire et secondaire et toute autre combinaison de niveaux.
Multiples options?
Après la présentation du CSFP, parole fut donnée aux parents présents dans la salle. Des inquiétudes, il y en avait de toutes sortes. Certains parents, faisant valoir l'immensité de cette école qui, selon les dires, peut accueillir plus de 350 élèves, ont demandé s'il serait possible, voire préférable, de déménager tous les élèves des Grands-Vents à Holy Cross. Les élèves du primaire et de l'intermédiaire, soit de la maternelle à la 6e année, sont en majorité après tout, et pourquoi ne garder toute la « famille » ensemble? Le CSFP a répondu que Holy Cross a été conçue comme école intermédiaire et secondaire, soit de la 7e à la 12e année, et que la cours de récréation, entre autres, n'est pas adéquate pour les plus jeunes et leurs jeux.
Certains parents ont demandé pourquoi les élèves et leurs enseignants ne pourraient pas simplement emménager au deuxième étage du Centre des Grands-vents. La réponse fut semblable : le Centre a été conçu comme espace communautaire intégrant une école primaire. L'aménagement des élèves de la 7e à la 12e dans les bureaux des organismes francophones n'offrirait ni un plus grand gymnase, ni une plus grande cafétéria, ni un laboratoire scientifique, ni des toilettes supplémentaires, ce dont les jeunes du secondaire ont besoin.
Des personnes présentes dans la salle se sont alors écriées que certains des organismes ne desservent pas Saint-Jean et devraient donc aller ailleurs, ne serait-ce que pour agrandir les espaces destinés aux élèves de la maternelle à la 6e année.
D'autres ont souligné que l'enjeu principal reste de vraiment répondre aux besoins des enfants pour assurer leur réussite scolaire et leur épanouissement. Dans cette veine, un parent s'est exclamé : « Le sport et l'éducation vont de pair. Il y a des enfants du degré intermédiaire qui jouent dans une ligue de 6e année! Qu'est-ce qui se passera avec 2 écoles ?». « Est-ce que ma fille va rester ici? Non, elle ira dans l'école où il y a un gymnase, un laboratoire de sciences et tout le reste », a ajouté un autre.
La réputation du quartier
Malgré les besoins pressants en infrastructure, des parents se sont dit réticents et ont tenu à discuter de l'emplacement de Holy Cross, qui se trouve près de Buckmaster's Circle. Holy Cross avait une bonne réputation lorsqu'elle était occupée par des élèves; le quartier, lui, a une des pires réputations de la ville, ont avancé des participants.
Ces parents ont affirmé refuser d'y envoyer leurs enfants, car ils considèrent que le voisinage de l'école n'est pas sécuritaire. D'autres, disant y avoir grandi ou habité, ont dénoncé cette réticence, cette peur qui ne serait qu'un symptôme de la stigmatisation du quartier. Ils ont expliqué que les temps ont changé, que le quartier n'est plus ce qu'il était et que les problèmes qu'on y retrouve sont les mêmes que dans tout autre quartier, mais ça n'a pas été suffisant pour calmer les craintes des plaignants.
Délais serrés
Quelques personnes présentes à la réunion ont questionné la faisabilité du plan Holy Cross. Est-ce que le CSFP aura l'argent et le temps nécessaire pour rafistoler l'immeuble et embaucher du personnel enseignant spécialisé et qualifié (en sciences, en mathématiques avancées, en musique, en arts plastiques, en éducation physique, etc.) avant septembre?
« Comment pouvez-vous garantir qu'une école sera fonctionnelle en septembre alors qu'une classe portative qu'on nous a promise pour septembre-octobre [passé] n'est pas encore fonctionnelle? » a demandé l'une. D'autres l'ont soutenue en disant qu'ils pourraient simplement envoyer leurs enfants dans une école plus proche de chez eux dans un programme d'immersion où ils auraient accès aux mêmes ressources que les enfants anglophones, ce qui assurerait leur succès et éviterait le long trajet jusqu'aux GrandsVents ou jusqu'à Holy Cross. Ils ont aussi questionné le plan de construction d'une éventuelle nouvelle école, doutant des statistiques spéculatives qu'utilise le CSFP pour justifier une telle construction.
L’avis des enfants
Et les enfants dans tout ça? Difficile à dire, mais ils ne partagent probablement pas les inquiétudes de leurs parents. Une élève de 8e année aurait sondé ses amis, a raconté sa mère, leur demandant s'ils aimeraient déménager d'école et la majorité aurait répondu favorablement. Une plus grande école avec plus de place, plus de ressources, leurs enseignants actuels et tous leurs amis? Ça ne leur ferait certainement pas de tort.
Néanmoins, à plusieurs reprises durant la réunion, des parents ont demandé et redemandé si Holy Cross était vraiment la seule option disponible pour le déménagement des élèves de la 7e à la 12e année. Les membres du CSFP ont expliqué qu'Holy Cross est la seule école vide qui pourrait accueillir convenablement des élèves, leur fournissant l'infrastructure dont ils ont besoin à leur âge pour réussir dans leurs études.
« Il n'y a rien d'autre à SaintJean. Rien. C'est vraiment notre unique option. Si nous n'allons pas là, ou d'autre pouvons-nous aller ? » Cette réponse n'étant visiblement pas suffisante pour certains, des parents ont lancé l'idée de former leur propre conseil avec pour objectif la trouvaille d'options alternatives.
Les divisions sont encore fortes et la liste de questions sans réponses claires est encore longue, mais le temps s'écoule. Sans entente signée très bientôt avec le ministère de l'Éducation et du Développement de la Petite Enfance, sera-t-il possible d'emménager dans une « nouvelle » école en septembre? Le CSFP aura peut-être une décision exécutive à prendre.
À suivre.