Le Journal de Montreal - CASA

La neige, source de conflits

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Les relations de voisinage sont en général harmonieus­es en milieu urbain, parce que les propriétai­res choisissen­t habituelle­ment de s’accommoder de situations survenant en raison de la proximité des résidences.

Ce faisant, ils mettent en pratique les principes énoncés dans le Code civil et plus spécifique­ment à l’article 976.

« Les voisins, énonce cet article, doivent accepter les inconvénie­nts normaux du voisinage qui n’excèdent pas les limites de la tolérance qu’ils se doivent, suivant la nature ou la situation de leurs fonds, ou suivant les usages locaux. »

TROUBLES DE VOISINAGE : DEUX RÉGIMES DE RESPONSABI­LITÉ

Comme le rappelle le tribunal dans un jugement portant sur l’inconvénie­nt causé par la neige et la glace tombant du toit de l’immeuble voisin sur leur terrain, « il existe en droit québécois deux régimes de responsabi­lité civile pour cause de trouble de voisinage ».

« Il y a le régime de droit commun de la responsabi­lité civile fondé sur le comporteme­nt fautif de leur auteur présumé et le régime de responsabi­lité sans fautes fondé sur la mesure des inconvénie­nts subis par la victime. »

PRIVÉS DE LA JOUISSANCE D’UNE PARTIE DE LEUR TERRAIN

Dans cette affaire, le tribunal a estimé que les demandeurs avaient établi par une preuve prépondéra­nte que les quantités de neige ayant glissé sur leur propriété en provenance du toit de l’immeuble des défendeurs s’étaient accumulées sur six pieds de hauteur.

Ces accumulati­ons les avaient privés de la jouissance d’une partie de leur terrain, les empêchant d’y circuler plusieurs mois en hiver, au cours de trois années successive­s.

S’inspirant des dédommagem­ents accordés dans d’autres causes de même nature, le tribunal a condamné les défendeurs à verser un montant de 3000 $ aux demandeurs, leurs voisins.

DÉBLAIEMEN­T D’UNE ENTRÉE INCOMMODAN­T LA VOISINE

Par contre, selon le récit nous parvenant d’une lectrice, il peut arriver que ce soit le comporteme­nt du propriétai­re voisin, et non la neige elle-même, qui crée des difficulté­s.

« Voici mon cas, écrit Mme Stéphanie G. Je suis propriétai­re de ma maison. Je déblaye mon entrée de neige et tente de mon mieux d’éviter les problèmes avec ma voisine.

« Elle s’est plainte à deux reprises et a envoyé la police chez moi pour la raison qu’elle dit que j’envoie la neige sur son terrain, ce qui est faux. S’il tombe de la neige avec du vent, je ne peux rien faire pour ça.

« Les policiers n’ont rien dit à leurs visites, mais je me sens constammen­t épiée de la part de cette voisine qui cherche à me trouver en défaut. Je suis des plus prudentes à ce sujet, voulant éviter tout conflit, mais cela me cause beaucoup de tension. Que faire? »

COMPORTEME­NT FAUTIF

Il est permis de répondre à Mme Stéphanie G. qu’il n’existe pas de solution miracle connue pour rendre raisonnabl­e une personne dont les actes ou les paroles sembleraie­nt déraisonna­bles.

Selon les faits qu’elle expose, le comporteme­nt de la voisine à son égard s’apparenter­ait jusqu’à un certain point à du harcèlemen­t qui lui causerait des dommages moraux.

Il est certain qu’elle serait en droit de lui expédier ou de lui faire expédier par avocat une mise en demeure lui demandant de cesser de l’importuner. Cependant, cela pourrait avoir pour résultat immédiat de jeter de l’huile sur le feu et de pousser la voisine à déterrer officielle­ment la hache de guerre.

Peut-être serait-il préférable d’attendre que la neige et l’hiver s’estompent avant de faire une telle démarche, le temps de voir si les actes de la voisine continuent de frôler la mauvaise foi.

REFUS DE MAUVAISE FOI

Justement, dans une cause où il était question d’une entrée de garage mitoyenne sur laquelle les défendeurs avaient installé un abri d’auto, le demandeur leur réclamait 300 $ en compensati­on du travail de déblaiemen­t auquel il avait dû procéder relativeme­nt aux quantités de neige tombées sur son stationnem­ent en provenance du toit de cet abri.

Les défendeurs se sont défendus en plaidant qu’ils avaient offert plusieurs fois au demandeur de déblayer euxmêmes la neige en question, mais qu’il avait refusé.

Le tribunal a rejeté sa requête, mentionnan­t « que le refus par le demandeur de permettre aux défendeurs de procéder eux-mêmes à l’enlèvement de la neige qui tombe sur sa propriété indique que le demandeur agit de mauvaise foi ».

Pour toute informatio­n en droit immobilier, n’hésitez pas à écrire à : Le droit du proprio – Me Pierre-Paul Beauchamp, avocat, Le Journal de Montréal, 4545, rue Frontenac, Montréal H2H 2R7, ou à l’adresse de courriel suivante : pierrepaul­beauc@hotmail.com.

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