Le Gaboteur

«Le Labrador» du 19e siècle

- Louise Brun-Newhook Exploits de l'abbé au «Labrador» Un travail de longue haleine

On oublie souvent que la Basse-Côte-Nord était jadis appelée «le Labrador». C’est précisémen­t cette région qu’a explorée l'abbé Jean-Baptiste-Antoine Ferland en 1858 et qui figure en grande partie dans ses récits de voyage. Ses aventures sont à découvrir dans une nouvelle publicatio­n intitulée Le Labrador:

Notes et récits de voyage par l'abbé J.-B.-A. Ferland.

Aventures, voyages, rencontres avec des population­s acadiennes, irlandaise­s et autochtone­s… et tout ça seulement neuf ans avant la Confédérat­ion du Canada! Jean-Baptiste-Antoine Ferland était en effet un homme révolution­naire et mordu de curiosité. C'était à la fois un religieux, un historien et un patriote, bien avant l'existence du pays que nous connaisson­s aujourd'hui.

La nouvelle parution de la collection Les Cahiers de la Côte-Nord, plongera les lecteurs au coeur des aventures de ce grand voyageur qui a sillonné les côtes d'une région magnifique, entre Mingan et Blanc-Sablon, et encore méconnue à l'époque.

Le nom de Ferland est tout de même aujourd'hui bien connu au Québec. Pour Pierre Rouxel, un enseignant breton venu s'installer au Québec en 1969, la découverte de ce personnage l'a beaucoup intéressé. C'est lui qui s'est chargé de l'annotation et de l'édition d'un texte qui décrit les voyages de M. Ferland sur la Côte-Nord, avec des récits de l'abbé lui-même.

«Ferland était un historien connu qui faisait partie de l'élite de Québec dans les années 1850 à 1860», nous raconte l'enseignant-chercheur. «Et cette période-là, c'est l'époque où les intellectu­els québécois ont décidé qu'ils voulaient fonder une littératur­e canadienne-française.»

Abbé et homme religieux, il était très investi dans l'Église, mais avait toutefois d'autres intérêts. Autres que ses recherches historique­s et géographiq­ues, il pouvait aussi maîtriser à la fois l'anglais et le français - un don remarquabl­e et assez rare pour un Canadien français de l'époque.

En 1858, Ferland est venu sur la BasseCôte pour remplacer un missionnai­re oblat tombé malade. «Mais [Ferland] n'était pas un missionnai­re comme les autres!», déclare Pierre Rouxel. «C'était un intellectu­el de Québec, qui, oui est allé faire une mission, mais a surtout fait un voyage.»

Une fois sur place, il a noté tous ses exploits dans un journal avec des récits extrêmemen­t détaillés. Il parle très peu de son travail missionnai­re, mais décrit surtout le paysage de la Côte-Nord, ses habitants, la chasse au phoque, la pêche à la morue et la géographie de l'endroit. Et ce sont sur ces mémoires que Pierre Rouxel a pu baser les thèmes de cette publicatio­n.

Pas facile de publier un texte sur un homme qui a vécu il y a plus de 150 ans. L'annotation, en plus de la recherche, ont nécessité environ cinq ans de travail à Pierre Rouxel. Il était aussi très important pour ce dernier d'inclure d'autres d'éléments en plus de ses commentair­es et les entrées de journal de Ferland. Il a donc fait énormément de recherches pour inclure des cartes, des chronologi­es et une bibliograp­hie.

Un autre défi était l'emplacemen­t du projet. Bien que magnifique, la région de la Côte-Nord n'est pas très peuplée. «On est très isolés et il n'y a pas de maisons d'édition ici, alors on faisait tout chez nous», explique Pierre Rouxel. «Et le gros problème c'était qu'on n'arrivait pas à sortir de la Côte, à rayonner ailleurs. C'est pour ça qu'à un moment donné on s'est aperçu qu'il fallait trouver un éditeur en ville.»

Il a aussi fallu changer le nom de la collection. «Dans les trois premiers livres qu'on avait publiés, on avait naïvement appelé la collection Les Cahiers du GRENOC», du nom du Groupe de recherche sur l'écriture nord-côtière que Pierre Rouxel codirige. Cependant, le public qui n'est pas originaire de la région ne connaît pas cette organisati­on. Le livre qui vient de sortir inaugure donc une nouvelle collection intitulée Les Cahiers de la Côte-Nord.

Pierre Rouxel espère que tout ce travail de recherche et ces récits de voyage attireront de nombreux lecteurs. «Le texte, je dirais, vise deux lectorats: le lectorat nord-côtier, c'est-à-dire des gens qui sont intéressés par la Côte-Nord et qui vont lire le texte pour ça. Mais l'édition vise aussi un lectorat universita­ire, parce que c'est une oeuvre relativeme­nt importante du corpus québécois des années 1860.»

Il ajoute que tous ceux qui sont intéressés par les exploits de Jean-Baptiste-Antoine Ferland sont aussi bien sûr invités à suivre ses aventures dans cette publicatio­n unique.

Le Labrador. Notes et récits de voyage par l'abbé J.-B.-A. Ferland

Édition annotée et commentée par Pierre Rouxel, Les cahiers de la Côte-Nord aux éditions du Septentrio­n, sortie le 6 avril 2021.

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Photo: Gracieuset­é des éditions du Septentrio­n

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