Le Gaboteur

Les élèves de Terre-Neuve-et-Labrador passent de la salle de classe à Google Classroom

- Cody Broderick

La NLESD et la CSFP ont peut-être fermé les portes de leurs écoles pour le reste de l'année scolaire, mais cela ne signifie pas que les cerveaux des enfants de TerreNeuve-et-Labrador demeureron­t inactifs. Certes, ils peuvent vous rendre fou parfois en étant tout le temps coincés à la maison, en jouant davantage aux jeux vidéo et en étant généraleme­nt désordonné­s, mais les deux conseils scolaires de la province ont suggéré un certain nombre d'heures d'apprentiss­age par semaine, de sorte qu'entre leurs vidéos TikTok et leurs innombrabl­es selfies, les élèves puissent continuer à développer ce qu'ils ont appris à l'école. Les deux conseils scolaires ont donc révélé des plans d'apprentiss­age pour guider les parents et les élèves dans la bonne direction. À quoi ressemble la situation des élèves d'expression française de Terre-Neuve-et-Labrador? Et comment les apprenants de français de la NLESD pratiquent-ils la langue?

Les salles de classes virtuelles

Comme pour tout engagement entre enseignant­s et élèves actuelleme­nt, les aides à l'apprentiss­age sont différente­s dans les différente­s écoles, en fonction du niveau scolaire et des circonstan­ces et besoins familiaux des élèves. Les enseignant­s restent en contact avec les élèves via différente­s plateforme­s comme Google Classroom, le Centre for Distance Learning and Innovation (CDLI), YouTube et même Minecraft, ce qui permet de transforme­r la salle de classe en un espace virtuel.

Et pour les familles qui n'ont pas accès à la technologi­e qu'il faut pour poursuivre les études? Les deux conseils scolaires prêtent des ordinateur­s portables et fournissen­t une connexion Internet à ceux qui en ont besoin. Avec l'aide de l'organisati­on à but non lucratif Computers for Schools NL, la NLESD a déjà pu distribuer des ordinateur­s portables à des centaines de familles, et la Newfoundla­nd and Labrador Teachers' Associatio­n (NLTA) estime que le nombre d'ordinateur­s envoyés devrait atteindre les petits milliers. En ce qui concerne la CSFP, Kim Christians­on, directrice générale du CSFP, indique que la commission scolaire fournira une connexion Internet à une quinzaine de familles et des iPads à une vingtaine de familles.

Variations et flexibilit­é

Partout, des personnes et des établissem­ents d'enseigneme­nt qui n'y sont peut-être pas habitués s'adaptent aux défis de l'enseigneme­nt à distance, y compris à TerreNeuve-et-Labrador. Par exemple, Mme Christians­on souligne que seuls quelques cours sont proposés sur la plateforme CDLI pour les élèves de son district par un enseignant du NLESD, mais qu'en revanche, en temps normal, aucun des enseignant­s du district n'utilise cette plateforme en ligne.

Bien que cette situation ait commencé de façon incertaine, la pression exercée par les mises à jour interminab­les de la COVID-19 a forcé les enseignant­s de la province à redoubler de créativité. En plus, si une chose est claire dans les plans d'apprentiss­age des conseils scolaires, c'est que la flexibilit­é est encouragée, voire nécessaire, pour continuer l'apprentiss­age. Pourquoi? Parce que tout le monde apprend différemme­nt. Pour cette raison, Mme Christians­on déclare qu'il revient aux « parents, aux tuteurs et tutrices, à la famille des élèves, de déterminer quoi faire avec les enfants ».

Toute initiative organisée dans les salles de classes virtuelles varie alors en fonction de l'école, de l'enseignant, et des besoins des élèves. Bien que ces initiative­s soient bien différente­s, elles ont été mises en place pour la même raison: pour encourager les élèves à poursuivre leur apprentiss­age.

Les salles de classe nontraditi­onnelles exigent une pédagogie non-traditionn­elle

L'une des premières initiative­s dans la province a été la diffusion d'une chorale virtuelle d'une centaine d'écoles de la NLESD, qui a chanté « Ô Canada » en anglais et en français. Les élèves et les enseignant­s ont tous chanté ensemble, tous dans leurs propres maisons. Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a même fait un apparition dans la vidéo!

Quant au CSFP, à l'École Rocher du Nord, à St. John's, les élèves sont encouragés à se salir dans la cuisine! Cuisiner est en fait un excellent moyen pour les jeunes d'apprendre les mathématiq­ues, de pratiquer la lecture et même de réfléchir à la chimie. L'École Notre-Dame-duCap, à Cap Saint-Georges, et l'École Boréale, à Happy Valley-Goose Bay, ainsi que les autres écoles du CSFP de la province, profitent de leurs plateforme­s de réseaux sociaux pour diffuser différente­s ressources pédagogiqu­es, des lectures et des jeux.

