Paradoxe démographique
Les plus récentes données démographiques de Statistique Canada pour Terre-Neuve-et-Labrador sont tombées la semaine dernière comme une tonne de briques. Entre janvier et la fin de septembre 2018, la population de la province a baissé de quelque 3 500 personnes. C'est comme si en neuf mois, la province avait perdu presque quatre villages de la taille de Cap-Saint-Georges et plus du tiers des citoyens de Happy Valley-Goose Bay.
Selon des données de Service NL diffusées par CBC NL, il y a eu 900 décès de plus que de naissances dans la province l'an dernier. En 2018, avec 4000 nouveau-nés et des poussières, Terre-Neuve et le Labrador ont enregistré le taux de naissance le plus bas au Canada. Triste, triste record.
À la veille de la diffusion de ces statistiques, Le Gaboteur préparait un dossier portant les enjeux de la fondation d'une famille loin de sa famille. Les quatre mamans francophones qui ont témoigné de leur expérience ont, ensemble, 12 enfants et, du moins jusqu'à nouvel ordre, ont l'intention qu'ils demeurent, fièrement, terreneuviens et labradoriens.
Sont-elles le signal insoupçonné d'une revanche des berceaux? Pas vraiment. Les quatre mamans qui témoignent dans nos pages ont en commun d'être venues vivre ici – elles viennent toutes d'ailleurs, parce qu'elle ou leur conjoint ont trouvé un emploi, un bon emploi. Elles veulent également rester ici parce qu'elles ont trouvé, à défaut d'une famille biologique et d'amitiés de longue date en support, ce village d'entraide et d'amitié qu'il faut pour élever un enfant.
À défaut de prospérité économique ambiante, ces liens réels tissés au quotidien sont gage d'espoir. Mais ils ne peuvent être les seuls. Des pistes collectives sont essentielles pour dessiner l'avenir.
Solution immigration
Autour du déclin démographique, le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador a clairement choisi comme comme avenue, sinon comme solution ultime, la hausse de l'immigration. À ce chapitre, d'autres statistiques semblent plus encourageantes. Alors que le nombre de résidents permanents dans la province, ces immigrants en route vers la citoyenneté, était de 616 en 2008, il avait plus que doublé en 2018, à 1305.
Combien sont restés et combien resteront dans la province? Les données ne le disent pas. Chose certaine, sans emploi et sans entraide, ils feront rapidement bagage pour rejoindre les milliers de Terre-Neuviens et Labradoriens qui ont quitté vers des avenirs qu'ils espéraient meilleurs ailleurs au Canada depuis le moratoire de 1992 sur la pêche à la morue et l'après-boom des dernières années.
L'emploi? Nous y pouvons peu, individuellement. L'entraide, ça oui! Nous en présentons aussi un exemple en page 8 de cette édition, avec ces trousses d'accueil pour les poupons francophones créées avec amour par des mamies de l'Association communautaire francophone de SaintJean. Une initiative à imiter sans restriction partout dans la province, parce qu'elle comble à la fois les besoins des familles qui fondent famille loin des proches et qu'elle met aussi en action et à contribution des aînés qui, toujours selon les statistiques, sont maintenant majoritaires dans notre coin de terre.