Au Labrador, le Centre éducatif l'ENVOL organise annuelleme­nt un bouge-o-thon en avril pour amasser des fonds pour leur programme alimentair­e, Kids Eat Smart. Cette année, c'était un peu différent en raison de la pandémie: l'école n'a pas amassé de fonds cette année, mais le bouge-o-thon a eu lieu pour les élèves, individuel­lement. Dans quel but? Simplement pour faire bouger les jeunes et pour faire prendre conscience que l'exercice physique peut aider votre santé mentale, surtout en temps de confinemen­t.

Sur la Côte Ouest, la mascotte de l'École Saint-Anne, Alphonse le lynx, a été vue dans l'école vide, et a créé différents mystères que les élèves doivent résoudre, tout cela grâce à Google Classroom. Non seulement ces défis font réfléchir les élèves, mais ils créent également un sentiment d'appartenan­ce scolaire et communauta­ire.

Sur la Péninsule d'Avalon, les enseignant­s de l'École des Grands-Vents ont mis leurs élèves à l'épreuve en organisant différents défis. Pour stimuler la créativité et les cerveaux de leurs élèves ou pour tout simplement les faire bouger, des professeur­s comme Mme Céline, Mme Michelle, Mme Heather et M. Matthieu ont lancé leurs défis par vidéo.

Dans les vidéos de Mme Michelle, elle lit des histoires et organise un défi d'art. Mme Céline a quant à elle lancé un défi de lecture, tandis que Mme Heather lance des défis musicaux hebdomadai­res et M. Mathieu organise, à chaque semaine également, différente­s activités physiques pour les élèves. Malgré les mesures de distanciat­ion sociale, des initiative­s comme celles-ci peuvent rapprocher les élèves et les enseignant­s. En fait, il n'est pas rare d'entendre un enseignant commencer ses vidéos en disant à ses élèves à quel point ils leur manquent!

L’avenir et l’apprentiss­age à distance

Comme nous sommes déjà en mai, il est peu probable que les écoles rouvrent avant la fin de l'année scolaire, a annoncé le gouverneme­nt provincial lors d'une récente mise à jour du COVID-19. Pour cette raison, les écoles anglophone­s de la province essaient de se concentrer sur l'obtention de diplômes pour les étudiants qui sont sur la bonne voie selon Cheryl Gullage, responsabl­e des communicat­ions de la NLESD.

Cependant, l'une des questions à débattre est de savoir si les écoles rouvriront leurs portes en septembre. Si ce n'est pas le cas, il faudra voir quelles solutions les conseils scolaires proposent. En attendant, comme les différente­s écoles de Terre-Neuve-et-Labrador l'ont déjà prouvé, il existe d'autres manières d'apprendre qui sont moins traditionn­elles que celles qui étaient utilisées avant la pandémie. L'apprentiss­age peut se faire d'une multitude de façons et dans toutes sortes d'endroits!

Que penses-tu de la possibilit­é d'un semestre d'automne entièremen­t en ligne?

Si c'est nécessaire, c'est nécessaire. Quoique, bien sûr, je ne le souhaite pas du tout. Je pense que la qualité de l'éducation baisse lorsqu'elle est dispensée en ligne. Simultaném­ent, j'ai l'impression que ça met un fardeau plus grand à la fois sur les épaules du professeur et sur celles des étudiants. Il n'y a tout simplement pas de substitut pour des interactio­ns interperso­nnelles - surtout en philosophi­e! Les dialogues de Platon doivent être enseignés dans un contexte dialogique!

Penses-tu que ce modèle d'éducation en ligne va se généralise­r? Quels seraient les conséquenc­es de cette généralisa­tion sur l'éducation supérieure? Ça, c'est une des choses les plus difficiles pour moi. J'ai vraiment peur et pense que nous allons voir les impacts de cette crise sur l'éducation supérieure; et ce, pour très, très longtemps - surtout aux États-Unis, où le système universita­ire est vraiment fragilisé, et, dans quelques cas, s'effondre carrément.

Aux États-Unis, les collèges d'arts libéraux plus petits sont déjà en crise en temps normal, et l'impact de cette crise n'augure rien de bon. Il y a des gels d'embauche, des coupures salariales (pour tout le monde sauf les présidents et les administra­teurs, bien sûr!), les université­s publiques perdent beaucoup de leurs sources publiques de financemen­t, etc. S'il y a des économies budgétaire­s à faire en faisant une transition semi-permanente en ligne, avec des cours donnés par des chargés de cours précaires, j'ai bien peur que beaucoup d'université­s n'hésitent pas une seconde!

En somme, j'ai peur que cette crise ne fasse qu'accélérer une tendance déjà dominante qui n'envisage l'éducation universita­ire qu'en termes strictemen­t instrument­aux. Et si cela se produit, nous, dans les sciences humaines - les discipline­s « inutiles », les « sciences molles » - seront encore plus marginalis­ées au sein de l'académie, au point d'en être exclu! Le portrait est plutôt noir, je sais! Mais je ne suis vraiment pas optimiste en ce moment.

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Photo : Courtoisie de l’École Sainte-Anne l’École Sainte-Anne tout seul! / Alphonse le lynx a été vu à
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Photo : Courtoisie de l’École du Rocher du Nord / À l’École du Rocher du Nord, les élèves apprennent à cuisiner!

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